Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 6 - 3 octobre 2005
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

De l’ingénierie verte pour l’École polytechnique

Les pavillons Lassonde, inaugurés ce lundi 3 octobre, sont parmi les premières véritables constructions vertes du Québec

Photos : Punch/Photos. Photomontage : Bruno Paradis.

L’École polytechnique procède aujourd’hui, le 3 octobre, à l’inauguration officielle de ses tout nouveaux pavillons Pierre-Lassonde et Claudette-MacKay-Lassonde.

Construits au cout de 75 M$ (excluant le terrain et le mobilier), ces bâtiments offrent une surface totale de 32 700 m2, soit une augmentation de 35% de la superficie antérieure de l’École. Le nom des pavillons rend hommage au couple Claudette MacKay et Pierre Lassonde, deux diplômés de Polytechnique qui ont contribué à cette construction par un don de 8 M$. L’atrium qui relie les deux pavillons porte le nom du président du groupe Matrox, Lorne M. Trottier, qui a fait un don de 2 M$.

Les nouveaux pavillons abritent le Département de génie informatique, le Département de génie électrique, la bibliothèque et le Service informatique.

Pavillons verts

«C’est une véritable bouffée d’air frais pour les chercheurs de Polytechnique», commentait Christophe Guy, directeur de la recherche et de l’innovation. Ces propos peuvent être pris à la lettre puisque les pavillons Lassonde sont tout ce qu’il y a de plus écologique.

Avant même la construction, on s’est préoccupé de replanter ailleurs sur le site les arbres de valeur. Ceux qu’on n’a pas pu sauver ont été donnés à l’Association professionnelle des ébénistes du Québec, qui les ont transformés en meubles de collection. Un bahut est d’ailleurs en montre dans l’atrium.

Selon Michel Rose, directeur du Service des grands projets de construction, le choix des matériaux, allant du béton jusqu’à la peinture, s’est fait dans le souci d’éviter les émanations toxiques et d’intégrer du matériel recyclé. Même les tables de travail, dont les éléments de bois sont constitués de paille pressée, ne contiennent aucun formaldéhyde. Tout au long des travaux, les résidus ont été triés et répartis entre le métal, le bois, la maçonnerie et le gypse; ils ont été recyclés dans une proportion de 82%.

Mais c’est sur le plan de la conception des pavillons que l’effort écologique est le plus impressionnant. Les immeubles récupèrent l’eau de pluie et de drainage, qui est filtrée et réutilisée dans les toilettes. Lavabos et urinoirs sont dotés de détecteurs à infrarouge et certaines cuvettes sont équipées d’une double chasse d’eau permettant de varier le débit. «Tout cela permet de réduire de 92% la consommation d’eau potable», affirme Michel Rose.

En matière de chauffage, le système récupère la chaleur perdue des cheminées du pavillon principal de Polytechnique pour chauffer un circuit d’eau qui répond aux deux tiers des besoins en chauffage des nouveaux pavillons. Le toit permet en outre d’éviter la concentration de chaleur: plus de 600 des 800 m2 de toiture sont occupés par des terrasses recouvertes de trèfle! Ce toit est ainsi l’un des rares, voire le seul, toits verts de Montréal. Le reste de l’espace est couvert de pierres blanches qui renvoient la chaleur externe.

Cinquante pour cent de la surface des murs extérieurs sont fenêtrés, ce qui permet aux occupants de bénéficier de la lumière naturelle presque partout. Le surcroit de chauffage que nécessite un tel fenêtrage n’inquiète pas le directeur. «On calcule que ceci peut occasionner des pertes de chaleur variant de 3 à 5%, ce qui est inférieur à la chaleur dégagée par les occupants», souligne-t-il. Du côté de l’efficacité énergétique, le rendement des pavillons Lassonde serait de 60% supérieur aux normes nationales.

Même le stationnement est conçu en fonction de normes environnementales: deux tiers des places sont réservés à ceux qui pratiquent le covoiturage et l’on a aussi prévu de l’espace pour des véhicules hybrides, qui pourront refaire leur plein d’énergie sur place.

Opération rentable

Tout ceci est-il rentable? Même si des aménagements comme la récupération des eaux de pluie paraissent des dépenses non récupérables, Michel Rose est convaincu d’avoir fait le bon choix. «Nous avons planifié sur un horizon de 50 ans, dit-il. Tôt ou tard, tous auront des comptes à rendre quant à la consommation de l’eau et nous serons prêts. Le mobilier sans émanation toxique ne coute que 3% de plus sur un budget se chiffrant dans les 100 000 $. C’est peu payer pour respecter l’environnement et les gens qui y vivent.

«Sur une période de 40 ans, poursuit le directeur, les dépenses liées à la construction ne représentent que 2% des dépenses totales d’un bâtiment de ce type, l’essentiel, soit 92%, étant consacré aux occupants. On estime en revanche qu’un environnement écologique misant sur la qualité de vie diminue l’absentéisme et entraine un gain de productivité allant de 6 à 15%.»

Pour Michel Rose, l’opération se justifie donc même au-delà des objectifs purement écologiques. Ce chantier a été le premier du Québec à être planifié selon les normes internationales LEED (Leadership in Energy and Environmental Design). Au dire du directeur, le respect de ces critères exigeants est important si l’on veut vraiment qualifier un immeuble de «construction écologique» autrement que sur des normes «granolas 101». À son avis, les pavillons Lassonde pourraient recevoir la cote or du système LEED.

Ils ont par ailleurs déjà obtenu l’Award of Merit, de la revue Canadian Architect, et le Pilier d’or de l’Association des gestionnaires de parcs immobiliers institutionnels.

Daniel Baril

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