Hebdomadaire d'information
 
Volume 41 - numÉro 1 - 28 août 2006
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

Le biberon de lait avant le coucher n’est pas approprié

Chantal Galarneau dépose une thèse sur les habitudes d’apaisement cariogènes des mères

Il est tentant de faire taire un enfant fatigué le soir avec un biberon de lait. Mais ce n’est pas nécessairement la meilleure solution.

Le biberon de lait que la mère donne à son enfant pour l’aider à s’endormir cause la carie de la petite enfance. «Les parents sont conscients que les aliments sucrés provoquent des caries, mais ils savent moins que le lait contient lui aussi un sucre, le lactose. S’il est donné quotidiennement au moment du coucher, le biberon de lait augmente le risque d’apparition de la carie dentaire», explique Chantal Galarneau, qui vient de déposer à l’Université un doctorat sur les «habitudes d’apaisement cariogènes des mères».

L’utilisation du biberon de lait quand vient le temps de mettre l’enfant au lit serait-elle une pratique répandue? Oui, d’après l’étude en santé publique que la chercheuse a réalisée à la Faculté de médecine. Sur une population de 776 mères de la Montérégie, 29% ont recours au biberon de lait tous les jours pour aider leur enfant à s’endormir. Une habitude d’apaisement qui pourrait laisser ses traces sur les dents des bébés.

Pendant la nuit, le ralentissement de la salivation réduit l’effet nettoyant de la salive dans la bouche. Les micro-organismes ne sont pas délogés et ont donc le temps d’agir pour causer la carie dentaire. Surtout si les dents n’ont pas été brossées avant le coucher.

La carie qui touche les enfants d’âge préscolaire est connue sous le nom de carie de la petite enfance. «On considère la carie de la petite enfance comme une maladie infectieuse. La principale bactérie responsable, Streptococcus mutans, ne se trouve pas dans la bouche du bébé à sa naissance. Elle lui est transmise souvent par la salive d’un adulte ou d’un autre enfant», souligne la chercheuse.

La combinaison bactérie-sucre est nuisible à la santé dentaire de l’enfant. Plus on retarde la transmission bactérienne en essayant de ne pas partager les aliments, les ustensiles ou les brosses à dents, meilleure sera la santé dentaire de l’enfant. «La présence de la bactérie dans la bouche du bébe est inévitable. Mais le plus tard sera le mieux», reconnait Chantal Galarneau. Elle ajoute que le biberon donné de façon occasionnelle présente moins de risques que le geste quotidien.

Pauvreté et caries

Ce n’est pas toujours facile pour les parents de subir les pleurs d’un enfant qui ne veut pas aller au lit. Lorsque la berceuse ou l’histoire ne suffisent pas, le père ou la mère lui donne un biberon, voire une boisson sucrée ou des friandises.

Chantal Galarneau

Chantal Galarneau s’est demandé pourquoi les parents adoptent de telles pratiques cariogènes. Selon elle, le coucher est une période de la journée où les parents sont plus fatigués et plus enclins à trouver des solutions de dernier recours.

De plus, son étude tend à démontrer que la pauvreté influe sur les pratiques cariogènes des pères et des mères. Plus de 59% des mères de milieux défavorisés utiliseraient des moyens cariogènes pour endormir leur enfant, comparativement à 38% dans des milieux plus aisés.

«Si l’on veut des changements de comportement, il ne faut pas seulement faire de l’éducation et de la sensibilisation. On doit joindre les gens de milieux pauvres et travailler sur plusieurs aspects de leur vie», mentionne Chantal Galarneau.

Prévenir la carie de l’enfant

La carie de la petite enfance peut entrainer de la douleur et nécessiter l’extraction de plusieurs dents si elle n’est pas soignée. Une étude sur la santé buccodentaire des élèves québécois de cinq et six ans et de sept et huit ans effectuée en 1998 et 1999 par son directeur de thèse, Jean-Marc Brodeur, révèle que la carie de la petite enfance est très courante chez les enfants âgés de cinq ou six ans. «À leur entrée à la maternelle, 42% des enfants ont déjà eu des caries, signale Mme Galarneau. En santé publique, on suit les enfants de la maternelle à la troisième année du primaire. Ces données indiquent qu’il faut intervenir beaucoup plus tôt.» Elle fait valoir que le plan d’action de santé dentaire publique 2005-2012 prévoit agir dès la petite enfance.

Les habitudes d’apaisement cariogènes ont vite fait de s’enraciner dans la routine quotidienne du coucher de l’enfant. «Les parents doivent adopter de bonnes habitudes d’hygiène dentaire le plus tôt possible, et ce, même avant l’apparition des premières dents», note Chantal Galarneau.

On peut nettoyer les gencives avec une débarbouillette à l’heure du bain, par exemple. Quand les dents poussent, il faut les brosser au moins deux fois par jour avec du dentifrice au fluorure afin de les protéger contre la carie dentaire.

En donnant des collations santé (comme des fruits) et en insistant sur les soins dentaires, les parents assurent une bonne santé dentaire à leurs enfants.

Annie Labrecque
Collaboration spéciale

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