Édition du 8 septembre 2003 / volume 38, numéro 3
 
  À la défense de l’hétérosexuel moyen!
Le psychologue Michel Grisé lance un cercle de discussion «réservé aux gars».

Michel Grisé

Michel Grisé fulmine lorsqu’il voit l’annonce télévisée de cette femme qui accouche en compagnie d’un inconnu. En plein travail, la parturiente apprend que son conjoint est parti s’acheter une voiture pour profiter de la superpromotion de Chevrolet-Buick. « Quelle image cette publicité présente-t-elle des hommes ? demande Michel Grisé. Sommes-nous tous donc irresponsables, égoïstes et matérialistes ? Triste modèle pour nos jeunes hommes ! »

Ce n’est pas la première fois que le psychologue, qui travaille depuis 1996 au Service d’orientation et de consultation psychologique (SOCP), tempête devant l’image publique du mâle québécois moyen. « Quand on a besoin d’un idiot dans un téléroman, on prend toujours un hétérosexuel blanc de 30 ou 40 ans. Et la publicité présente des femmes heureuses, épanouies, tandis que les hommes sont à l’ombre, repliés sur eux-mêmes. Plus personne ne s’en étonne. »

Cet automne, Michel Grisé a décidé de faire sa part pour aider les hommes à sortir de leur mutisme et de leur isolement. « Les filles n’ont aucun mal à discuter entre elles de ce qu’elles vivent avec nous, explique-t-il dans le guide Le Fureteur, où la série Réservé aux gars est annoncée. C’est à notre tour de parler et de constater que nous ne sommes pas les seuls à vivre des questionnements quant à nos relations amoureuses.»

Six rencontres aux titres accrocheurs («Chéri, y faut qu’on se parle», «Non, chéri, pas ce soir», «Chéri, séduis-moi!», etc.) sont au programme. Ces soirées gratuites pour les étudiants mais ouvertes à tous (hétérosexuels) se veulent ouvertes et sans censure. «Moi, j’agirai à titre d’animateur pour relancer les discussions ou proposer de nouvelles réflexions sur le thème choisi. Je serai une sorte de Jeannette Bertrand ou de Claire Lamarche pour hommes», affirme en souriant le psychologue.

Je m’exprime, donc je suis

Âgé de 37 ans, Michel Grisé est marié depuis 12 ans et a trois enfants. Il n’est pas gêné de dire qu’il vit des hauts et des bas dans sa relation de couple. «Je suis comme les autres, parfois je trouve que les femmes sont compliquées. Et j’ai des réactions typiques de gars : j’ai tendance à m’isoler quand je suis préoccupé par exemple. Mais je crois aux vertus du dialogue. Il faut qu’on puisse se parler pour se comprendre.»

Avec quatre autres couples, Michel et sa femme ont pris l’habitude de se réunir chaque mois pour discuter de petits et de gros soucis de la vie quotidienne. Ils font garder les enfants et passent la soirée ensemble. Ce type de rencontre, inspiré des activités des groupes religieux américains mais complètement «laïcisé» ici, permet de constater que tous les couples traversent des crises et vivent des essoufflements. Le simple fait d’échanger quelques confidences suffit parfois à trouver une solution. «Autrefois, les couples se séparaient à la mort d’un des époux. Aujourd’hui, les couples se séparent à la mort de l’amour. Lorsque des enfants sont là, ce n’est pas toujours la meilleure solution.»

C’est presque un cliché de dire que les hommes vivent une période difficile. Après avoir longtemps occupé un rôle bien défini de pourvoyeurs au sein de la famille, ils ont vu les femmes prendre de plus en plus de place sur le marché du travail. Dans la sphère domestique, ce changement entraîne des répercussions. Les garçons sont aujourd’hui beaucoup plus nombreux à abandonner leurs études, ce qui fait qu’on retrouve 6 filles sur 10 étudiants à l’université.

Urgence hommes

C’est au SOCP que Michel Grisé a suivi son stage à la fin de ses études, un stage obligatoire pour exercer la profession de psychologue. Tout en ouvrant un cabinet de consultation près de chez lui, à Chambly, sur la rive sud de Montréal, il n’a jamais cessé sa collaboration avec le Service. Il a notamment animé des ateliers sur le leadership étudiant, l’affirmation de soi et la prévention du suicide. La condition masculine l’intéressait personnellement depuis longtemps, mais c’est une préoccupation de l’équipe qui a été le point de départ de la série Réservé aux gars. «Nous avons constaté il y a longtemps l’absence des hommes aux ateliers sur le développement personnel. On en comptait 1 ou 2 pour 10 femmes. Cette absence nous a inquiétés. Il fallait trouver un moyen de faire jaser les gars.»

L’an dernier, Michel Grisé a organisé deux conférences sur les relations des hommes avec les femmes. Elles ont attiré une douzaine de participants et l’expérience a été suffisamment prometteuse pour être renouvelée. Les 5 et 12 novembre prochain, dans l’atelier «Pas facile d’être un bon chum», on se demandera ce qui ne fonctionne pas dans le couple québécois, ce que signifie le silence des hommes. Une partie des rencontres (d’une durée de cinq heures) sera consacrée à l’échange, mais il s’agira cette fois d’une conférence où Michel Grisé présentera le fruit de ses travaux et de son expérience sur le sujet.

Les femmes n’y seront pas admises, mais elles seront bien présentes… dans les discussions.

Mathieu-Robert Sauvé

Soirées de discussion Réservé aux gars : à partir du 1er octobre (inscription obligatoire avant le 25 septembre). Atelier «Pas facile d’être un bon chum!» : les 5 et 12 novembre. Information : (514) 343-6853.



 
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