Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 13 - 28 novembre 2005
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

Les juristes se penchent sur le protocole de Kyoto

En marge de la conférence de l’ONU, le CERIUM organise un colloque sur le droit de l’environnement

Hélène Trudeau

Le Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal (CERIUM), le Centre de droit international de développement durable et la Faculté de droit de l’Université McGill organisent un colloque de deux jours sur le droit de l’environnement les 2 et 3 décembre. Ce colloque se déroulera en marge de la 11e Conférence de l’ONU sur les changements climatiques, qui a lieu cette semaine à Montréal.

«Les changements climatiques constituent le problème multidisciplinaire par excellence; ce sujet intéresse tous les chercheurs de tous les domaines, déclare Hélène Trudeau, professeure à la Faculté de droit de l’UdeM. Nous voulons profiter de la venue à Montréal de milliers d’experts internationaux pour débattre des tendances et des pratiques en droit climatique.»

Responsable d’une nouvelle unité en formation au CERIUM – le Centre de développement de la recherche internationale en environnement –, Hélène Trudeau présidera la seconde séance plénière du colloque, qui portera plus particulièrement sur les innovations législatives adoptées par divers pays pour satisfaire les objectifs du protocole de Kyoto et sur les implications qu’entraine ce nouveau secteur d’intervention pour la pratique du droit.

À deux ans de l’échéance

Ce sont en fait deux rencontres onusiennes qui constituent la toile de fond du colloque: il y aura la Conférence des parties pour la convention cadre des changements climatiques, qui sera suivie de la réunion des signataires du protocole de Kyoto. Le but de la Conférence des parties est de faire avancer les ententes internationales en matière environnementale, alors que la réunion des signataires abordera notamment les mécanismes d’échanges de crédits environnementaux entre pays développés et pays en voie de développement.

La prolifération d’activités dans ce domaine s’inscrit dans la dynamique créée par l’entrée en vigueur du protocole de Kyoto en février dernier. Selon ce protocole, l’ensemble des pays de la planète doit abaisser les émanations de gaz à effet de serre (GES) de 5,2% par rapport à ce qu’elles étaient en 1990. Ce résultat doit être visé entre 2008 et 2012. Le compte à rebours débute donc dans deux ans.

Plusieurs doutent que cette cible, déjà jugée insuffisante pour stopper l’effet de serre, soit atteinte: pour le Canada, la barre est fixée à 6% alors que la production de GES a augmenté de 24% depuis 1992; par ailleurs, les États-Unis n’ont pas adhéré au protocole et les pays en voie de développement, dont le géant qu’est la Chine, n’ont pas d’obligation chiffrée.

Échange de crédits

Parmi les mécanismes mis en place par le protocole, il est possible pour un État de comptabiliser à son actif des crédits de réduction de GES pour des projets réalisés dans les pays en voie de développement qui n’ont pas de visée chiffrée. «Si le Canada construisait, par exemple, un barrage hydroélectrique pour remplacer des centrales au charbon dans un pays en voie de développement, la réduction des GES pourrait lui être attribuée», explique la professeure.

La logique derrière ce processus est que, peu importe d’où viennent les GES, ils ont un impact sur l’ensemble de la planète; le mérite de la réduction des émissions liée à un aménagement donné revient à celui qui l’a rendue possible. «Il est parfois plus économique et plus efficace de réduire les émissions dans certains pays comme la Chine et les pays d’Europe de l’Est, où il y a beaucoup de centrales au charbon», ajoute Me Trudeau.

À la séance plénière du CERIUM, on examinera des situations concernant le Canada et la Belgique, qui font partie des pays ayant des objectifs chiffrés à atteindre, et l’on se penchera sur le cas du Pérou et de Hong-Kong, deux endroits qui peuvent recevoir des projets de pays développés.

Querelle constitutionnelle

Avec ce nouveau domaine de législation, tous les éléments pour une nouvelle querelle constitutionnelle entre le Québec et Ottawa sont par ailleurs en place. Les désaccords entre le ministre québécois du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs Thomas Mulcair et son homologue fédéral Stéphane Dion, étalés au grand jour le mois dernier, en sont un présage.

Au Canada, les questions relatives aux ressources naturelles sont de la compétence exclusive des provinces, mais la pollution ne connait pas de frontières. Le fait que chaque province pourrait établir des règles environnementales différentes dans un domaine qui déborde les limites territoriales fait pencher la balance en faveur d’une prédominance fédérale dans la législation.

Hélène Trudeau développe cette analyse dans un texte sur la mise en œuvre du protocole de Kyoto au Canada, texte publié dans la Revue générale de droit l’année dernière et cosigné par Suzanne Lalonde.

Le protocole de Kyoto pose donc un défi législatif particulier au Canada et, à défaut d’une entente entre les provinces et Ottawa, la solution sera celle de la cœrcition de la part du gouvernement fédéral, observent les auteures.

Daniel Baril

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