Édition du 12 janvier 2004 / volume 38, numéro 16
 
  Capsule science
La HGH n’est pas la fontaine de Jouvence

C’est un des pourriels les plus fréquents. La promesse: une cure de jouvence. Traduction: «Procurez-vous en ligne l’incroyable hormone de croissance! On en a parlé à NBC, CBS, CNN et à l’émission d’Oprah! Même le New England Journal of Medicine est d’accord! C’est la découverte scientifique qui permet d’inverser vraiment le processus du vieillissement tout en faisant fondre la graisse, sans régime ni exercices! L’hormone améliore vos performances sexuelles, fait disparaître les rides et la cellulite! Fait redémarrer la pousse des cheveux et rétablit leur couleur. Renforce le système immunitaire. Vous donne plus d’énergie et augmente vos performances cardiaques.»

C’est trop beau pour être vrai, vous dites-vous. Et vous avez raison.

La HGH, c’est la human growth hormone, l’hormone de croissance. On dit qu’il s’agit d’un marché en forte… croissance. Tout a commencé lorsque le New England Journal of Medicine a publié, en 1990, un article de Daniel Rudman rendant compte d’un essai d’administration d’hormones de croissance à 12 hommes âgés. On avait prétendument observé au bout de six mois une augmentation de la masse musculaire, une baisse de la masse adipeuse et un épaississement de la peau. Et ce, sans régime ni exercices physiques. Par la suite, les livres et les gourous antivieillissement se sont mis à pulluler. Parmi eux, Ronald Klatz et son Grow Young with HGH.

Mais en février 2003, la publication scientifique américaine a remis les pendules à l’heure. Dans un éditorial, Mary Lee Vance, de l’Université de Virginie, écrivait qu’«il n’existe pas de potion magique qui puisse ralentir ou inverser le processus du vieillissement. Les tentatives de lutte contre le vieillissement au moyen d’hormones de croissance n’ont jusqu’ici pas été fondées sur des critères objectifs». Mme Vance mettait au jour plusieurs lacunes de l’étude de 1990. Selon elle, on avait notamment omis de constituer un groupe de référence recevant un placebo. Elle faisait valoir que d’autres études scientifiques ont démontré que les activités physiques augmentent la force musculaire davantage que la prise d’hormones de croissance. Faire du sport ou manger de la viande coûte moins cher que de se procurer la HGH, même en ligne! Du reste, ce produit pourrait comporter des risques de formation d’œdème et de tunnel carpien. Sans compter qu’en stimulant des facteurs de croissance on risque d’accélérer du même coup des processus cancéreux.

Il est curieux qu’on offre sur Internet des produits en poudre ou en gélules, puisque toutes les études montrent que la seule façon d’introduire des hormones de croissance dans le corps, c’est par injection ou peut-être par aérosol. Par voie orale, le produit se trouve tout simplement éliminé par le processus digestif.

À l’Université de Montréal, des chercheurs s’intéressent à l’hormone de croissance, notamment pour le traitement de la cardiomyopathie dilatée (CMD). Cette pathologie cardiaque se caractérise notamment par une dilatation du ventricule gauche sans augmentation compensatoire de la paroi ventriculaire, ce qui entraîne chez le patient une insuffisance cardiaque. Une équipe composée notamment de Sylvie Marleau, professeure à la Faculté de pharmacie, a montré, à partir d’une étude sur des hamsters atteints de CMD, «un effet délétère d’un traitement pharmacologique prolongé à l’hormone de croissance sur la fonction cardiaque et une augmentation de la mortalité, en dépit d’une augmentation de la masse corporelle et cardiaque des animaux traités (Endocrinology, 2002)». On est loin, très loin, des grandes promesses de nos pourriels quotidiens!

Antoine Robitaille



 
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