Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 20 - 13 fÉvrier 2006
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 Archives de Forum

L’opéra Hänsel und Gretel : entre l’allégresse et la douleur

La production de la Faculté de musique sera plus sombre que plusieurs versions présentées jusqu’à maintenant

 

Les productions de l’Atelier d’opéra et de l’Orchestre de l’Université de Montréal (OUM) sont désormais inscrites au calendrier de bon nombre d’amateurs d’opéra montréalais. Lancées en 1999, elles rallient désormais les critiques et le public: dans leurs revues de fin d’année, les quotidiens La Presse et Le Devoir ont classé la production 2005, Le nozze di Figaro, respectivement dans les 5 et les 10 meilleurs concerts classiques de l’année.

Si Le nozze di Figaro avait su faire rire, l’opéra de cette année, Hänsel und Gretel, de l’Allemand Engelbert Humperdinck, est basé sur le conte des frères Grimm dont on oublie trop souvent le côté sordide.

«Après tout, c’est l’histoire d’une femme, la sorcière, qui emprisonne des enfants et qui les cuit dans un four. Elle se fait elle-même bruler dans un four. Les auteurs étant allemands, il y a quelque chose de prémonitoire dans cette œuvre, souligne Alice Ronfard, qui signe la mise en scène. C’est une pièce assez brechtienne sur la douleur des enfants, le manque d’amour, la faim et la misère. C’est une pièce grave, mais en même temps, c’est une pièce joyeuse, dans laquelle le rêve et la réalité se mêlent.»

Ayant déjà mis en scène, à l’UdeM, les opéras A Midsummer Night’s Dream (Britten) en 2004 et Dialogues des Carmélites (Poulenc) en 2003, Alice Ronfard sait faire des choses étonnantes avec des moyens limités. Dans ce cas-ci, le monde onirique des enfants sert sa vision de l’œuvre.

«L’optique que j’ai prise, c’est que ce sont les enfants qui sont eux-mêmes des bonbons, ce sont eux qui transportent les friandises. Il n’y a pas de maison, pas de four. Les enfants se perdent et ont ensuite des visions. Ils ont tellement faim qu’ils en inventent une sorcière. On ne sait pas si c’est vrai. Ils se sont peut-être assoupis dans un coin et les parents les ont retrouvés, mais ce qui s’est passé entretemps a été un grand rêve.»

La quintessence de la musique allemande

Même si le compositeur Engelbert Humperdinck est peu connu pour le reste de son œuvre, Jean-François Rivest, chef de l’OUM, estime que l’opéra Hänsel und Gretel, composé en 1893, constitue un chef-d’œuvre de la musique allemande.

«Chacune des notes est à sa place, chacune des idées est soupesée, résumant parfaitement l’œuvre à l’intérieur de chaque détail. La majorité des compositeurs allemands considéraient cet opéra comme la quintessence de la musique allemande. Il s’agissait de leur opéra fétiche», note le chef.

Selon Jean-François Rivest, cet opéra synthétise l’ensemble de l’âme allemande comme presque aucune autre œuvre n’a su le faire.

«Cette œuvre est au centre de l’esprit allemand, qui se reconnait aussi bien par son lyrisme, son côté paysan, rustique et folklorique, par sa valse, son galop, sa polka et ses diverses danses viennoises, que par son côté mystérieux, ses histoires anciennes, etc. La plupart des grandes œuvres des Allemands sont plus extrêmes. Elles vont aller plus loin dans une direction, elles vont exagérer telle autre chose.»

Le chef de l’OUM explique que la partition comporte deux niveaux, comme le conte.

«C’est une histoire où l’amour triomphe du mal. Le grand souffle de cet amour, symbolisé par la joie des enfants et par leur pureté absolue, sous-tend l’ensemble de l’opéra. La partition comprend aussi un second niveau, le mal, incarné par la sorcière diabolique mais aussi par la mère.»

Engelbert Humperdinck a travaillé avec Wagner et l’on retrouve ainsi, dans sa musique, des techniques d’écriture ressemblant à celles utilisées par son contemporain.

Après avoir présenté des opéras en français, en anglais et en italien, le temps était venu, explique Robin Wheeler, le directeur de l’Atelier d’opéra, de produire une œuvre en allemand, et il n’y avait pas de «meilleure façon d’initier nos chanteurs à ce genre de musique que de monter Hänsel und Gretel

«On a souvent l’impression, à tort, que c’est un opéra pour enfants, avec plein de bonbons, ajoute-t-il. Pendant longtemps, il a été présenté au Metropolitan Opera, à New York, la veille de Noël, une sorte de Casse-Noisette si l’on veut. Pourtant, si l’on considère l’histoire originale sur laquelle l’opéra est basé, la représentation de celle-ci devrait être beaucoup plus sombre. Et c’est l’angle que nous voulions donner à notre production.»

Julie Fortier
Collaboration spéciale

Hänsel und Gretel est présenté en version originale allemande (avec surtitres français) du 23 au 26 février à la salle Claude-Champagne, 220, avenue Vincent-d’Indy; billets: 8$ pour les étudiants, 15$ pour les ainés, 20$ pour le grand public; billetterie Admission: (514) 790-1245; on peut aussi se procurer des billets à la Faculté de musique, 200, avenue Vincent-d’Indy. Renseignements: (514) 343-6427.

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