Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 21 - 20 fÉvrier 2006
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

Rouler 3000 km à vélo dans les Andes

Par gout de l’aventure et amour du plein air, Yannick Daoudi parcourt la planète à vélo

Yannick Daoudi

À 4000 m d’altitude, enclavée dans la cordillère des Andes, la région de l’Altiplano, en Bolivie, présente des conditions extrêmes: désert glacial, vents violents, absence de végétation. Mais celles-ci n’allaient pas décourager Yannick Daoudi et sa conjointe, Kathleen Mullin, d’enfourcher leurs vélos pour entreprendre un périple de 3000 km dans ces lieux inhospitaliers.

Étudiant au doctorat en sciences de l’éducation, le cycliste n’en était pas à sa première aventure du genre. Il a en effet parcouru la France, une partie de l’Afrique et presque toute l’Indochine sur son vélo.

Toucher les étoiles

«Le vélo permet de renouer avec la nature, de ne compter que sur ses propres moyens et de se détacher du temps. Ça fait du bien, déclare Yannick Daoudi. On a ainsi une meilleure idée des distances et de ce qu’implique un voyage; on peut aussi établir des contacts qu’on n’aurait pas eus autrement. En Bolivie, c’était l’air pur et la tranquillité; la nuit, on pouvait presque toucher les étoiles.»

C’est donc à la fois par souci écologique et pour conserver l’échelle humaine des déplacements que l’étudiant choisit de voyager de la sorte, même dans des conditions adverses. Son périple en Bolivie a duré trois mois l’été dernier, mais qui dit été chez nous dit hiver dans l’hémisphère sud.

«Il faisait entre 5 et 10 °C le jour, mais régulièrement -20 °C la nuit, raconte-t-il. Nous avons même connu une nuit à -45 °C. Le froid a été le principal danger que nous avons affronté.» Et le couple dormait sous la tente!

Le vent a constitué un autre adversaire de taille pour les cyclistes. Pendant deux jours, ils ont dû marcher en poussant leurs vélos face au vent. Sans compter les côtes, l’absence de bitume sur des routes hasardeuses, les déserts de sable ou de sel.

Le seul élément de consolation, c’est qu’il n’y a pas de neige sur l’Altiplano parce que le climat est trop sec. Mais ceci pose un problème d’approvisionnement en eau; avec une faible distance de 35 km parcourus en moyenne par jour, les voyageurs devaient assurer une autonomie de 60 heures en eau et de 10 jours en nourriture.

Au pays des Aymaras

La population de la Bolivie est composée à 70 % d’autochtones et l’Altiplano est le pays des Indiens aymaras. «Ils sont plutôt réservés, mais ils étaient très intéressés par notre passage, relate l’étudiant. Ils ne comprenaient pas comment une tente aussi mince et des sacs de couchage pouvaient nous protéger du froid. Certains nous ont apporté des couvertures et parfois de la nourriture même s’ils n’avaient presque rien à manger; ils craignaient qu’on meure de froid.»

Le président nouvellement élu, Evo Morales, est lui-même aymara et le couple d’aventuriers se trouvait en Bolivie au moment de l’agitation populaire qui a précédé les élections. «En mai et juin, on a connu les manifestations et les barrages de protestation contre les privatisations», souligne Yannick Daoudi. Mais on peut douter que le leader autochtone socialiste se maintienne au pouvoir très longtemps. «En 180 ans d’histoire, ce pays a connu 200 gouvernements», indique l’étudiant.

Yannick Daoudi et sa conjointe ont profité de ce voyage pour tourner un documentaire sur les problèmes politiques, les déserts, l’exploitation des mines et la culture aymara, documentaire qui a attiré plusieurs centaines de personnes aux quatre projections du Centre d’essai de l’Université. Le couple entend aussi le présenter au Festival du film d’aventure de Montréal et au Banff Mountain Festival. «Notre objectif est d’attirer l’attention de producteurs qui pourraient éventuellement financer notre prochain projet: la traversée du désert de Gobi à cheval.»

Le vélo mène au doctorat

Pour Yannick Daoudi, le vélo n’est pas qu’une source de dépaysement. C’est durant l’un de ses périples qu’il a trouvé son sujet de thèse. Sous la direction de Thierry Karsenti, professeur au Département de psychopédagogie et d’andragogie, l’étudiant travaille sur l’effet des technologies de l’information sur les cultures minoritaires.

«J’ai une maitrise en informatique et j’ai été sensibilisé à l’influence des TIC pendant un voyage à vélo en Birmanie, signale-t-il. La culture birmane est fermée sur elle-même et j’ai vu l’incidence que les TIC pouvaient avoir tant sur sa diffusion en dehors du pays que sur le risque d’invasion extérieure. L’objet sera de cerner comment les cultures minoritaires de pays en voie de développement se représentent les TIC en tant que producteurs et utilisateurs.»

Le terrain sera sans doute celui des pays africains qu’il a déjà visités.

Daniel Baril

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