Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 11 - 14 novembre 2005
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

Un étudiant présente son opéra

Ce n’est pas tous les jours qu’un étudiant a la chance de présenter son propre opéra. Pour Simon Bertrand, le projet deviendra réalité les 18 et 19 novembre

Simon Bertrand

Fait rarissime, la salle Claude-Champagne présente l’opéra de l’étudiant de la Faculté de musique Simon Bertrand, Prochain départ, sur un livret de l’auteur Stanley Péan.

Le compositeur, chargé de cours en contrepoint, signe ici son premier opéra. «J’ai écrit l’œuvre dans le contexte de mon doctorat, précise Simon Bertrand, mais il n’est pas produit comme tel, puisqu’il est présenté au cours de la saison d’opéra de la Faculté de musique.»

C’est à l’initiative de Rosemarie Landry, responsable du secteur Chant, que des opéras de facture moderne ont pu être présentés sur la scène de la salle Claude-Champagne. «Elle avait décidé qu’il y aurait une pièce plus récente tous les deux ans à l’Atelier d’opéra, ce qui a déjà donné lieu à la présentation d’opéras de Francis Poulenc, José Evangelista, Benjamin Britten...»

Par ailleurs, la collaboration était nécessaire avec l’Atelier de musique contemporaine, dirigé par Lorraine Vaillancourt, afin de donner vie à cette nouvelle œuvre québécoise. «Ça demandait de l’audace, souligne Simon Bertrand, parce qu’une création, c’est compliqué. La partition arrive quand elle arrive, il y a des risques, c’est plus simple de prendre une œuvre existante.»

Le compositeur, qui étudie auprès de Denis Gougeon et José Evangelista, s’estime très heureux que sa création voie le jour de cette façon. «Je n’aurais pas été capable d’écrire un opéra qui aurait garni des fonds de tiroirs. Aussi, quand, dans ma vie, aurai-je de nouveau le temps de me consacrer entièrement à une œuvre comme celle-là? Et finalement, je suis merveilleusement bien entouré!» signale-t-il. Son premier travail sur Prochain départ avec le librettiste Stanley Péan remonte à plusieurs années: «Je lui avais proposé de participer à un concours en Angleterre, le Genesis Opera Project, qui offrait une bourse substantielle pour l’écriture d’un opéra; Stanley a alors déterré une de ses anciennes pièces de théâtre. Nous n’avons pas gagné la bourse, mais le projet était lancé. Évidemment, nous avons considérablement modifié le synopsis et, ce qui a été vraiment formidable, c’est que Stanley a écouté mes caprices. C’est un atout d’avoir pu collaborer au livret.»

Le sujet, volontairement mystifiant, se réclame essentiellement de la métaphore. Tandis qu’ils cherchent en vain la solution de l’énigme de leur présence dans la salle d’embarquement d’un aéroport désert, deux personnages voient se matérialiser tour à tour des êtres insolites surgis de nulle part. «L’opéra Prochain départ est une métaphore sur l’altérité, telle qu’on la retrouve à l’intérieur de soi-même ou dans la société, dans un ton oscillant entre le fantastique, le satirique et le mystique», écrivent à son propos les deux auteurs. Sorte de huis clos divisé en deux actes, il met en scène 7 chanteurs (dont 2 personnages principaux) et 20 instrumentistes.

Comment la musique épouse-t-elle les intentions du livret? «Tout d’abord, disons que composer un opéra est une épreuve d’humilité, déclare celui qui a produit plusieurs pièces vocales par le passé, notamment sur des textes d’Alessandro Baricco et Italo Calvino. Il y a des moments où il faut accepter, même si l’on est emballé par ce qu’on est en train de faire, que les mots prennent le dessus. Il y a quelque chose de déjà suggéré par le texte, il ne faut pas tomber dans la surenchère. Mais il y a des trucs: les deux personnages principaux ont à peu près la même taille, ils sont tous les deux roux et ont presque le même registre de voix, même s’il s’agit d’un homme et d’une femme, ce qui crée d’emblée un climat de confusion. De plus, les moyens que je prends sont subversifs, dans le sens où je donne aux musiciens et aux chanteurs une matière sonore tellement unifiée que je leur procure un certain confort afin de mieux les faire pénétrer dans mon univers. Quant à ce que je veux brasser avec ça, eh bien je peux dire que c’est profondément anti-dogmes. Après tout, il s’agit d’une métaphore sur l’altérité avec, notamment, un personnage de prédicateur!»

Le musicien, dont le sujet de doctorat est «Le timbre et l’harmonie en tant que lieu dramatique dans l’opéra contemporain», utilise une matière très dépouillée, aux teintes fortement originales. «Je travaille de façon artisanale, je forge mes propres outils. Je regarde l’héritage du 20e siècle, j’y pige et je fabrique ce qui me convient, ce qui me plait. Je ne crois pas que chaque œuvre d’un compositeur doive être un statement esthétique, et je trouve qu’on est malheureusement tombé là-dedans.»

Prochain départ est une production de l’Atelier d’opéra, dirigé par Robin Wheeler, et de l’Atelier de musique contemporaine, sous la direction de Lorraine Vaillancourt. La mise en scène est signée Alice Ronfard. Gabriel Tsampalieros assume la scénographie et les costumes et Nicolas Ricard les éclairages. La distribution comprend Andréanne Brisson-Paquin, soprano, Isabeau Proulx-Lemire, ténor, Mireille Lebel, mezzo-soprano, Daniel Cabena, haute-contre, Vincent Ranallo, baryton, Mark Wells, baryton, et Marianne Lambert, soprano.

Il sera présenté les 18 et 19 novembre à 20 h à la salle Claude-Champagne. Billets: gratuits pour les étudiants, 10$ pour les ainés et 12$ pour le grand public. Renseignements: (514) 343-6427.

Dominique Olivier
Collaboration spéciale

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