Édition du 4 novembre 2002 / volume 37, numéro 10
 
  Vélo extrême pour étudiants qui ont faim
Mathieu Fleury a traversé le Canada pour une noble cause.

 

De Vancouver à Montréal en 25 jours, c’est ce qu’on peut appeler du vélo extrême: 5000 km de montagnes, de plaines et de routes rurales interminables. Mathieu Fleury, un étudiant de HEC Montréal, a effectué ce trajet hallucinant, allant jusqu’à pédaler 300 km en une seule journée. Les Prairies, il les a franchies en 6 jours.

Le plus drôle, c’est que le jeune homme de 24 ans se défend d’être un «fou du vélo». «Avant l’été 2001, je n’avais jamais franchi de longues distances sur deux roues», raconte-t-il en riant. Cet été-là, il a roulé de Montréal jusqu’à Halifax presque sans s’arrêter. Il s’est rendu compte qu’il ne voulait pas en rester là. «Je voyais plus grand, plus gros, plus colossal, relate-t-il. C’est comme ça que mon projet de traverser le Canada a pris naissance.»

En juillet 2002, muni d’un aller simple pour Vancouver, il observe les Rocheuses par le hublot de l’avion. C’est haut, c’est vaste… Le vélo est dans la soute à bagages, plus question de reculer.

Au début de son périple, il souffre, il manque d’eau et il s’égare. S’il ne s’était pas arrêté, c’est en Alaska qu’il aurait abouti. «C’est la seule fois où j’ai pensé abandonner, se souvient-il. Je n’ai pas paniqué, j’ai retrouvé mes esprits. Puis j’ai vraiment apprécié l’Ouest canadien.»

Filant à une moyenne de 200 km par jour (il ne descendait de vélo souvent qu’à la nuit noire), Mathieu Fleury franchit la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, l’Alberta, le Manitoba, l’Ontario et l’ouest du Québec avant de rentrer chez lui, à Sainte-Thérèse. Au cours de son voyage, il s’est autorisé 10 jours de congé pour «ne pas forcer la machine»…

Une campagne de financement

Avant son départ, l’étudiant décide de joindre l’utile à l’agréable en lançant une campagne de financement au profit d’un organisme à but non lucratif. Il veut financer son voyage tout en donnant à son exploit un volet humanitaire. Le projet Horizon 2000 est monté avec la collaboration de quelques personnes, dont sa sœur Karine et son copain Sébastien Lépine, qui lui apportent un soutien précieux, et la sollicitation commence. Au début, ça ne roule pas fort. «Je me suis rendu compte que les budgets de donation des grandes compagnies étaient bien arrêtés. Chaque entreprise a sa cause et il n’est pas facile de la convaincre de verser quelques dollars dans un nouveau projet.»

Lorsque vient le temps de choisir un organisme, il entend parler du Service d’action humanitaire et communautaire (SAHC) de l’Université de Montréal. Il se rend dans les locaux du Service et est particulièrement impressionné par le dépannage alimentaire. «Le personnel et les bénévoles m’ont semblé très dévoués. C’est un organisme de petite taille, près des besoins des étudiants. C’était ce que je cherchais.»

Durant la sollicitation, Mathieu Fleury frappe à toutes les portes et ne se décourage pas. Irrité par le refus net du propriétaire de son garage de contribuer à sa campagne, il s’émeut de recevoir 50 $ de la poche de son mécanicien. De fil en aiguille, il parvient à amasser la somme respectable de 4000 $, dont la moitié provient de particuliers.

Président d’honneur

C’est 80 % de cet argent, donc plus de 3200 $, que Mathieu Fleury remet au SAHC. Pour marquer sa reconnaissance, le Service l’a nommé président d’honneur de la Semaine de la solidarité, qui aura lieu du 11 au 15 novembre. Le cyclotouriste présentera une conférence sur son périple le 13 novembre à 11 h 30 au local B-3250 du Pavillon 3200 Jean-Brillant. Plusieurs activités seront organisées à l’occasion de cette semaine. Il y aura notamment une collecte de vélos usagés destinés aux pays en développement (voir l’encadré).

Pour Mathieu Fleury, cet honneur est comme du vent dans les feuilles. «Je m’estime heureux de vivre en santé et de ne manquer de rien. Quand j’ai entendu parler d’étudiants qui avaient de la difficulté à se nourrir et à nourrir leurs enfants, je me suis dit qu’il fallait faire quelque chose.»

Un tel athlète pourrait aspirer à la compétition, mais il affirme ne pas désirer la gloire (ou la fortune) que cela pourrait lui rapporter. Alors qu’est-ce qui le fait courir? «C’est une question assez complexe», reconnaît le jeune homme, qui rêve maintenant de faire le tour du monde à vélo. Il parle de dépassement personnel, de simplicité volontaire, d’envie de découvrir… Par comparaison, la vie d’athlète d’élite signifie privations, contraintes, rage de vaincre. Très peu pour Mathieu Fleury.

Mathieu-Robert Sauvé


Apportez votre vélo…
«Dans certains pays du tiers-monde, un vélo peut faire la différence entre la pauvreté et la prospérité», explique Jean-Philippe Fortin, porte-parole de la Semaine de la solidarité, qui organise notamment une collecte de vélos usagers destinés aux populations pauvres.
Cyclo Nord-Sud, un organisme communautaire de Montréal, sera à l’Université la semaine prochaine afin d’amasser le plus de vélos usagers possible dans le but de leur donner une nouvelle vie. En 2002, l’organisme a récolté quelque 3000 vélos qui ont été acheminés au Guatemala, au Nicaragua, à Cuba et en Afrique du Sud. «Dans les pays en développement, le vélo sert à tout, sauf à la balade, explique la coordonnatrice, Claire Morissette. Des études ont révélé qu’au Mexique certains travailleurs triplaient leurs revenus lorsqu’ils possédaient un vélo.»
Les membres de la communauté universitaire sont invités à participer à la collecte de Cyclo Nord-Sud. Une contribution de 10 $ est demandée au donateur de façon à payer une partie des frais de transport. Mais le donateur n’est pas perdant puisqu’il recevra un reçu fiscal équivalant à cette somme et à la valeur du vélo, déterminée par un évaluateur.
Il se vend 65 000 vélos chaque année au Québec. Ceux-ci servent en moyenne cinq ans et demi, après quoi ils s’empoussièrent dans les remises et les sous-sols. «Un vélo, ça peut durer 25 ans!» lance Mme Morissette.

M.-R.S.



 
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