Édition du 17 février 2003 / volume 37, numéro 21
 
  Maîtrise internationale en évaluation des technologies de la santé
La demande pour des spécialistes en ETS est de plus en plus forte.

 

Pascale Lehoux est responsable du programme de maîtrise internationale en évaluation des technologies de la santé et gestion du Département d’administration de la santé. 

Il y a quelques semaines, l’émission Enjeux, à Radio-Canada, présentait un reportage sur le dispositif pour assistance ventriculaire gauche (DAVG). Ce type de cœur mécanique permet à des patients en attente d’une greffe de continuer leurs activités.

D’autres peuvent, grâce au DAVG, ajouter quelques années à une vie déjà bien remplie. Ce dispositif, alimenté par une pile, permet à celui qui le porte d’être autonome et de mener une vie aussi normale que possible. Sauf qu’il coûte plusieurs centaines de milliers de dollars.

Le reportage se terminait sur cette question troublante: avons-nous les moyens, comme société, de l’offrir à tous ceux qui en feront la demande? Récemment encore, on apprenait que des hôpitaux de la Rive-Sud appliquaient un moratoire sur les opérations de remplacement de la hanche et du genou afin d’équilibrer leur budget.

Ce sont là le genre de questions qui intéressent non seulement le commun des mortels mais aussi les spécialistes en évaluation des technologies de la santé (ETS) comme Pascale Lehoux, professeure au Département d’administration de la santé (DASUM). Mme Lehoux est responsable du programme de maîtrise internationale en évaluation et gestion des technologies de la santé.

Choix éclairés

«Les ressources étant limitées, il faut faire des choix en tenant compte de données scientifiques sur l’efficacité et l’innocuité, observe Pascale Lehoux. On voit avec le DAVG à quel point le problème est majeur. Tout en considérant l’amélioration de la qualité de vie, il faut évaluer l’effet d’un accès généralisé sur les ressources disponibles.» Pour elle, le moratoire sur les chirurgies de la hanche et du genou est un exemple patent d’une décision fondée strictement sur des considérations budgétaires, «ce qu’on cherche justement à éviter en ETS».

Champ de recherche appliqué, interdisciplinaire et orienté vers la formulation de politiques, «l’ETS examine les dimensions cliniques, économiques, éthiques, légales et sociales de l’utilisation des innovations technologiques et des nouvelles manières de produire des soins, note-t-on dans le dépliant du programme. L’ETS permet de mieux comprendre l’impact des innovations sur les systèmes de soins et de prendre les bonnes décisions au bon moment.»

L’ETS s’intéresse aussi bien au dépistage et à la prévention qu’à l’achat d’équipements ou d’instruments très coûteux comme le DAVG ou les appareils d’imagerie médicale. Bien que moins spectaculaires a priori, les mesures de dépistage généralisé — comme les mammographies annuelle ou bisannuelle pour toutes les femmes de 50 ans et plus dans le cas du cancer du sein — peuvent se solder par des coûts prohibitifs étant donné le nombre de personnes appelées à en bénéficier.

De même, dans le cas du cancer de la prostate se pose la question de quand et comment intervenir compte tenu des effets possibles de la chirurgie (impotence et incontinence), alors que ce cancer à développement lent et tardif emporte rarement sa victime. L’ETS s’intéresse également au dépistage prénatal, «qui aura un impact évident sur le plan social», souligne Mme Lehoux.

Besoins criants

Bref, non seulement les spécialistes en ETS qui ont commencé à voir le jour au cours des deux dernières décennies ne risquent pas de se retrouver au chômage, mais au contraire les besoins sont criants des deux côtés de l’Atlantique. Et ils le seront encore pour un bon moment, à la fois pour ceux qui peuvent faire ces évaluations que pour ceux qui les utilisent dans le contexte d’une pratique clinique ou de décisions administratives.

C’est pourquoi le cours mis au point par le DASUM vise ces deux clientèles et s’adresse à des personnes aux profils très variés (médecins, administrateurs, épidémiologistes, infirmières, ingénieurs du domaine biomédical, politologues, éthiciens, etc.) qui occupent déjà ou occuperont des postes de fonctionnaires ou de chercheurs et de cadres en milieu hospitalier universitaire.

Au Québec, depuis quelques années, les centres hospitaliers universitaires ont d’ailleurs pour mission explicite de développer l’évaluation des technologies de la santé. «Nous avons justement conçu le programme dans l’esprit d’une formation spécialisée pour des personnes en milieu clinique ou des administrateurs qui ont déjà une expérience dont on peut tirer profit», précise Pascale Lehoux.

Leadership canadien

On a commencé à parler d’évaluation des technologies de la santé il y a 15 à 20 ans, dans la foulée des protestations contre l’utilisation généralisée des pesticides en agriculture, de l’énergie nucléaire et de médicaments dont on commençait à constater les effets secondaires, estime la professeure.

Le Canada possède cinq agences qui ont pour mission d’évaluer les technologies de la santé, dont une au Québec, l’Agence d’évaluation des technologies et des moyens d’intervention en santé. Dans les congrès internationaux auxquels elle a participé, Mme Lehoux a constaté que le Canada est perçu comme un leader en la matière, aux côtés de la Hollande, de la Suède et du Danemark.

La maîtrise du DASUM est également internationale puisqu’elle s’appuie sur un consortium d’organismes canadiens, italiens et espagnols. Elle a été élaborée dans le cadre d’un programme visant à accroître la mobilité des étudiants entre la Communauté européenne et le Canada. Les cours se donnent en anglais, selon un format intensif de quatre modules d’une durée de deux semaines offerts à Montréal, Barcelone, Rome et Ottawa, sur une période de 20 mois. Les étudiants ont le choix d’effectuer un stage ou un travail dirigé ou encore de rédiger un mémoire.

Le Département accueillera bientôt sa deuxième cohorte d’étudiants dans ce programme. Les personnes intéressées ont jusqu’au 1er avril pour s’y inscrire.

Françoise Lachance




 
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