Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 6 - 3 octobre 2005
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

Marcher à Montréal, oui, mais où aller?

La marche n’est pas intégrée dans le quotidien des gens, selon Lise Gauvin

Marcher pour marcher, un plaisir peu répandu

La convivialité de l’environnement n’est pas directement liée à la pratique de la marche comme moyen de déplacement. L’accès à des lieux commerciaux ou publics serait davantage important, démontre une étude réalisée par des chercheurs de l’Université de Montréal. Autrement dit, les trottoirs peuvent être en bon état et les lieux surs, les gens n’intègreront pas la marche au quotidien s’ils n’ont nulle part où aller.

«Il faut distinguer le fait de marcher pour le simple plaisir de marcher et la marche comme déplacement, moyen de transport», affirme Lise Gauvin, professeure au Département de médecine sociale et préventive et chercheuse associée au Groupe de recherche interdisciplinaire en santé (GRIS). Avec Lucie Richard, Sophie Laforest et Louise Potvin, trois autres chercheuses du GRIS, elle s’est intéressée à la pratique de la marche sur l’île de Montréal, en collaboration avec des intervenants du milieu de la santé publique.

«Le bon sens dicte qu’un aménagement urbain sécuritaire favorise la pratique de la marche et du vélo, indique Mme Gauvin. Mais les infrastructures et l’environnement social ont-ils un réel impact sur cette activité? Nous avons voulu en avoir le cœur net.»

Pour examiner l’effet de ces variables sur la marche, les chercheuses ont procédé selon la bonne vieille méthode scientifique. Elles ont sélectionné une centaine de secteurs de l’île et formé des observateurs qui sont allés sur le terrain pour évaluer le potentiel piétonnier des différents quartiers. Ils ont notamment considéré l’état des rues et des trottoirs, la présence de bancs et de verdure, la circulation automobile, la sécurité du quartier ainsi que la concentration et la variété des destinations accessibles à pied.

Pour établir des comparaisons, les chercheuses ont ensuite apparié les observations enregistrées avec des données recueillies par Statistique Canada. «Le recensement de 2001 comprenait une question visant à déterminer si les travailleurs se rendaient au travail à pied, en transport en commun ou en voiture, explique Lise Gauvin. Les quartiers que nous avons observés correspondaient aux secteurs de ce recensement.»

Résultat? Les marcheurs sont prêts à franchir des nids de poule et à braver les automobilistes peu consciencieux s’ils savent qu’ils trouveront au bout de leur chemin leur bureau, un café, un centre communautaire. Corollaire: s’ils n’ont pas de destination en tête, ils ne marcheront pas pour ce type de déplacement. C’est ce qui ressort du premier volet de cette recherche dont a fait récemment état l’American Journal of Preventive Medicine.

Les Québécois sont-ils accros de leur voiture?

Tout le monde sait que l’exercice est bon pour la santé. Statistiquement parlant, l’espérance d’une vie en bonne santé serait de 11 ans moindre chez les personnes sédentaires, selon Kino-Québec, un organisme gouvernemental voué à la promotion de l’activité physique. «L’exercice permet d’améliorer la santé cardiovasculaire et de contribuer au maintien du poids santé, précise la professeure Gauvin. Marcher 30 minutes par jour à une vitesse de cinq kilomètres à l’heure est suffisant pour atteindre le critère d’activité physique recommandé en santé publique.»

Pourtant, la dernière enquête sur le sujet, soit l’Enquête sociale et de santé de 1998, a montré que la pratique régulière d’une activité physique de loisir était en déclin dans la population en général, et ce, dès l’âge de 45 ans. Comment expliquer ce phénomène? «Parmi les éléments en cause, les environnements ne sont pas systématiquement favorables à l’intégration de l’activité physique au quotidien», répond Mme Gauvin.

Dans le second volet de leur étude, Lise Gauvin et ses collègues ont justement tenté de mieux comprendre comment les facteurs tels que le statut socioéconomique, l’éducation et d’autres déterminants peuvent influer sur l’adoption de la marche comme habitude de vie. Les résultats, qui devraient être rendus publics en janvier 2006, permettront d’aider les organisations et les professionnels de la santé à mieux structurer les programmes d’intervention.

Et ça va marcher? «Nous l’espérons, confie Mme Gauvin. Comme un vieux proverbe chinois le dit: «Même le plus grand des voyages commence par un premier pas.»

Dominique Nancy

Ce site a été optimisé pour les fureteurs Microsoft Internet Explorer, version 6.0 et ultérieures, et Netscape, version 6.0 et ultérieures.