Édition du 14 janvier 2002 / Volume 36, numéro 16
 
  Pour tout comprendre de la situation internationale
L’Université de Montréal offre maintenant une formation de deuxième cycle en études internationales.

«Les questions internationales sont hypercomplexes et posent de véritables défis à l’analyse», affirme Jean-Philippe Thérien.

Au cours d’une visite en Israël l’année dernière, le premier ministre Jean Chrétien déclarait qu’il lui importait peu de savoir s’il se trouvait dans la partie ouest ou est de Jérusalem. Aux États-Unis, en pleine campagne électorale, le candidat à la présidence George W. Bush aurait associé les talibans à un groupe rock.

Lorsqu’il faut se prononcer sur les questions internationales, mieux vaut être bien informé. Et il n’y a pas que les chefs d’État qui sont amenés à se pencher sur ces questions; la mondialisation, qu’elle soit politique, économique ou culturelle, est devenue la réalité quotidienne du simple mortel.

«Tous s’entendent pour dire que le phénomène est là pour rester», déclare Jean-Philippe Thérien, professeur au Département de science politique et responsable du nouveau programme interfacultaire de maîtrise en études internationales. «Les préoccupations sociales liées à la mondialisation ont suscité un véritable engouement pour ce domaine d’études et la demande de gens compétents pour traiter des questions internationales est de plus en plus grande. Ces questions sont toutefois hypercomplexes et posent de véritables défis à l’analyse.»

Il y a trois ans, lorsque le baccalauréat en études internationales a été instauré, 100 candidats ont présenté une demande d’admission. En septembre dernier, le Département de science politique a reçu de 600 à 700 demandes. Cette affluence a amené l’Université à créer trois nouveaux programmes de deuxième cycle dans le domaine, soit un microprogramme, un D.E.S.S. et une maîtrise, offerts pour la première fois à ce trimestre d’hiver.

«Les études internationales ont pour champ de connaissance les interactions entre les États et les sociétés, indique Jean-Philippe Thérien. Ceci inclut tout autant les activités diplomatiques internationales accompagnant les relations entre les gouvernements que les relations de société à société comme les activités de coopération des ONG, les échanges culturels ou l’activité économique des multinationales.»

Le professeur voit quatre grands secteurs d’activité offrant des défis enlevants pour les diplômés de cette discipline. Il y a d’abord la filière politique, notamment les ministères des relations internationales ou intergouvernementales qui font appel à de véritables bataillons de diplomates. Il y a aussi le domaine économique, qui voit les marchés internationaux s’ouvrir, ce qui permet aux entreprises de brasser de plus en plus d’affaires à l’extérieur du pays, alors que les sociétés d’État doivent voir à attirer les investisseurs étrangers.

Vient ensuite le secteur de la coopération internationale et de l’aide au développement, avec le travail d’organismes publics comme l’ACDI ou d’organisations non gouvernementales comme Développement et paix. Finalement, la filière des communications et des médias, qui accordent de plus en plus d’importance aux questions internationales.

«Ces secteurs, politique, économique, privé et public, ne sont pas cloisonnés, souligne M. Thérien. On en a un exemple avec les missions d’Équipe Canada, qui associent le monde politique et le monde des affaires, tant du domaine public que du domaine privé.»

Cette interconnexion des secteurs dans les activités internationales nécessite une formation interdisciplinaire. «Le programme de maîtrise fait appel aux connaissances d’une quinzaine de disciplines, dont l’économie, l’histoire, le droit et la politique, précise le responsable. Quatre nouveaux cours interdisciplinaires ont d’ailleurs été créés pour ce programme et portent sur l’historique du système-monde, l’économie politique internationale, la gouvernance et la mondialisation, ainsi que la diversité culturelle en contexte de mondialisation.»

L’étudiant doit par ailleurs choisir un champ de spécialisation relevant de la politique, de l’économie, de la santé ou de la culture, de même qu’une aire géographique particulière.

ONU et gouvernement mondial

En tant que spécialiste des organisations internationales, Jean-Philippe Thérien accorde une bonne note à la plus importante de ces organisations, l’ONU. «Si elle n’existait pas, il faudrait l’inventer, affirme-t-il. Malgré toutes les critiques qu’on peut lui adresser, le fait d’avoir presque tous les États du monde réunis demeure un avantage. Mais l’ONU ne peut faire que ce que les États membres acceptent qu’elle fasse et il est dommage que son rôle soit marginalisé dans les conflits armés.»

À son avis, une conférence comme celle de Bonn sur l’Afghanistan n’aurait pas pu être supervisée par un acteur autre que l’ONU.

Le professeur ne voit par ailleurs pas comment on pourrait remplacer l’ONU par un gouvernement mondial. «Cela demeure une utopie, dit-il. Le maximum qu’on puisse espérer est une réforme des structures de prise de décision qui répartisse de façon plus équitable les pouvoirs entre les États membres et qui laisse plus de place à la société civile. Mais personne ne voit actuellement comment résoudre le problème du droit de veto.»

Quant à la mondialisation qui s’annonce à ses yeux irréversible, Jean-Philippe Thérien espère que le phénomène pourra se développer au profit de tous. Est-ce vraiment possible? «Les problèmes que cela soulève ne se régleront pas d’un coup de baguette magique, mais je préfère garder mon optimisme.»

Daniel Baril



 
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