Édition du 3 décembre 2001 / Volume 36, numéro 14
 
  Plaidoyer en faveur d'une meilleure vulgarisation
Les chercheurs doivent-ils apprendre à mieux communiquer avec le grand public?

Marcel Thouin pense que les chercheurs devraient apprendre à mieux communiquer avec le grand public.

La formation des scientifiques devrait comporter un volet didactique et pédagogique qui leur permettrait de mieux jouer leur rôle de communicateurs auprès des étudiants et de la société en général. À cet égard, la maîtrise d’une langue claire, rigoureuse et fonctionnelle, mais dénuée de jargon, est une compétence aussi essentielle que la connaissance approfondie du langage spécialisé de la discipline.»

Ainsi s’est exprimé Marcel Thouin, professeur de didactique des sciences à la Faculté des sciences de l’éducation, à l’occasion d’un symposium franco-québécois sur la promotion de la lecture et l’animation scientifique, qui s’est déroulé du 15 au 17 novembre dernier. Invité à prononcer une conférence devant quelque 250 personnes, M. Thouin a souligné l’importance de la valeur culturelle de la science dans le monde actuel. Malheureusement, déplore-t-il, le vocabulaire spécialisé des chercheurs fait que leurs recherches ne se fraient pas toujours un chemin vers le grand public.

«De plus, a expliqué le professeur Thouin, les sciences déclenchent plutôt des réflexes de rejet que de rapprochement, sauf dans le domaine médical, qui touche les gens de manière plus personnelle, car elles évoquent souvent de pénibles souvenirs scolaires, où se mêlent la stigmatisation de l’erreur et la désagrégation du sens.»

En d’autres termes, la science est souvent mal enseignée, ce qui provoque une perte d’intérêt pour un champ extrêmement riche de la culture humaine. Pour l’auteur de Notions de culture scientifique et technologique (MultiMonde, 1999), les hommes et les femmes de science sont en partie responsables de cette situation, car ils ne s’adressent la plupart du temps qu’à leurs pairs et ne démontrent que peu d’intérêt pour les médias (voir Forum du 23 octobre 2000).

Il faudrait rappeler aux scientifiques, selon lui, que la communication des procédés et des résultats de leurs travaux représente une exigence éthique à l’endroit de ceux qui assurent la plus grande partie de leur financement: les contribuables.

Bien sûr, les médias ne sont pas sans reproches, et les chercheurs répugnent à voir cinq ans de travaux réduits à un texte sommaire comportant un minimum de nuances et de précautions étymologiques. Sans parler du titre laconique et parfois sensationnaliste qui coiffe le texte. Les défis sont donc de taille pour qui veut être un bon vulgarisateur. «Non seulement, par exemple, le concept de cristal des physiciens a-t-il bien peu en commun avec ce qu’il évoque dans le public, mais les matrices algébriques qui permettent de le décrire sont incompréhensibles pour les personnes qui ne possèdent pas une solide formation en physique ou en mathématiques», a dit M. Thouin.

Toutefois, les concepts les plus abstraits peuvent être expliqués au moyen de la métaphore, de l’analogie et, bien entendu, de l’humour. Quelques exemples de chercheurs modèles: Stephen Jay Gould, Albert Jacquart et Hubert Reeves.

L’histoire de l’écriture

Par ailleurs, le symposium qui réunissait quelque 300 personnes — principalement des bibliothécaires — a présenté un atelier sur la «mutation de la lecture et de l’enseignement» auquel ont participé deux représentants de l’Université de Montréal: Benoît Melançon, professeur au Département d’études françaises, et Alice Van der Klei, étudiante au doctorat et chargée de cours au Département de littérature comparée.

M. Melançon, qui est l’un des professeurs les plus branchés de son département, a livré le fruit de ses réflexions sur l’évolution de la lecture et de l’écriture. Membre de différents groupes de recherche sur la littérature, il s’est beaucoup intéressé aux nouvelles technologies de l’information. Sa présentation portait sur les questions soulevées par la lecture à l’écran.

Alice Van der Klei, quant à elle, a prononcé une conférence sur l’hypertexte. À son avis, ce nouveau format aura un impact sur la pensée. «Transformé en hypertexte, le livre s’ouvre et stimule la compréhension par la mise en réseau, estime-t-elle. En format hypertextuel, le livre ne demeure plus isolé mais devient un maillon de la chaîne intertextuelle soutenant et diffusant la mémoire culturelle à travers la mise en réseau.»

Le directeur de la bibliothèque de l’École Polytechnique, Robert Dumont, a présenté une allocution dans le cadre de la conférence plénière sur le rôle à venir des bibliothèques.

Pour la Grande Bibliothèque du Québec, qui n’existe encore que de manière virtuelle, il s’agissait du premier colloque qu’elle organisait en collaboration avec la Société pour la promotion de la science et de la technologie.

M.-R.S.



 
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