Édition du 10 décembre 2001 / Volume 36, numéro 15
 
  Deux langues, une passion
L’écrivaine Gail Scott effectue une résidence au Département d’études anglaises.

Gail Scott a couvert à titre de journaliste des événements majeurs, dont la naissance du Parti québécois et la visite de De Gaulle. Aujourd’hui, l’écrivaine anglophone vit une expérience «en résidence» à l’Université de Montréal.

Considérée comme l’un des 20 artistes les plus influents de Montréal, selon The Mirror, la romancière Gail Scott se tient, jusqu’en avril 2002, à la disposition des étudiants du Département d’études anglaises. Et elle se dit «très honorée» de cette invitation. «En tant qu’écrivaine, il me semble nécessaire d’être présente dans la société», signale l’auteure anglophone montréalaise.

C’est à la suite d’une entrevue réalisée à titre de journaliste avec le dramaturge Victor Lévy-Beaulieu que Mme Scott a décidé de devenir romancière. «Je ne pouvais plus ignorer mes désirs. J’avais pris un job, persuadée qu’on ne pouvait pas vivre du métier d’écrivain», dit-elle trois romans plus tard. En lice à deux reprises pour le prix de la Quebec Society for the Promotion of English Language Literature, l’auteure de Main Brides, paru en français aux Éditions Leméac en 1999, et de Heroine, publié en 1987 et traduit en français et en allemand, travaille présentement à un quatrième ouvrage.

Rosine, or Some Exemplary Afternoons se déroule en partie dans les Prairies et à Montréal. L’histoire se base sur la notion de fierté et de honte transmise dans les familles d’une génération à l’autre. «Quand la publication est-elle prévue? Honnêtement, je ne sais pas. Je ne suis pas du genre à écrire un roman par année et je mets du temps avant d’acheminer mes écrits à un éditeur. Je préfère écrire 10 bons livres dans ma carrière plutôt que d’en produire un tous les ans dont je ne serais pas fière.»

Montréal, mon amour

Née à Ottawa, élevée dans un village près de Rigaud, Gail Scott a habité en France, en Allemagne, en Suède et dans plusieurs provinces canadiennes avant de revenir s’installer au Québec. Elle vit à Montréal depuis 1967. «La ville, son animation et sa diversité culturelle nourrissent mes écrits», confie celle qui aime réviser ses textes dans le brouhaha des cafés du boulevard Saint-Laurent.

«Une certaine solitude est nécessaire pour écrire, mais la journée idéale pour moi est lorsque j’écris le matin, puis imprime et corrige tout ça l’après-midi ou en soirée dans un café. J’observe et je prends des notes en laissant l’ambiance, les sons, les odeurs et les voix environnantes imprégner mon écriture.» Comme Lydia, le personnage principal de son roman Les fiancées de la Main (traduction de Main Brides, publié en 1993 par Coach House Press et réimprimé par Talonbooks quatre ans plus tard), elle a un sens de l’observation aigu de même que l’imagination fertile. Mais là s’arrête la ressemblance.

Gail Scott ne voit pas dans la métropole qu’un lieu où il fait bon vivre et écrire. «J’ai un grand intérêt pour les questions sociales, l’histoire et la politique. J’aime le Québec pour son ouverture d’esprit et la façon dont on aborde les sujets culturels et politiques. C’est plus analytique comparativement au reste du Canada.»

Si Mme Scott parle et écrit couramment le français, la langue de Shakespeare demeure celle qu’elle privilégie pour ses romans. Ses préoccupations se situent toutefois plus près de celles des francophones que de celles des Canadiens anglais, souligne-t-elle. Because? «Vous savez, quand on fait partie d’une minorité, on est appelé à choisir son camp. Mes préoccupations féministes, mon séjour en France et mon expérience journalistique en politique m’ont amenée très tôt à faire ce choix.»

Écrit-on de la même façon dans les deux langues? «Non, mais ne me demandez pas pourquoi, je l’ignore.» Elle parvient quand même par la syntaxe, les habitudes de vie des gens d’ici et les citations en français à faire connaître un Montréal plein d’esprit et d’émotions.

Romancière, essayiste et traductrice

Mme Scott n’est pas en terre inconnue dans le milieu universitaire. Après avoir obtenu un baccalauréat en littérature anglaise et langues modernes à l’Université Queen’s, en Ontario, puis un diplôme d’études en littérature française à l’Université de Grenoble, en France, elle a été journaliste à la Presse canadienne et à la Montreal Gazette. Ex-chroniqueuse politique pour The Gazette, elle écrit de 1974 à 1980 des textes sur les arts et la politique québécoise pour plusieurs journaux et magazines, notamment The Globe and Mail et Maclean’s.

Parmi les rares journalistes bilingues à cette époque, elle est affectée à la couverture d’événements majeurs comme la naissance du Parti québécois et la visite de De Gaulle. Cofondatrice de la revue culturelle Spirale, elle lance en 1984 Tessera, un journal bilingue consacré aux nouvelles formes du récit féminin. La romancière, essayiste et traductrice collabore aujourd’hui à l’édition d’une publication — «axée sur les questions de narrativité» — diffusée dans Internet par le Centre de poésie de l’Université de San Francisco. Elle prononce des conférences et participe à de nombreuses lectures publiques tant au Canada qu’aux États-Unis.

Son dernier roman, My Paris (Mercury Press, 1999), a été sélectionné par la revue Quill et quire parmi les 10 meilleurs romans canadiens. Mme Scott a aussi publié un recueil de nouvelles et un essai sur l’écriture féminine au Québec et au Canada anglais. Elle a participé à la rédaction d’un ouvrage collectif, La théorie, un dimanche (paru en 1988 aux Éditions du Remue-ménage), et donné corps en langue anglaise au roman de France Théorêt Laurence. Sa traduction de l’œuvre de Michael Delisle, Le désarroi du matelot, lui a valu d’être finaliste cette année au Prix du Gouverneur général du Canada.

Les étudiants qui désirent rencontrer Mme Scott peuvent se rendre au local C-8150 du Pavillon 3150 Jean-Brillant. Elle assure jusqu’en avril une présence d’environ une journée par semaine.

Dominique Nancy



 
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