Édition du 9 février 2004 / volume 38, numéro 20
 
  Le français des futurs maîtres: des exigences à la hausse
La Faculté des sciences de l’éducation déploie des efforts considérables

Lorsque viendra le temps d’effectuer des stages dans les écoles du Québec, les futurs enseignants diplômés de l’Université auront une maîtrise sans faille de la langue française écrite. En effet, les exigences en matière d’habiletés linguistiques sont telles, aujourd’hui, que la moindre lacune est prise en compte.

«Il faut signaler une hausse des exigences relatives à la maîtrise du français», souligne le doyen de la Faculté des sciences de l’éducation, Michel Laurier.

Le doyen Michel Laurier rappelle que les étudiants sont aidés dans leurs démarches pour apprendre le français.

Selon M. Laurier, les étudiants qui se destinent à l’enseignement sont conscients des exigences linguistiques et ils sont inquiets lorsqu’ils entament leur formation à l’Université de Montréal. «Mais croyez-moi, ils ne sont pas abandonnés à leur sort, assure-t-il. Nos étudiants sont très étroitement encadrés.»

Les nouveaux admis sont tous évalués dès leur entrée à la Faculté. Ceux qui n’obtiennent pas la note de passage à un test destiné à mesurer leurs connaissances sont automatiquement inscrits à un cours de mise à niveau. S’ils ne réussissent pas ce premier cours, ils devront suivre un deuxième cours de mise à niveau.

À l’automne 2003, seulement 152 des 714 étudiants admis dans les différents programmes de baccalauréat en enseignement ont obtenu la note de passage de 75 % au test de français imposé par la Faculté des sciences de l’éducation. Plus de 500 se sont donc inscrits au cours Français écrit pour futurs enseignants, dont la réussite est obligatoire avant la troisième année de leur programme d’études.

Le taux de succès de 21 % est supérieur à celui de l’année précédente (automne 2002), alors que seulement 11 % des étudiants aux mêmes programmes d’études avaient réussi le test. Mais la note de passage était alors de 80 %.

Il existe une grande marge entre les taux de succès obtenus dans les tests de maîtrise du français donnés à la fin du collégial (88 % l’an dernier) et de si piètres résultats à l’entrée à l’université, trois mois plus tard. «C’est qu’on n’évalue pas les mêmes choses, explique le doyen. Le test de français Laval-Montréal [TFLM], qu’on fait passer ici, porte sur le code linguistique, tandis que celui des cégeps consiste en la rédaction d’un texte de 500 mots.»

Le bon côté des choses

Annie Desnoyers coordonne les activités de perfectionnement pour les étudiants.

Selon Annie Desnoyers, responsable du soutien en français au Centre de formation initiale des maîtres, la bonne nouvelle, c’est que la grande majorité des étudiants qui suivent le cours Français écrit pour futurs enseignants parviennent à réussir l’examen donné à la fin des 45 heures. Et on ne leur fait pas de cadeaux puisque cet examen est plus exigeant que le TFLM.

«Les étudiants qui assistent au cours de rattrapage sont évidemment déçus d’avoir échoué au test d’entrée, mais ils sont conscients de l’importance de la qualité de la langue et ils sont très motivés à réussir», signale la linguiste, qui dirige une équipe d’une dizaine de chargés de cours.

Paradoxalement, les étudiants inscrits au cours Français écrit pour futurs enseignants sont parfois mieux préparés que les étudiants qui ont obtenu la note de passage au TFLM lorsqu’ils se présentent devant une salle de classe à leur première année de stage. Les règles de grammaire sont plus fraîches dans leur mémoire…

Malheureusement, un certain nombre d’étudiants essuient un échec dans ce cours, même après une reprise. Selon Annie Desnoyers, on compte de 20 à 30 étudiants par année dans cette situation. Des cas «pathétiques», selon le doyen Michel Laurier, car ces étudiants doivent renoncer à leur programme d’études, l’inscription en troisième année étant conditionnelle à la réussite du cours. Mais comme les employeurs (dans ce cas-ci les commissions scolaires) sont très exigeants en matière de maîtrise du français, il vaut mieux que les étudiants en soient avisés avant la fin de leur baccalauréat.

M. Laurier affirme qu’il est bien fini le temps où les universités pouvaient rejeter la responsabilité des difficultés linguistiques sur les niveaux antérieurs du système scolaire. «On ne peut plus dire que c’est la faute des cégeps, qui eux répondent que c’est plutôt celle des écoles secondaires et ainsi de suite. En vérité, tous doivent mettre la main à la pâte.»

Expert en évaluation

Michel Laurier, dont les travaux de recherche depuis 20 ans portent précisément sur l’évaluation des connaissances dans les langues maternelle et seconde, estime que la situation du français n’est pas aussi catastrophique qu’on le prétend. «Ceux qui disent que le français des jeunes d’aujourd’hui se détériore font fausse route, signale-t-il. Rien ne permet de lancer une telle affirmation.»

Les problèmes du français écrit sont communs à l’ensemble de la francophonie et la situation n’est pas pire aujourd’hui qu’il y a 10 ans, prétend-il. Les tests donnés au secondaire (où le taux de succès atteignait 76 % l’an dernier) et au cégep sont valables, estime l’expert. Et ce, même si les évaluations du Centre de communication écrite font état d’un taux de succès de 37 % au premier cycle universitaire (voir Forum du 2 février, page 3). «Mais c’est une chose de connaître le code, et c’en est une autre de savoir communiquer correctement dans une langue», défend M. Laurier.

Cela dit, pour quiconque se destine à l’enseignement, Michel Laurier convient que les exigences doivent être élevées. «Les enseignants sont des modèles et ils doivent bien maîtriser la langue qu’ils enseignent. Ils doivent savoir en expliquer les règles et les subtilités. C’est pourquoi nous sommes plus sévères.»

Quant aux sommes consacrées à l’embauche de personnel spécialisé dans l’enseignement des règles de grammaire et de syntaxe à l’Université, M. Laurier admet qu’elles pourraient être utiles ailleurs dans sa faculté, mais il n’a pas le choix. «C’est une question de responsabilité collective», dit-il.

Mathieu-Robert Sauvé



 
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