Édition du 10 mars 2003
 
  Les adolescents et les dents: l'apparence d'abord!
Trois adolescents sur quatre ont au moins une carie.

Pour les adolescents québécois, avoir des caries n'est pas dramatique dans la mesure où elles n'altèrent pas la beauté de leur dentition. C'est ce qui ressort d'une étude de Mike Benigeri, chercheur au Groupe de recherche interdisciplinaire en santé, réalisée auprès de jeunes de 13 et de 14 ans.

«Les adolescents reconnaissent que le brossage des dents peut leur éviter des caries, mais ils ignorent tout des autres méthodes de prévention, précise M. Benigeri. Ils savent que les bonbons sont mauvais pour leurs dents, mais ils ne se rendent pas compte que les boissons gazeuses sont tout aussi néfastes. Et ils croient qu'aller chez le dentiste pour un examen annuel ou s'y faire nettoyer les dents prévient les caries. Ce qui n'est pas le cas.»

Aucune étude n'avait sondé les adolescents sur le sujet avant que M. Benigeri mène cette recherche pour les besoins d'une enquête de Jean-Marc Brodeur, professeur au Département de médecine préventive. Plus de 1000 adolescents ont répondu au questionnaire du chercheur. Même si les adolescents du Québec ont aujourd'hui 69 % moins de caries dentaires qu'il y a 30 ans, il reste du chemin à faire, car à 14 ans trois jeunes sur quatre ont au moins une carie. Comment changer leurs habitudes? Sont-ils conscients de l'état de santé de leurs dents?

Sois beau et souris!
Les adolescents établissent une distinction entre «belles dents» et «bonnes dents». Il est plus important pour eux d'avoir des dents blanches que des dents en bonne santé. C'est crucial pour leur estime de soi. Autrement dit, avoir des caries n'est pas dramatique si on ne les voit pas... Ce souci esthétique a l'avantage de permettre à un nombre grandissant de jeunes de porter un appareil orthodontique sans avoir à subir les moqueries de leurs camarades.

«Aujourd'hui, les gens qui ont des dents de travers vont se les faire arranger pour l'apparence», signale Mike Benigeri. À cet égard, les jeunes ne se distinguent pas des adultes, qui sont de plus en plus nombreux à envahir les cabinets de dentistes pour se faire blanchir ou redresser les dents et même s'y faire poser des bijoux!

Autre surprise: de façon générale, les adolescents - souvent les mieux nantis - n'ont pas peur du dentiste. «Certains accordent même une trop grande confiance au dentiste, s'en remettant à lui pour qu'il s'occupe de tout. Ils se disent que la visite chez le dentiste va compenser leur mauvaise hygiène dentaire. En réalité, mieux vaut aller moins souvent chez le dentiste, mais mieux se brosser les dents.»

Cependant, 3 jeunes sur 10 demeurent anxieux devant le fauteuil du dentiste. Et ce sont justement ceux qui ont le plus de caries (jusqu'à deux fois plus). Extractions et obturations n'adoucissent en rien leur mauvaise opinion du dentiste! Comme ces adolescents proviennent souvent de familles pauvres, les dentistes n'ont pas tendance à leur proposer des méthodes de prévention - les scellants dentaires, par exemple -, que les parents refusent de toute façon puisqu'ils n'ont pas les moyens de se les payer. Comparables à un vernis de plastique et appliqués généralement sur les molaires permanentes fraîchement apparues, les scellants recouvrent les sillons dentaires où se forment 90 % des caries. Ils peuvent tenir de trois à cinq ans, parfois plus, ce qui laisse le temps à l'émail de se solidifier et de mieux résister à la carie.

Selon le chercheur, les tournées dans les écoles pour sensibiliser les jeunes à la nécessité de se brosser les dents sont dépassées. «Si l'on veut que les enfants aient leur santé dentaire à cœur, il faudra faire entrer les scellants dans la culture générale, au même titre que les visites annuelles chez le dentiste», conclut-il.

Des jeunes honnêtes
Contrairement aux adultes qui trichent un peu (ou beaucoup!), les adolescents font preuve d'une grande honnêteté quant à la qualité de leurs dents. Ils ne cherchent pas à minimiser le nombre d'obturations et M. Benigeri s'en réjouit: «Pour dépister des jeunes à risque, on n'aura pas besoin de faire appel à un dentiste pour vérifier l'état de leurs dents. On pourra simplement se fier à leur parole.»

L'étude a également montré que les adolescents, toutes classes sociales confondues, partagent les mêmes valeurs et les mêmes connaissances. Même s'ils vivent dans des milieux culturellement ou socialement différents, tous connaissent à peu près également l'importance du brossage des dents et des visites chez le dentiste.

Annie Cloutier
Collaboration spéciale



 
Archives | Communiqués | Pour nous joindre | Calendrier des événements
Université de Montréal, Direction des communications et du recrutement