Édition du 22 octobre 2001 / Volume 36, numéro 8
 
  Prix, prêts et bourses: le salaire des étudiants
La précarité financière des étudiants est une préoccupation de toujours.

La médaille Hingston, du nom d’un ancien doyen de la Faculté de médecine, accompagnée d’une bourse, permet à son lauréat de respirer un peu… à la fin de ses études.

Au cours de l’année 2001-2002, les étudiants de l’Université de Montréal recevront au-delà de 32 M$ en prêts et bourses. Selon le répertoire 2001-2002 du Bureau de l’aide financière de l’Université, il existe au-delà de 4000 sources de financement au premier cycle. Ce bureau traite annuellement quelque 12 000 demandes d’aide financière. Cela signifie que 55 % de la population étudiante à temps plein pose sa candidature pour une bourse ou un prêt.

La situation financière des étudiants a toujours été très précaire. En 1953, Paul Frappier et Marcel Fréchette publient, dans le journal étudiant Le Quartier latin, les résultats d’une enquête qui révèlent que 43 % des étudiants estiment que leurs problèmes financiers leur paraissent «hors de proportion par rapport à leur idéal universitaire».

En 1963, une deuxième enquête préparée par l’AGEUM vient de nouveau mettre en lumière la précarité de la situation matérielle des étudiants. Cette étude démontre qu’il est plus difficile de faire des études universitaires quand on est fils d’ouvrier. De plus, la faible contribution parentale oblige plusieurs étudiants à travailler pendant la durée de leurs études.

Selon les étudiants, «à talent égal, l’université devrait être accessible à tous» parce que le résultat donnera une société «économiquement» plus forte. La deuxième partie de l’enquête indique que de 43 %, en 1954, on est passé, en 1961, à 76 % des étudiants qui font une demande de bourse. L’enquête établit aussi que certains étudiants, espérant recevoir une bourse, ont contracté des prêts personnels dans différentes institutions financières.

Prix et bourses au mérite

Une autre façon de donner un coup de pouce aux étudiants est de leur donner des prix qui soulignent leurs performances scolaires. En 1909, Laurent Beaudry, de Saint-Hyacinthe, reçoit la prestigieuse bourse Cecil-Rhodes d’Angleterre. Les 1200 £ lui ouvrent les portes de l’Université d’Oxford. Il est bien stipulé dans les conditions d’attribution que «cette bourse n’est pas une œuvre de charité et le candidat le plus fort devra être nommé sans regard aucun pour sa situation financière».

Un certain nombre d’autres critères doivent être remplis: l’aspirant doit être un sujet britannique, avoir son domicile au Canada depuis cinq ans, être célibataire et être âgé de 19 à 25 ans.

Dès 1920, un certain nombre de facultés de l’Université veulent reconnaître les efforts que leurs étudiants ont déployés au cours de leurs études. Les facultés professionnelles de médecine et de droit sont les premières à offrir ces récompenses.

La bourse de l’ancien doyen de la Faculté de médecine, le Dr Emmanuel Persiller Lachapelle, d’une valeur de 50 «piastres», est accordée chaque année au sortant qui a obtenu le plus grand nombre de points dans ses examens de doctorat.

La même faculté offre une médaille d’or destinée à perpétuer la mémoire de sir William Hales Hingston, un ancien doyen. Elle sera remise chaque année par lady Hingston à l’étudiant qui aura conservé le plus grand nombre de points dans toutes les matières primaires et finales. Cette médaille existe encore et vient d’être décernée à Mathieu Pelletier, un brillant étudiant en médecine (voir le numéro de Forum du 24 septembre).

La Faculté de droit remet également un grand nombre de récompenses. Plusieurs anciens professeurs sont des donateurs.

Historique prêt d’honneur

La récompense universitaire la plus intimement liée à l’histoire du Québec a été instituée en janvier 1944 par la société Saint-Jean-Baptiste de Montréal. Le Prêt d’honneur, œuvre d’«apostolat intellectuel», souhaite venir en aide à la jeunesse canadienne-française, qu’elle soit du Québec, de l’Acadie ou de toute autre province canadienne.

Le Prêt d’honneur est affaire nationale. Chaque année, une campagne, intitulée La Grande Visite, est lancée auprès du public. Une publicité bien orchestrée à la radio et à la télévision apparaît même dans les années 60.

Les étudiants vont recueillir, dans la population, les sommes à investir dans l’élite de demain. L’establishment canadien-français est également sollicité. Au cours de ses 20 premières années d’existence, le Prêt d’honneur distribuera 3967 prêts pour environ 1,5 $.

Avec la création du ministère de l’Éducation, en 1964, les étudiants attendent de l’État une contribution financière plus généreuse. Serge Ménard, dans un éditorial du Quartier latin, réclame «au nom de deux grands principes la gratuité scolaire et le présalaire ou toute autre mesure visant à réaliser l’accessibilité générale aux études supérieures».

Ce débat aboutira, en 1966, à la création d’un système de prêts et bourses par le ministère de l’Éducation. Depuis, de nombreuses bourses ont été créées soit par l’Université de Montréal (c’était même un des objectifs de la Campagne des années 1980), soit par des fondations privées. Les plus récentes, nées dans la controverse, sont les bourses du millénaires du gouvernement fédéral.

Denis Plante
Archiviste
www.archiv.umontreal.ca

Sources: Jean-Marc Létourneau, du Bureau de l’aide financière; Marie Léveillée et François Gravel, du Centre de recherche Lionel-Groulx; Arnaud Sales et coll., Les conditions de vie des étudiants universitaires dans les années quatre-vingt-dix, ministère de l’Éducation du gouvernement du Québec, mai 1996; Fonds du secrétariat général (D35); Fonds de l’Association générale des étudiants de l’Université de Montréal (P33); Le Quartier Latin, 1920-1970; Les étudiants et leurs préoccupations, annexe du rapport de la commission conjointe du Conseil et de l’Assemblée universitaire (commission Deschênes), 3 novembre 1969; «Le prêt d’honneur: 1944-1979», 35 ans d’aide à l’éducation et à la recherche, société Saint-Jean-Baptiste de Montréal.



 
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