Édition du 24 novembre 2003 / volume 38, numéro 13
 
  Capsule science
Notre cerveau est-il vraiment sous-utilisé?

La «dramatique sous-utilisation du cerveau» est une idée qui a la vie dure. On attribue cette croyance selon laquelle 90 % des capacités de notre cerveau seraient inemployées tantôt à William James, un psychologue du 19e siècle partisan du paranormal, tantôt à des colporteurs américains des années 30 qui vendaient des méthodes garantissant la mise à profit maximale du «vrai potentiel» de chaque être humain.

L’ex-Beatles Paul McCartney aurait contribué à propager la théorie dite du «cortex silencieux», en pleine fièvre hippie, en prescrivant l’utilisation de drogues: «Nous n’utilisons que 10 % de notre cerveau. Pensez à ce qui arriverait si l’on pouvait se servir de la partie cachée! Le LSD m’a ouvert les yeux. Si les politiciens en prenaient, ce serait un nouveau monde. Plus de guerre, de pauvreté et de famine.» Uri Geller, un illusionniste et motivateur contemporain connu en Angleterre, répète encore de nos jours à qui veut l’entendre que, s’il réussit à tordre des cuillères à distance, par la seule force de son esprit, c’est parce qu’il maîtrise une bonne partie des pouvoirs inexploités du cerveau.

Ces théories, très populaires dans les cercles «nouvelâgeux», sont évidemment fausses, dit André Ferron, professeur à la Faculté de médecine et adjoint au vice-doyen aux études de premier cycle de l’UdeM. Certes, précise-t-il, «lorsque je fais du traitement de texte avec mon ordinateur très puissant, j’en sous-utilise les capacités». Et il en va de même du cerveau lorsqu’on effectue certaines tâches simples. L’activité cérébrale ne cesse jamais, même pendant le sommeil, où elle peut se révéler intense, souligne M. Ferron. Bien que tous les neurones ne soient pas actifs en même temps, «rien ne permet de fixer quelque pourcentage que ce soit d’une non-utilisation». Toutes les parties du cerveau sont à un moment ou l’autre sollicitées.

Le professeur insiste: «Aucune aire dans le cerveau n’est toujours totalement inactive.» On le voit dans n’importe quelle exploration par balayage de type scanner. Du reste, a-t-on déjà entendu un médecin dire à un blessé par balle au cerveau: «Ouf! Heureusement que le projectile est passé dans les 90 % inutilisés?» Évidemment non, confirme André Ferron.

En somme, comme l’a dit l’humoriste Pierre Légaré: «Celui qui a découvert qu’on utilise juste 10 % de notre cerveau n’avait utilisé que 10 % du sien.» Tout comme ceux qui continuent à répandre cette idée, pourrions-nous ajouter.

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André Ferron a participé, le 18 novembre, à un clavardage sur le thème "Le cerveau sous tous ses angles" à l’intérieur du programme Sensibilisation aux études universitaires et à la recherche, visant les élèves du deuxième cycle du secondaire ( www.seur.umontreal.ca ).



 
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