Édition du 10 décembre 2001 / Volume 36, numéro 15
 
  Le géographe Rodolphe de Koninck choisit l'UdeM
Neuf universités canadiennes et étrangères ont proposé un poste au nouveau titulaire d’une chaire du Canada en études asiatiques.

Rodolphe de Koninck est titulaire de la nouvelle chaire de recherche du Canada en études asiatiques.

Le géographe Rodolphe de Koninck, professeur à l’Université Laval, est le nouveau titulaire d’une chaire du Canada en études asiatiques à l’Université de Montréal. Il déménagera dans la métropole en juin prochain pour se joindre au personnel du Département de géographie et du Centre d’études de l’Asie de l’Est (CETASE).

«Même si cela fait un peu cliché, je dirais qu’il s’agit pour moi d’un défi professionnel, a-t-il commenté au cours d’un entretien téléphonique de son bureau à Québec. Dans les universités montréalaises, on a fait un effort manifeste pour rassembler une masse critique d’orientalistes. À l’Université de Montréal, le CETASE compte plusieurs sommités. J’espère pouvoir enrichir ce centre de mon expertise.»

Spécialiste du rôle de l’agriculture dans les pays en développement, particulièrement dans le sud-est asiatique (Birmanie, Thaïlande, Laos, Cambodge, Viêtnam, Malaisie, Indonésie, Philippines, Brunei et Singapour), M. de Koninck publie à un rythme soutenu dans des revues savantes à diffusion internationale. Neuf universités canadiennes et étrangères lui ont d’ailleurs proposé un poste au cours des derniers mois avant qu’il arrête son choix sur l’Université de Montréal. 

«Expert» de l’Afghanistan

On a pu voir récemment Rodolphe de Koninck commenter la guerre en Afghanistan à l’émission Le Point, de Radio-Canada. Il précise qu’il n’est pas un spécialiste de cette région du monde à titre de chercheur universitaire. Il s’y connaît tout de même un peu plus que le citoyen moyen puisqu’il a déjà séjourné en Afghanistan et qu’il aborde la question géopolitique de ce pays dans un cours qu’il donne depuis une trentaine d’années.

S’il a accepté l’invitation à la télévision d’État, c’est qu’il s’estimait capable d’apporter un éclairage particulier sur la situation. «Il s’est dit trop de sottises depuis le déclenchement de la crise», considère-t-il.

Comme il l’écrit dans un article paru dans Le Soleil et dans Le Devoir, l’Afghanistan est d’abord un pays aux prises avec une extrême pauvreté. «Ni son histoire ni sa géographie ne sont simples. Sa population est l’une des plus bafouées et des plus pauvres du monde. Solidement enclavé, très éloigné de la mer, peu arrosé, sans grand axe fluvial, dépourvu de chemins de fer, son territoire semble a priori présenter peu d’intérêt pour ses voisins.»

Pourtant, le peuple afghan a subi les conquêtes successives de plusieurs belligérants, depuis les Huns, les Turcs et les Mongols des 5e et 6e siècles jusqu’aux islamistes actuels. L’Afghanistan a été un État tampon même si son statut et les frontières de son territoire ont toujours été précaires.

Dans le texte envoyé aux journaux, intitulé «Qu’est-ce que l’Afghanistan ?», le géographe ne parle pas que de géographie humaine. «Placé au cœur de l’axe des grands déserts du vieux-monde, plus du quart du territoire de l’Afghanistan est désertique, et une moitié additionnelle semi-désertique. C’est dire que l’agriculture n’est vraiment possible que grâce à l’irrigation. Cette agriculture tout comme les habitants du pays, comme toutes leurs activités, doivent de surcroît composer avec des écarts de température parmi les plus élevés au monde. En été, [les températures] atteignent les 50 ºC […], alors qu’en hiver il n’est pas rare que le mercure chute jusqu’à –50 ºC.»

Pour M. de Koninck, les auteurs des attentats du 11 septembre sont indiscutablement des fous de Dieu. Mais leur geste doit nous faire réfléchir sur notre monde, où la mauvaise répartition des richesses est injustifiable. «À vrai dire, écrit-il, le nombre de fous est infiniment moins grand que celui des pauvres. Ceux-ci ne demandent que la justice, le droit de vivre décemment, d’être représentés par d’autres que des fous, des fous de Dieu ou des fous de l’argent.»

Chercheur et nageur

À 58 ans, Rodolphe de Koninck dit n’avoir jamais pensé à la retraite et s’amène à Montréal avec l’énergie d’un jeune homme. «Mon sport, c’est la natation. Je nage chaque jour. Ça me garde en forme.»

On le verra probablement fréquenter le CEPSUM… entre ses voyages. Le chercheur continuera de faire régulièrement le tour du monde. À titre de titulaire de la chaire en études asiatiques, il se joint à un groupe de recherche qu’il connaît bien (il était déjà chercheur associé au CETASE) tout en se rapprochant de sa fille Sophie qui, après avoir terminé des études de droit à l’UdeM, fait son barreau. Sa femme, Hélène Legendre-de Koninck, est également orientaliste. Elle vient de publier sa thèse portant sur l’art hindou et le temple d’Angkor Vat.

L’Université de Montréal s’enorgueillit d’accueillir un chercheur comme Rodolphe de Koninck. Il faut dire que la famille De Koninck est une véritable institution à Québec. Le Département de géographie loge dans le pavillon qui porte le nom du père de M. de Koninck, Charles, un philosophe arrivé au Québec en 1934 et qui a eu 11 enfants. Actuellement, ses descendants occupent pas moins de sept postes de professeurs à l’Université Laval.
La légende raconte qu’Antoine de Saint-Exupéry, de passage chez Charles de Koninck à Québec en 1943, aurait longuement discuté avec l’aîné, Thomas, un enfant loquace et curieux. L’écrivain, qui prenait des notes, se serait inspiré de cette rencontre pour écrire Le petit prince, paru la même année.

Mathieu-Robert Sauvé



 
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