Édition du 24 novembre 2003 / volume 38, numéro 13
 
  Réduction de 75 % des cancers du sein d’ici 2015
Cet objectif est à la fois réaliste et réalisable, estime le Dr André Robidoux.

Le Dr André Robidoux, titulaire de la chaire Banque Scotia en diagnostic du cancer du sein.

Selon plusieurs études présentées au récent colloque «Le cancer du sein: de la prévention à la compassion», la médecine serait désormais en mesure de réduire considérablement l’incidence de ce cancer chez les femmes à risque, c’est-à-dire les femmes qui présentent une prédisposition génétique, des lésions précancéreuses ou encore une histoire familiale où des cancers ont été diagnostiqués.

«Nos chaires de recherche sur le cancer du sein commencent à donner des résultats», s’est réjoui le Dr André Robidoux, titulaire de la chaire Banque Scotia en diagnostic du cancer du sein de l’Université de Montréal.

Ce colloque, organisé par la chaire du Dr Robidoux et tenu du 14 au 16 novembre, a donné la parole à plus d’une vingtaine de spécialistes de 10 disciplines médicales qui sont venus livrer les résultats des dernières recherches sur ce cancer affectant une femme sur neuf au Canada.

Tamoxifène et raloxifène

Une vaste étude internationale à laquelle le Dr Robidoux a collaboré a ainsi montré que le tamoxifène – un antiœstrogène utilisé dans les années 50 comme contraceptif – permettait de réduire de 50 % le risque de cancer du sein chez les femmes à risque mais asymptomatiques.

Le tamoxifène a cependant des effets secondaires non négligeables puisqu’il double le risque de cancer de l’endomètre, un cancer qui touche 5 % des femmes. Ce problème serait en voie d’être surmonté, selon des données récentes très encourageantes.

«On a réalisé que les femmes atteintes d’ostéoporose et qui étaient traitées au raloxifène présentaient jusqu’à 75 % moins de cancer du sein que celles qui ne prenaient pas ce médicament», indique le Dr Robidoux, professeur au Département de chirurgie de la Faculté de médecine.

Comme le tamoxifène, le raloxifène est un antiœstrogène sélectif, c’est-à-dire qu’il ne bloque pas les récepteurs d’œstrogène dans tous les tissus. Sur des modèles animaux, l’utilisation de ce médicament a par ailleurs montré qu’il n’avait aucune incidence sur le cancer de l’endomètre, contrairement au tamoxifène.

Les chercheurs en sont maintenant aux essais cliniques. Une nouvelle étude internationale, l’étude STAR (pour Study of Tamoxifen and Raloxifene) actuellement en cours auprès de 19 000 femmes à risque et à laquelle participe de nouveau le Dr Robidoux, vise à comparer les effets préventifs de ces deux molécules sur le cancer du sein, le cancer de l’endomètre, les fractures osseuses et les accidents cardiovasculaires.

«Le raloxifène n’est pas efficace pour guérir un cancer, mais il a un effet préventif, précise le chercheur. On s’attend à ce que ce médicament diminue de 75 % l’incidence du cancer du sein chez les participantes de l’étude STAR sans qu’elles expriment plus de cancers de l’endomètre que les patientes non traitées avec le raloxifène.»

Les résultats de cette étude sont attendus pour le début de 2006. L’objectif des milieux de la santé en Amérique du Nord de viser une diminution de 75 % des cancers du sein pour 2015 paraît donc réaliste au chercheur.

Traitement rationnel de l’œstrogène

La Dre Sylvie Mader, titulaire de la chaire de recherche CIBC-UdeM sur les causes du cancer du sein.

Cet objectif apparaît également réaliste aux yeux de Sylvie Mader, professeure au Département de biochimie et titulaire de la Chaire de recherche CIBC-UdeM sur les causes du cancer du sein. La Dre Mader a présenté l’état des travaux relatifs à la mécanique d’action du tamoxifène et du raloxifène et qui suscitent beaucoup d’espoir.

«Les connaissances sur les déterminants structuraux des récepteurs d’œstrogène permettent d’envisager un traitement rationnel de l’action de l’œstrogène», affirme-t-elle. Le défi est de bloquer l’action de cette hormone dans les tissus où elle a un effet nocif sur la multiplication cellulaire, sans la freiner là où elle est nécessaire.

On connaît maintenant les mutations des récepteurs d’œstrogène sur les cellules cancéreuses de l’endomètre qui rendent ces cellules sensibles ou non à l’œstrogène. Les recherches portent maintenant sur l’identification des gènes responsables de ces mutations.

Le colloque qui a permis de faire le point sur les dernières recherches a réuni les titulaires des quatre chaires québécoises de recherche sur le cancer du sein, des conférenciers renommés comme le Dr David Spiegel, de l’Université Stanford en Californie, ainsi que des patientes qui ont pu exprimer leurs attentes et leurs points de vue sur les recherches en cours.

Daniel Baril



 
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