Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 11 - 14 novembre 2005
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

La Déclaration universelle sur la bioéthique voit le jour

Michèle Stanton Jean est désormais rattachée au CRDP

Michèle Stanton Jean

Le 19 octobre dernier, la Conférence générale de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) a adopté la Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’homme. «C’est le premier document international sur la bioéthique à être adopté par un aussi grand nombre de pays», résume Michèle Stanton Jean, chercheuse au Centre de recherche en droit public (CRDP) et responsable de ce projet en sa qualité de présidente du Comité international de bioéthique (CIB).

La Déclaration, qui compte 28 articles en plus d’un préambule, a été patiemment élaborée dès l’année 2002. Des représentants des 190 pays membres de l’UNESCO ont été invités à participer à sa formulation. Mme Jean s’est elle-même rendue en Turquie, en Lituanie, au Mexique et en Iran afin de suivre les débats qui entouraient sa rédaction. «Un comité d’une vingtaine de personnes a été chargé d’en rédiger une version qui, par la suite, a été discutée en comités nationaux. Puis, nous avons organisé deux rencontres d’une semaine pour en préciser la teneur.»

Le texte définitif, que l’organisme international décrit comme «un cadre cohérent de principes et de procédures qui pourront inspirer les États pour la mise en place de leurs politiques, législations et codes d’éthique», aurait pu ne jamais voir le jour tant les intervenants étaient nombreux à y mettre leur grain de sel. «Même si l’on n’obtenait jamais de consensus, je me disais que l’exercice en valait la peine, mentionne la présidente du CIB. Pendant plusieurs mois, nous avons parlé d’éthique, de droit, de justice et de science dans des forums nationaux et internationaux. C’était déjà quelque chose.»

Or, la Déclaration a été adoptée sans opposition à la 33e séance de la Conférence générale de l’UNESCO, à Paris. Même les États-Unis l’ont approuvée!

Éthique et responsabilité sociale

En plus des articles sur le respect de la dignité humaine et de l’autonomie, sur les droits de la personne et sur le consentement éclairé, qui constituent les fondements d’un tel document, la Déclaration innove avec une disposition sur la «responsabilité sociale». «L’article 14 résulte d’une préoccupation exprimée par les représentants des pays en développement, explique l’éthicienne. Ils nous disaient: “C’est bien beau la biotechnologie et la protéomique, mais nous, nous manquons d’eau et de médicaments.”»

Cet article mentionne que le progrès des sciences et des technologies devrait «favoriser l’accès à une alimentation et un approvisionnement en eau adéquats». Il devrait aussi permettre l’accès à des soins de santé de qualité et à des médicaments, «notamment dans l’intérêt des femmes et des enfants, car la santé est essentielle à la vie même et doit être considérée comme un bien social et humain».

L’article 14 souhaite de plus que la science rende possible l’amélioration des conditions de vie et de l’état de l’environnement et appelle à «la réduction de la pauvreté et de l’analphabétisme».

Malgré tout, la présidente du CIB insiste pour dire que cette déclaration demeure centrée sur l’essentiel. «Nous n’avons pas débordé sur la protection de la biosphère ou sur la marchandisation de l’eau. Nous sommes demeurés axés sur l’être humain.»

Mission accomplie, donc, pour l’UNESCO. Mais Mme Jean tient à souligner que cette déclaration constitue un moyen, non une fin. Et le cadre légal est loin d’être achevé. Certaines balises éthiques doivent être approuvées universellement pour éviter que le chercheur à qui l’on interdit certains travaux dans son pays n’ait qu’à déménager son laboratoire dans un pays plus permissif pour entreprendre ses recherches. De tels paradis scientifiques où par exemple le clonage humain est possible sans aucune restriction existent déjà.

Retour à Montréal

Bien qu’on lui attribue de plus en plus le titre d’éthicienne, Michèle Stanton Jean est historienne de formation (elle est spécialiste de l’histoire des femmes) puis andragogue. Entre 1980 et 1982, elle a présidé une commission d’étude sur la formation professionnelle connue sous le nom de commission Jean. Cette expérience l’a amenée à siéger à divers comités nationaux et internationaux qui l’ont tout naturellement conduite vers la fonction publique. Après avoir été sous-ministre au ministère du Revenu du Québec, puis à Emploi et Immigration Canada, au Secrétariat d’État et à Santé Canada, elle a représenté le pays à Bruxelles de 1998 à 2000. C’est à cette occasion qu’elle a été invitée à se joindre au CIB, qu’elle préside depuis 2002.

En 2000, Mme Jean accepte un poste de conseillère en développement de programme à la Faculté des études supérieures à la demande du doyen de l’époque, Louis Maheu. Depuis octobre dernier, elle a déposé ses valises au CRDP sur l’invitation de Bartha Maria Knoppers. Cette mère de quatre enfants et grand-mère de huit petits-enfants se dit très heureuse de vivre à Montréal, où elle a retrouvé son alma mater.

Mathieu-Robert Sauvé

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