Hebdomadaire d'information
 
Volume 41 - numÉro 4 - 18 septembre 2006
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

L’écrasement du satellite SMART-1 filmé en direct

L’observation de l’écrasement a été faite grâce à une caméra conçue à l’UdeM

Ci-haut, des techniciens s’apprêtent à fixer la WIRCam au télescope FCH. En bas, René Doyon.

Tous les médias du monde ont rapporté, le 3 septembre, l’écrasement programmé du satellite européen SMART-1 sur la Lune. Ce qu’on sait moins, c’est que l’écrasement a été vu en direct par le télescope Canada-France-Hawaii (TCFH), situé au mont Mauna Kea, dans les îles hawaiiennes. Ce qu’on sait encore moins, c’est que la caméra qui a rendu cet exploit possible a été fabriquée en partie par le Groupe d’astrophysique du Département de physique de l’UdeM.

Ce groupe de chercheurs a acquis au fil des années une expertise internationale unique dans le domaine des caméras infrarouges pour télescopes. La dernière en date, WIRCam, est installée sur le TCFH et permet de scruter le ciel sur une superficie et en une qualité de résolution inégalées jusqu’ici.

La série d’images successives prises par le télescope montre l’apparition d’un point lumineux pendant une fraction de seconde lors de l’impact du satellite sur le sol lunaire, impact suivi d’un nuage de poussière visible pendant près d’une centaine de secondes. C’est la première fois qu’un impact lunaire est observé depuis la Terre.

Résultats inespérés

«Ces images vont au-delà des espérances puisque l’équipe du TCFH ne savait pas si on allait pouvoir voir quelque chose, indique René Doyon, membre du Groupe d’astrophysique. La caméra n’a pas été pensée pour ce genre d’observation et les résultats sont spectaculaires.»

La lumière visible sur l’animation n’est pas due à une explosion puisqu’il n’y a pas d’air sur la Lune. «Il s’agit plutôt de la chaleur produite par la roche en fusion, explique Robert Lamontagne, également du Groupe d’astrophysique. La caméra WIRCam est spécialement conçue pour détecter les rayons infrarouges émis par la chaleur et c’est ce qui est visible sur les photos.»

L’équipe du TCFH se trouvait aux premières loges pour observer l’écrasement, dont le lieu et le moment avaient été calculés très précisément.

Illustration du satellite SMART-1 en orbite autour de la Lune

Le satellite SMART-1 (Small Missions for Advanced Research in Technology) a été lancé par l’Agence spatiale européenne afin de cartographier la Lune, analyser les minéraux à sa surface et vérifier si les cratères des pôles contiennent de l’eau. «L’écrasement programmé est un plus que les responsables ont ajouté à la mission, poursuit Robert Lamontagne. L’étude des propriétés du nuage de poussière, propulsé sur plusieurs dizaines de kilomètres, permettra d’en apprendre plus sur les composantes du sol.»

Selon le professeur, le satellite de un mètre cube a dû creuser un cratère d’une dizaine de mètres de diamètre. Des chercheurs de l’Université de Kent, au Royaume-Uni, ont même réalisé en laboratoire une simulation de l’écrasement. Celui-ci produit un cratère ovale qui explique certaines caractéristiques du nuage, qui s’est dispersé de façon ovale en raison de l’angle de l’impact.

La WIRCam

La fonction de la caméra WIRCam est de repérer des objets de très faible luminosité, comme des étoiles naines brunes. Elle permet d’examiner une très large portion du ciel, soit 20 minutes d’arc, ce qui est 10 fois plus que les autres caméras du genre. Par comparaison, la pleine lune fait 30 minutes d’arc. La caméra a la particularité de maintenir une très haute résolution d’image malgré l’étendue du champ, ce qui en fait la meilleure du monde dans sa catégorie.

Robert Lamontagne

Cette caméra est le fruit d’une collaboration internationale. Le Laboratoire de physique expérimentale du Département de physique et l’Institut national d’optique de Québec sont responsables de la production et de l’assemblage des détecteurs infrarouges, constitués de huit lentilles devant résister à un froid de –190 °C. Cette basse température est nécessaire afin d’éviter tout parasite qui pourrait provenir de la chaleur dégagée par les éléments de la caméra.

L’unité de stabilisation et de correction des images a été pour sa part fabriquée par l’Observatoire de Paris, alors que la structure mécanique et le système de refroidissement sont l’œuvre du Laboratoire d’astrophysique de Grenoble.

On peut voir la séquence animée de l’écrasement de SMART-1 sur le site du TCFH, à l’adresse <www.cfht.hawaii.edu>.

Daniel Baril

 

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