Édition du 20 octobre 2003 / volume 38, numéro 8
 
  Le Dr Jean Rouleau : un médecin avant tout
Le nouveau doyen de Médecine a gardé son stéthoscope.

Le Dr Jean Rouleau

«Le doyen s’excuse de ne pouvoir vous recevoir. Il a dû accompagner d’urgence une personne à l’hôpital.»

À Forum, on nous avait informé que le nouveau doyen de la Faculté de médecine, Jean Rouleau, était un travailleur infatigable et un cardiologue réputé – il a signé plus de 250 articles scientifiques –, mais nous ignorions jusque-là qu’il était de plus clinicien d’urgence… et ambulancier. Le matin de notre rencontre, il avait fait annuler à la dernière minute tous ses rendez-vous, préférant accompagner personnellement un collègue à l’hôpital. Dans la salle à côté de son bureau, un homme avait eu une faiblesse cardiaque durant une réunion matinale et l’on avait appelé le doyen à la rescousse. «Le patient va bien, il a subi avec succès une intervention et il peut maintenant courir le marathon s’il le désire», nous a rassuré le médecin au cours de l’entrevue qui a eu lieu quelques jours plus tard. Nous n’en saurons pas plus: secret professionnel.

Pour Jean Rouleau, le décanat de la Faculté de médecine marque à la fois un nouveau départ et un retour dans un environnement connu. Originaire de Vanier, près d’Ottawa, ce Franco-Ontarien attaché à sa langue et à sa culture a travaillé dans plusieurs hôpitaux universitaires avant de devenir, en 1999, directeur du service de cardiologie du centre hospitalier universitaire de Toronto, qui compte quatre hôpitaux majeurs (General, Eastern, Princess Margaret et Mount Sinai). «C’est un des plus éminents cardiologues du Canada, dit de lui Robert Lacroix, qui se félicite de le compter dans son équipe. Il a été nommé pour mettre en place la plus grande faculté de médecine du pays et l’une des meilleures de l’Amérique du Nord. Il y arrivera, j’en suis sûr.»

Au printemps 2003, le nouveau doyen de la Faculté de médecine a quitté sans amertume la Ville reine, où il vivait depuis quatre ans avec sa famille, mais il a fait ajouter à son contrat de travail une clause étonnante: le droit de pratiquer la médecine un mois par année. «J’adore mon travail de médecin. Pour moi, c’est très clair que je suis d’abord docteur. Si mon travail d’administrateur m’amène à renoncer à ma pratique clinique, j’abandonne l’administration.»

Passant de la parole aux actes, il a consacré ses sept jours de vacances à… l’hôpital de Saint-Georges de Beauce. En plein mois d’août, il s’est ainsi rendu à l’urgence d’un centre régional censé faire fuir les médecins. «C’était super!» dit-il.

Docteur Rouleau

Le Dr Rouleau ne garde pas le souvenir de brillantes années d’études. «À l’université, mes études ne me passionnaient pas, commente-t-il. Ce n’est qu’au moment de ma résidence en cardiologie que j’ai pris conscience de l’immense responsabilité de ma profession. Depuis, elle n’a jamais cessé de m’intéresser.»

C’est lorsqu’il a été mis en face de patients en chair et en os qu’il a véritablement compris que ce métier était fait pour lui. Le fait d’apercevoir l’inscription «Docteur Rouleau» sur son sarrau lui a notamment causé un choc. De sa spécialité, il aime l’aspect impérieux, où chaque seconde compte. «En cardiologie, les problèmes sont urgents 24 heures sur 24, dit-il. Je suis encore excité à l’idée de me rendre à deux heures du matin voir un patient aux soins intensifs.»

Chaque patient a son histoire, et le médecin a pour responsabilité de la saisir rapidement lorsqu’il est confronté à des problèmes médicaux. Le cardiologue n’est jamais loin du bon docteur Roger Rouleau, son père, qui soignait gratuitement les démunis des quartiers francophones de l’Outaouais.

«L’université qui m’a donné ma chance»

Au cours de ses séjours aux États-Unis et ailleurs au Canada, Jean Rouleau a toujours gardé un bon souvenir de l’Université de Montréal. «C’est l’université qui m’a donné ma chance», résume-t-il.

Après son doctorat en médecine à l’Université d’Ottawa, Jean Rouleau suit toute sa formation postdoctorale à l’Université McGill, principalement à l’Hôpital général de Montréal. De 1979 à 1981, il se rend à San Francisco mener des recherches sur le système cardiovasculaire.

Il y a 20 ans, il devenait directeur de l’unité coronarienne de l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal, affilié à l’UdeM. Cette même année, il obtient son premier poste de professeur à la Faculté de médecine; il deviendra professeur agrégé en 1989 et sera promu au rang de titulaire en 1993. Associé depuis 10 ans à l’Institut de cardiologie de Montréal, il a vu son travail en enseignement être récompensé par un prix Mérite en 1997.

En plus de son travail à l’Université de Toronto, le Dr Rouleau est passé par l’Université de Sherbrooke, où il a dirigé durant quatre ans le service de cardiologie.

L’Université de Montréal a-t-elle une force particulière? L’enseignement, répond-il. Ce n’est pas pour rien que les étudiants de sa faculté ont occupé la première place au Canada dans les examens nationaux du Collège royal, souligne-t-il. «C’est à peine croyable. Parmi l’ensemble des étudiants des 16 facultés, les nôtres ont été les meilleurs dans chaque catégorie l’an dernier.»

Une hausse notable de la clientèle a commencé à se faire sentir depuis que le ministère a autorisé une augmentation annuelle de 70 % des étudiants d’ici cinq ans. Cette année, cela représentait 130 étudiants de plus. «Je ne suis pas inquiet de la qualité des candidats qui nous arrivent. Mais il va falloir trouver des professeurs qui seront capables de maintenir élevée la qualité de l’enseignement à la Faculté de médecine», conclut-il.

Mathieu-Robert Sauvé

 La règle des 3 %

 
Dans les années 90, Jean Rouleau ne manquait pas un match de hockey de ses enfants. Pour être certain d’y assister, il est devenu… entraîneur de l’équipe. Un samedi typique consistait en deux visites de patients à l’hôpital: une à l’aube, l’autre en fin d’après-midi. Le reste de la journée était consacré aux sports. «Un entraîneur doit toujours s’attendre à prendre sur sa route deux ou trois de ses joueurs qui n’ont pas de moyen de transport, raconte-t-il en riant. Puis à attacher quelques patins. Mais j’ai beaucoup aimé faire ça.»

Pour ce médecin qui se qualifie de «cardiologue granola», le sport a toujours fait partie de la routine. Ancien chef de l’équipe d’athlétisme de l’Université, il continue de pratiquer l’aviron et le vélo. «Je suggère à mes patients de consacrer 3 % de leur temps à leur corps. Ce n’est pas beaucoup, environ trois heures par semaine de marche rapide, de natation ou d’une autre activité physique. Mais c’est la meilleure prévention.»

Les Québécois sont de plus en plus obèses, mais pas autant que les Américains et même que les Ontariens. Par contre, ils fument davantage. «Dans les années 70 et 80, on voyait beaucoup de planches à voile sur les lacs des Cantons-de-l’Est et des Laurentides. On voyait des gens se mettre au jogging. Là, on sent que la mode est plutôt au cocooning. Je trouve cela dommage.»

 



 
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