Édition du 27 août 2001 / Volume 36, numéro 1
 
  Neutralinos, musique et bénévolat
Grâce à la bourse Marie-Curie, Hélène Paquette passe l’été avec des physiciens.

Hélène Paquette a reçu la bourse Marie-Curie, décernée à une candidate prometteuse qui fait son entrée au Département de physique.

Elle joue du saxophone, sert des repas gratuits aux itinérants du square Viger et adore la musique punk rock. Pourtant, Hélène Paquette, 19 ans, est une crack en physique pure. «Comment je vois mon avenir? Je m’imagine dans un observatoire gigantesque, sur le haut d’une montagne, en train d’observer les confins de l’Univers pour découvrir des objets célestes inconnus», dit-elle en riant.

Grâce à la bourse Marie-Curie, décernée chaque année à une candidate admise au Département de physique de la Faculté des arts et des sciences, la jeune fille a passé l’été à étudier la matière sombre, soit cette masse qui échappe encore à notre connaissance. Selon une hypothèse bien admise, les étoiles, galaxies et nébuleuses ne constitueraient que 10 % de la masse de l’Univers, les 90 % restants se cachant sous une forme encore indéterminée. Le Groupe de physique des particules se penche sur ce mystère depuis plusieurs années en collaborant notamment à la mise sur pied de l’observatoire de neutrinos de Sudbury, en Ontario.

Pour son stage, Hélène Paquette s’est jointe à l’équipe du physicien Louis Lessard, qui mène actuellement l’un des plus ambitieux projets scientifiques dans le domaine au Canada. Appelé Picasso (pour «Projet d’identification des candidates supersymétriques de la matière sombre»), ce projet vise à vérifier l’hypothèse voulant que la masse manquante de l’Univers soit constituée de neutralinos, des particules minuscules voyageant à près de la vitesse de la lumière et ayant une masse qui pourrait expliquer la matière sombre. L’équipe a mis au point un détecteur contenant une gelée qui réagit lorsqu’un neutralino y pénètre. C’est au fonctionnement de ce détecteur qu’Hélène Paquette s’est consacre cet été.

Un labo bien gardé

«La première fois que j’ai mis les pieds ici, j’ai trouvé ça pas mal flyé», dit-elle en accompagnant Forum à l’intérieur du laboratoire René-J.-A.-Lévesque. N’entre pas qui veut dans cet immeuble à accès limité. Pour ouvrir la seule porte d’entrée, il faut posséder une combinaison qui change régulièrement. Passé les accélérateurs de particules, nous pénétrons dans une salle exiguë où un détecteur de radon est enfoui au milieu d’une montagne de paraffine. «Nous devons connaître parfaitement notre détecteur avant d’aller l’installer dans l’observatoire de Sudbury, explique la stagiaire. Mon travail, durant cet été, a consisté à amasser des données dans ce but.»

La mise en place dans la mine ontarienne du dispositif conçu par l’équipe du projet Picasso est prévue pour la fin de l’été. «Je suis consciente d’avoir beaucoup de chance, dit Hélène Paquette. Faire un stage payé durant deux mois, pour une étudiante, c’est une aubaine. Les emplois d’été, le plus souvent, consistent à laver la vaisselle ou à frotter des planchers.»

Autre élément qui a plu à l’apprentie physicienne: ce stage l’a préparé de belle façon à son entrée au baccalauréat en physique dès septembre. Il s’agit d’une étape de plus vers un objectif très clair pour elle: une carrière en sciences. «J’aime la recherche depuis que je suis enfant. À l’école secondaire, mes cours de physique et de chimie étaient mes préférés. J’ai d’assez bons résultats en mathématiques aussi, mais il me semble que la physique est plus concrète, plus appliquée. Et il y a tant de choses à découvrir encore…»

Une étudiante engagée

D’une valeur de 3500 $, la bourse Marie-Curie veut promouvoir les carrières scientifiques chez les filles. Elle a été créée par les dons personnels d’anciens directeurs du Département de physique en 1998. Actuellement, à peine 11 % des étudiants du Département sont des filles. Au projet Picasso, la proportion de filles est plus élevée: 4 sur 10. «Je ne me considère pas comme une exception. Pour moi, cela n’a pas d’importance. Les filles qui ne se sentent pas attirées par les sciences, je trouve ça correct.»

En tout cas, Hélène Paquette a bien l’intention de garder les pieds sur terre. Au Cégep du Vieux-Montréal, où elle a étudié avant d’être admise à l’Université de Montréal, son engagement dans l’organisme De la bouffe, pas des bombes (l’équivalent de Food not Bombs) ne l’a pas empêchée de terminer son programme d’études avec d’excellents résultats. Tous les dimanéches, d’ailleurs, elle continue de se rendre au square Viger, avec d’autres bénévoles, pour servir des repas aux itinérants. Les membres du groupe récupèrent les denrées de marchés d’alimentation et des marchés publics afin de les apprêter pour le plus grand bonheur des sans-abri. Ils étaient présents à l’îlot fleuri, durant le Sommet des Amériques, en avril dernier, pour nourrir les manifestants.

Avec son chandail aux couleurs de Bérurier noir, un groupe français qu’elle affectionne particulièrement, Hélène Paquette explique que certains de ses plus grands plaisirs sont musicaux. Elle n’a d’ailleurs pas abandonné le saxophone, un instrument dont elle a longtemps joué dans la formation Sinn Fein, un groupe punk rock qu’elle avait fondé avec d’autres musiciens.

Mathieu-Robert Sauvé



 
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