Hebdomadaire d'information
 
Volume 41 - numÉro 5 - 25 septembre 2006
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

«Il faut devancer les interrogations du public sur l’ethnicité»

Dany Laferrière jette sur le tapis ses questions existentielles au lancement de la chaire sur l’éducation et les rapports ethniques

Dany Laferrière et Marie McAndrew

En raison de son parcours marqué par l’immigration et le rapport identitaire, Dany Laferrière était la personne toute trouvée pour donner le coup d’envoi à la Chaire de recherche du Canada sur l’éducation et les rapports ethniques.

Inaugurée le 18 septembre, cette chaire unique au Canada est dirigée par Marie McAndrew, professeure au Département d’administration et fondements de l’éducation et spécialiste des questions d’ethnicité et d’immigration.

Pour l’auteur, journaliste et animateur Dany Laferrière, l’ethnicité est non seulement sa préoccupation majeure, mais constitue, à son avis, «une question fondamentale pour le Québec». «Je ne veux pas que mon pays vire à droite», a-t-il lancé en expliquant pourquoi il a préféré revenir à Montréal plutôt que de demeurer à Miami.

Dans un style qui lui est unique, Dany Laferrière a fait part à son auditoire de ses questions existentielles et identitaires. «En Haïti, je me demandais qui j’étais comme le font tous ceux qui se cherchent. Mais à Montréal, on me dit qui je dois être! Pas besoin de me poser la question!»

Après «Qui suis-je?» il s’est alors demandé «Où suis-je?» Mais c’était aussi la question éternelle et sans réponse que se pose tout Québécois. Abandonnant cette interrogation, il a voulu savoir ce qu’était un immigrant et a trouvé une réponse objective: c’est quelqu’un qui se retrouve devant un agent d’immigration!

Le populaire animateur n’a pas tenu que des propos légers. «Il faut devancer les interrogations du public sur l’ethnicité et l’immigration parce que, quand le public en est rendu à les formuler, la réponse fait habituellement partie de la question», a-t-il signalé à l’endroit des experts du domaine. Au moment où, dans la population, «immigrant» devient synonyme d’«arabe», qui lui équivaut à «musulman», qui signifie à son tour «terroriste», «il faut que l’université intervienne pour préciser le vocabulaire et définir les mots selon les deux côtés de la barrière», estime M. Laferrière.

Axes de recherche

Pour la titulaire de la Chaire, Marie McAndrew, devancer les interrogations du public, et surtout les réponses faciles, est manifestement une priorité. «Il y a résurgence de l’ethnicité comme marqueur identitaire et facteur de clivages socioéconomiques au Québec», a-t-elle déclaré en situant le contexte de la création de cette chaire.

L’objectif général de la nouvelle unité de recherche est de mieux comprendre l’influence des déterminismes sociaux sur les interventions éducatives en milieu pluriethnique et de mieux cerner l’apport du monde de l’éducation à la production ou à la réduction des inégalités interethniques.

Le programme de recherche s’articulera autour de trois grands axes. Le premier – culture, socialisation et curriculum – s’attardera aux représentations des minorités dans le matériel pédagogique, à la question des accommodements raisonnables et aux attitudes des intervenants à l’égard de la diversité culturelle. Le deuxième concerne l’égalité des chances et l’équité; les travaux aborderont le cheminement scolaire des néo-Québécois et les facteurs qui influent sur la réussite. En troisième lieu, la Chaire se penchera sur les pratiques éducatives ailleurs au Canada et dans les autres pays multiculturels.

Ces volets national et international occupent une place importante puisque la Chaire a pour mandat de faciliter les échanges interprovinciaux entre chercheurs et d’accentuer la visibilité internationale de l’expérience et du savoir-faire canadiens en matière d’éducation interculturelle.

Une première série d’activités publiques, sous forme de conférences midi tenues le deuxième vendredi de chaque mois, est déjà au programme pour le trimestre d’automne.

Geste de reconnaissance

Tour à tour, la provost de l’Université, Maryse Rinfret-Raynor, le vice-recteur à la recherche, Jacques Turgeon, et le doyen de la Faculté des sciences de l’éducation, Michel Laurier, ont souligné l’expertise unique acquise par Marie McAndrew dans les nombreuses fonctions qu’elle a occupées à l’Université de Montréal, toujours en lien avec l’ethnicité, l’immigration et l’éducation.

«Cette chaire constitue un geste de reconnaissance pour ses activités de recherche, qui ont eu une incidence sur les politiques éducatives», a souligné Mme Rinfret-Raynor.

Fondatrice du groupe Immigration et métropole, pilier du Centre d’études ethniques des universités montréalaises, Marie McAndrew est également titulaire de la Chaire en relations ethniques de l’UdeM et lauréate du prix Donner pour son volume Immigration et diversité à l’école ainsi que du prix Jacques-Couture pour le rapprochement interculturel.

Daniel Baril

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