Édition du 13 mars 2003
 
  La Société de la parlotte
Barbara Thériault veut implanter la tradition des débats contradictoires à l'Université de Montréal.

«Les manifestations sont des moyens de pression extrêmement efficaces pour une population qui veut influer sur les actions de ses dirigeants. C'est l'exercice de la démocratie à son meilleur. Prenons l'exemple de Tony Blair: depuis les manifestations du 15 février, il est contesté non seulement par la population britannique mais aussi à l'intérieur même de son parti.

- Mais, monsieur le président, ces manifestations ne vont pas empêcher la guerre en Irak.

- On ne sait pas encore s'il y aura la guerre.

- Monsieur le président, je suis sidérée tant par la question - les manifestations constituent-elles un moyen de pression efficace? - que par la réaction du premier ministre Landry. Dans ce genre de manifestations, les participants ne constituent qu'une masse informe aux motivations plutôt festives. C'est bien connu, les Québécois aiment se regrouper et célébrer. Ils descendent donc dans la rue pour fêter comme ils vont au festival de jazz ou aux fêtes de la Nouvelle-France. On veut nous faire croire qu'ils manifestent parce qu'ils ont une identité qui a beaucoup de cohésion. Et puis, certains ne font même pas la différence entre l'OTAN et l'ONU.

- Mais dans la rue, il n'y avait pas que des Québécois dits de souche. Toutes les communautés culturelles étaient représentées. La partie adverse, monsieur le président, confond une manifestation pour la paix avec des activités comme le festival de Saint-Tite ou le Festival du cochon...
(Drelin, drelin, drelin...)

- Veuillez conclure, le temps dont vous disposiez est écoulé!»

Pas très sérieux, cette discussion? Peut-être! Mais l'idée est justement de ne pas se prendre au sérieux et d'apprendre à développer des arguments dans un débat contradictoire, explique Barbara Thériault, professeure au Département de sociologie.

S'inspirant de la tradition britannique de la joute oratoire («debating»), elle a eu l'idée de cette activité ainsi nommée la Société de la parlotte, traduction libre de «debating society». Difficile de ne pas y voir également un clin d'œil au film La société des poètes disparus, où un professeur incarné par Robin Williams incite ses étudiants à se dépasser.

Néanmoins, ce qui importe, c'est de discuter dans les règles de l'art, avec une loyauté on ne peut plus britannique, en s'adressant au président d'assemblée et non à la partie adverse. Ce dernier a tous les pouvoirs pour encadrer le déroulement du débat et assurer le maintien du décorum. Il est assisté d'un secrétaire qui surveille le temps alloué à chaque partie, c'est-à-dire les pros et les contras.

Le président et le secrétaire sont élus au début de chaque séance. Un maximum de dix debaters sont également désignés, leur position de pro ou de contra étant déterminée par le hasard. Sont conviés à ces débats, qui durent une heure et se tiennent à l'heure du lunch, aussi bien les employés et les étudiants que les professeurs, peu importe la discipline.

Françoise Lachance



 
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