Édition du 19 janvier 2004 / volume 38, numéro 17
 
  Les « découvreurs » de l’année : Guy Sauvageau et Suzanne Giasson
Deux recherches de l’UdeM parmi le top 10 de Québec Science

Guy Sauvageau: la recette pour le sang

Le gène HOXB4 de l’hématologiste Guy Sauvageau et le polymère-brosse de la chimiste Suzanne Giasson sont parmi les 10 découvertes de l’année de la revue Québec Science (numéro de février 2004). Les deux chercheurs ont publié leurs résultats dans la revue Nature, notamment.

Le printemps dernier, le Dr Sauvageau affirmait à Forum que ses travaux pourraient permettre d’améliorer les traitements des maladies du sang et d’ouvrir une nouvelle voie de recherche dans la lutte contre le cancer, tout en décuplant la capacité de production des dérivés sanguins. C’est surtout cette dernière application qui semble avoir retenu l’attention de la journaliste Catherine Dubé, dont l’article s’intitule «Du sang à volonté». Le chercheur, peut-on lire, a «trouvé la recette pour fabriquer du sang».

Le gène HOXB4, situé sur le chromosome 17, joue en effet un rôle majeur dans la production des cellules souches, responsables de la régénération sanguine. «Chaque jour, nous produisons des milliards de cellules, expliquait le chercheur (voir Forum du 26 mai 2003). Pourtant, les 100 000 cellules souches que nous recevons à notre naissance restent les mêmes tout au long de notre vie. Elles ont cette faculté exceptionnelle de s’autogénérer tout en fabriquant des cellules qui, elles, se spécialisent.»

Le Dr Sauvageau, dont le laboratoire est situé à l’Institut de recherches cliniques de Montréal, a démontré que la présence de ce gène pouvait multiplier par 1000 le nombre de cellules produites dans la moelle osseuse. Il a fait cette démonstration in vivo et in vitro. Cette découverte pourrait provoquer une véritable révolution dans le domaine de la transplantation sanguine. «Imaginez qu’avec un culot sanguin on puisse faire 1000 culots. Cela pourrait régler très rapidement les problèmes endémiques de pénurie», lançait le chercheur.

Au cours de ses huit années de travaux, son équipe a aussi exploré le rôle, moins noble, que jouerait ce gène dans la prolifération des cellules cancéreuses. Il ne fait plus aucun doute, dans l’esprit du médecin, que la tumeur cancéreuse résulte du développement désordonné ou anarchique d’une cellule souche.

Percée en chimie des polymères

Suzanne Giasson: des polymères sans friction

De son côté, Suzanne Giasson, professeure au Département de chimie (Faculté des arts et des sciences) et à la Faculté de pharmacie, a réalisé une percée en chimie des polymères avec la collaboration de Uri Raviv, étudiant au Weinzmann Institute, en Israël. On sait depuis toujours que la friction entre deux solides a pour effet de détériorer le matériau au point de contact. Les prothèses de la hanche, par exemple, doivent être régulièrement remplacées, car l’usure en altère les surfaces. Leur durée de vie ne dépasse pas 15 ans. Peut-on penser qu’un jour des matériaux se toucheront sans provoquer la moindre friction? C’est ce que permet d’envisager la recherche de Mme Giasson. «Nous avons travaillé sur un polymère chargé en forme de brosse qui s’est avéré un excellent lubrifiant en milieu aqueux, expliquait l’ingénieure chimiste en septembre dernier. C’est difficile à croire, mais nous avons obtenu des résultats où le frottement était réduit presque à zéro: à moins de 10-9 newton pour être précis (pression de 10 atmosphères). Même un objet qui se déplace dans l’air peut subir davantage de friction.»

Avec ses collègues d’Israël, qu’elle a été rencontrer trois fois au cours des dernières années, la professeure Giasson a mené des expériences sur des couches de polymères de quelques dizaines de nanomètres. Ces expériences ont permis aux chercheurs d’effectuer une percée dans le secteur du recouvrement de surfaces et dans celui que les experts appellent «tribologie», c’est-à-dire la science des surfaces en mouvement.

Comme il s’agit de recherche fondamentale, un grand chemin reste à parcourir avant que les fabricants recouvrent leurs prothèses de ce produit miracle de la nanotechnologie. Mais la publication des résultats de cette recherche dans une des deux plus prestigieuses revues scientifiques du monde permet de croire que ce sera possible un jour.

Mathieu-Robert Sauvé



 
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