Édition du 15 septembre 2003 / volume 38, numéro 4
 
  Grincer des dents la nuit: une maladie qu’on veut guérir
Le cerveau ne dort jamais.

Gilles Lavigne

Il déclenche par exemple toute la nuit le réflexe de déglutition. Mais chez certaines personnes, de bruyants grincements de dents précèdent ce réflexe, et ce, jusqu’à 15 fois par heure! Le bruxisme touche 8 % des gens âgés de 11 à 59 ans. Ces grincements à répétition entraînent la détérioration des dents, des douleurs aux mâchoires et des maux de tête. Sans parler de l’inconfort pour le partenaire d’oreiller.

Autrefois, on croyait que l’enfant qui grinçait des dents la nuit avait des vers... La médecine a réfuté cette croyance et expliqué le bruxisme par un mauvais contact entre les dents. On a ensuite dit que cette habitude involontaire était liée au stress et à l’anxiété. Gilles Lavigne, chercheur aux facultés de médecine dentaire et de médecine, explique que «le développement de la neurobiologie a permis de mieux comprendre la structure du sommeil chez le bruxeur et de définir clairement le bruxisme parmi d’autres phénomènes cycliques propres au sommeil». Le chercheur et son équipe de l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal sont d’ailleurs reconnus pour avoir établi les critères internationaux qui permettent de reconnaître le bruxisme nocturne.

«On trouve dans le cerveau une région appelée le centre de genèse des mouvements, qui synchronise plusieurs activités rythmiques comme la marche, le rythme cardiaque, la respiration, la mastication, la déglutition, etc. Chez la personne atteinte de bruxisme, le centre semble envoyer des signaux désynchronisés aux mâchoires, ce qui cause des frottements violents entre les dents. C’est comme si le cerveau activait le centre, mais sans raison apparente», explique M. Lavigne, qui s’intéresse principalement au phénomène chez les bruxeurs primaires, c’est-à-dire ceux qui ne souffrent ni de maladies ni de troubles neurologiques et qui ne prennent pas de médicaments.

Est-ce que le centre de genèse déclenche une réponse excessive lorsque la bouche et l’œsophage ne sont pas suffisamment lubrifiés ou que les voies respiratoires sont partiellement obstruées? C’est la piste que suivent actuellement le chercheur et son équipe. Et elle pourrait mener à la mise au point de médicaments pour aider les bruxeurs secondaires, aux prises avec des mouvements involontaires, des spasmes qui touchent le visage, le cou et les membres.

En réponse à une question fréquente sur la complexité de l’étude du sommeil, le chercheur précise: «Le bruxisme est complexe à étudier. Il faut commencer par trouver des sujets prêts à passer quelques nuits au laboratoire, ce qui n’est pas facile. Le processus est aussi très long, car il faut ensuite habituer les sujets à dormir sous surveillance vidéo, branchés par de nombreux fils à des polygraphes. Finalement, une nuit d’enregistrement demande de quatre à sept jours d’analyse.»

Charles Désy

Collaboration spéciale



 
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