Édition du 20 janvier 2003 / volume 37, numéro 17
 
  Du bon usage des verres de contact
Pour épargner quelques dollars, les utilisateurs de lentilles cornéennes risquent leur vision.

Un mauvais usage des verres de contact peut déclencher une réaction allergique qui se manifestera par des rougeurs aux yeux, une vue embrouillée et des infections susceptibles d’affecter la santé oculaire. Le risque diminue lorsque les utilisateurs de lentilles cornéennes respectent le délai de port établi par le fabricant.

C’est ce qui ressort d’une étude clinique menée par Langis Michaud et Claude Giasson, tous deux professeurs à l’École d’optométrie. Les chercheurs mettent le public en garde contre le port prolongé de verres de contact. En effet, plusieurs porteurs de lentilles cornéennes les gardent au-delà de la période prescrite.

«Cette mauvaise habitude favorise l’accumulation de dépôts protéiques à la surface de la lentille, affirme M. Michaud. Ces dépôts créent une détérioration de la surface qui réduit non seulement le confort, mais aussi l’acuité visuelle et la sensibilité aux contrastes. Certains types de particules composées principalement de phosphate de calcium empêchent même l’oxygène de bien pénétrer à travers la lentille.»

La cornée a un besoin permanent d’oxygène, ajoute M. Giasson. Les polymères utilisés pour fabriquer les lentilles cornéennes peuvent l’asphyxier, surtout si elles sont portées durant le sommeil. «L’oxygène dissous dans les larmes est trois fois moindre lorsque les paupières sont fermées, précise-t-il. Quand les lentilles présentent des résidus à leur surface, l’oxygénation est diminuée d’autant. Or, lorsque la cornée ne reçoit pas assez d’oxygène, des vaisseaux l’envahissent, ce qui à terme gênera la vision. C’est ce qu’on appelle une néovascularisation.»

Mais ce n’est pas le seul danger: des bactéries pourraient aussi infecter la cornée. La contamination se produit quand l’utilisateur ne nettoie pas bien ses verres de contact, ne se lave pas les mains avant de les manipuler ou les porte trop longtemps.

Le port des lentilles au-delà de la période prescrite, préviennent les chercheurs, entraîne parfois une lésion de l’épithélium, le tissu constitué de cellules juxtaposées sur la cornée. Cette mauvaise habitude encourage donc la contamination microbienne. Dans les cas extrêmes, il peut y avoir ulcération de la cornée. Un tel abcès menace la vision s’il n’est pas soigné à temps.

Méthodologie et résultats

La recherche de Langis Michaud et Claude Giasson visait à étudier les conséquences du non-respect de la durée de port recommandée par un fabricant américain de lentilles cornéennes. Ils ont quantifié l’évolution des dépôts protéiques sur deux types de lentilles, les unes jetables après une journée de port et les autres à remplacement fréquent. Parallèlement, les chercheurs ont observé l’évolution des signes cliniques lorsque la lentille était portée selon le délai prescrit et selon des périodes excédant cette recommandation.

Tous les sujets, 12 femmes et 8 hommes âgés en moyenne d’une trentaine d’années, ont porté un seul type de lentilles à la fois. Ils ont été examinés à intervalles réguliers pendant quatre mois. Les dépôts protéiques ont été recueillis de la surface des lentilles à divers moments du port et des analyses ont été effectuées en laboratoire pour vérifier s’il existait un lien entre le nombre de protéines et l’augmentation des signes cliniques négatifs.

 

Langis Michaud 

Les résultats, publiés à l’automne 2002 dans la revue Optometry and Vision Science, révèlent que les dépôts protéiques peuvent induire des effets néfastes à la santé oculaire: rougeurs aux yeux, conjonctivites et inflammations de la cornée (kératites). Les résidus contribuent aussi à réduire l’acuité visuelle (voir l’encadré ci-dessus).

Les chercheurs soulignent que ces complications surviennent avec toutes les autres marques, quelle que soit la sorte de verres de contact: souples, rigides, à port prolongé ou quotidien. Ne pas respecter le délai établi par le fabricant est dangereux.

 
Faut y voir!

Plus de 35 millions de Nord-Américains portent des verres de contact. La moitié d’entre eux ont des lentilles à remplacement fréquent. «Ce produit a justement été commercialisé pour minimiser les effets négatifs liés à l’accumulation des résidus sur la lentille, souligne Langis Michaud. Mais pour économiser, les gens ont tendance à porter leurs verres de contact au-delà de la période recommandée.»

 

Claude Giasson
 

D’autres, par contre, n’enlèvent pas leurs lentilles pour dormir. Enfin, environ 20 % des porteurs de lentilles cornéennes ne se lavent jamais les mains avant de les manier. Plusieurs micro-organismes voyagent ainsi jusqu’aux yeux. «Ces bactéries proviennent de la bouche, du nez, des oreilles, des organes génitaux, de l’anus, de la peau, des plantes domestiques ou d’objets inanimés qui ont été manipulés par le porteur», écrivent les chercheurs dans leur article.

Ils rappellent que les verres de contact, comme les yeux, sont très fragiles. «Il faut s’assurer de les garder propres et de les manipuler avec soin.»

Dominique Nancy



Pleurer pour mieux voir

La plupart des gens trouvent les lentilles cornéennes plus confortables et plus esthétiques que les lunettes. Mais porter des verres de contact comporte un risque. C’est pourquoi le suivi par un optométriste ou un ophtalmologiste est nécessaire.
«La lentille modifie le film lacrymal et perturbe la couche lipidique en modifiant le rythme et l’ampleur du clignement ainsi que l’apposition des paupières sur le globe», peut-on lire dans un article publié récemment par deux professeurs de l’École d’optométrie, Langis Michaud et Claude Giasson.
Composées de lipides, d’eau et de mucine, les larmes empêchent les yeux de se dessécher. Elles contiennent des substances qui détruisent les microbes. En outre, elles chassent par écoulement les corps étrangers, poussières et débris qui ont pénétré dans l’œil.
Mais chaque œil est différent et peut changer, influencé par des facteurs comme les hormones, la prise de médicaments, la sécheresse de l’environnement de travail, l’âge…
Les porteurs de lentilles ont de quoi pleurer. Leur film lacrymal tend à s’assécher. Cet assèchement entraîne l’accumulation de dépôts et des distorsions à la surface des lentilles cornéennes. Or, une surface asséchée ne peut plus assurer une qualité optique optimale.

D.N.




 
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