Édition du 9 septembre 2002 / Volume 37, numéro 3
 
  Il pleut du sable sur les naines brunes
Des astronomes de l’UdeM ont détecté pour la première fois des variations de luminosité sur une naine brune froide.

 

De gauche à droite, l’étudiant au doctorat Étienne Artigau, qui est parvenu à observer pour la première fois des variations de luminosité sur une naine brune froide, et ses deux directeurs, René Doyon et Daniel Nadeau.
 

Les météorologues ont de la difficulté à prédire le temps qu’il fera demain, mais des astronomes ont réussi à établir qu’il pleut du sable et du fer sur une étoile de la constellation de la Vierge, située à 32 années-lumière de nous.

L’observation a été faite par Étienne Artigau, étudiant au doctorat au Département de physique, à l’aide du télescope du mont Mégantic et sous la direction des professeurs Daniel Nadeau et René Doyon. Ses résultats ont été présentés à la conférence de l’Union astronomique internationale, tenue à Hawaii en mai dernier.

Le phénomène, qualifié de tempête atmosphérique, est en fait une hypothèse formulée pour expliquer la variation de luminosité remarquée pour la première fois sur une étoile naine brune froide.

Les naines brunes sont des astres intermédiaires entre les planètes et les étoiles. Leur masse, de 10 à 30 fois celle de Jupiter, est insuffisante pour déclencher les réactions nucléaires responsables de la brillance des étoiles, mais elles émettent quand même une faible radiation observable surtout dans l’infrarouge. Elles sont considérées comme froides lorsque leur température est d’environ 1000 °C et chaudes à partir de 2000 °C.

En observant l’un de ces astres sur une période de plusieurs mois, les chercheurs ont enregistré des variations dans sa luminosité; ces variations seraient dues à des mouvements de nuages dans l’atmosphère de l’étoile — un peu comme l’ouragan géant à l’origine de la grande tache rouge sur Jupiter — qui produiraient de terrifiantes tempêtes de sable.

«Nous croyons que les nuages dans la haute atmosphère de l’étoile se condensent pour former des gouttes de fer ou de silicate, à la manière des gouttes d’eau dans notre atmosphère, explique Daniel Nadeau. Ces nuages ne forment pas une couche continue autour de l’étoile parce qu’une partie de la poussière serait déjà retombée à la surface, d’où les variations observées dans sa luminosité.»

 

Une représentation artistique d’une naine brune: l’inégalité de la couche nuageuse produirait les variations observées dans sa radiation.
 

Les astronomes connaissaient déjà l’existence des variations de luminosité sur les naines brunes chaudes, qu’ils expliquent par un phénomène semblable à celui des taches sombres à la surface du Soleil. Mais cette explication ne peut s’appliquer aux naines froides. En fait, Daniel Nadeau reconnaît qu’il faut poursuivre les recherches avant d’obtenir une explication satisfaisante du phénomène à la fois pour les naines froides et les naines chaudes.

Les variations de la naine brune en question ont depuis été confirmées par les observations d’une autre équipe d’astronomes à partir du télescope à infrarouge du mont Mauna Kea, à Hawaii. Ces observations de naines brunes se font à l’intérieur d’un vaste projet de collaboration internationale appelé CLOUDS (Continuous Longitude Observations of Ultra-cool Dwarfs) qui regroupe des chercheurs du Canada, de la France, de l’Espagne, de la Grande-Bretagne, de l’Inde et des États-Unis.

Pour les astronomes, la compréhension du phénomène des variations des naines brunes permettra d’en apprendre davantage sur la physique de ces astres et de définir avec plus de précision les propriétés des planètes géantes extrasolaires afin qu’on réussisse à les observer directement.

Daniel Baril





 
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