Édition du Édition du 5 avril 2004 / volume 38, numéro 27
 
  Rencontre avec un auteur à succès
Stéphane Bourguignon se livre à une soixantaine de lectrices

Stéphane Bourguignon a un nouveau projet pour la télévision. Et ce sera drôle.

Quand un éditeur a appelé Stéphane Bourguignon pour lui annoncer que le manuscrit de L’avaleur de sable l’intéressait, le jeune homme a cru à une blague. «J’avais déposé mon roman chez quatre éditeurs et personne ne m’en avait donné de nouvelles. Tout d’un coup, Québec/Amérique se montrait presque trop emballé. Je me suis dit que c’était sans doute un de mes amis qui me jouait un tour.»

Quelques mois plus tard, en 1993, L’avaleur de sable connaît un succès remarquable, lançant la carrière de cet écrivain plus habitué à servir des cafés chez Van Houtte qu’à signer des dédicaces. Et quand il donne ses premières entrevues, il est déjà à pied d’œuvre sur son deuxième livre, Le principe du geyser, paru en 1996. «Ce livre, je l’ai fait pour racheter les défauts du premier. Je n’y suis pas tout à fait arrivé. J’ai donc écrit un troisième roman.»

Le romancier a livré ces confidences au cours d’une rencontre organisée à l’occasion de la Semaine du français et de la francophonie, le 23 mars dernier. Il a d’abord répondu aux questions de la journaliste culturelle Marie-Christine Trottier, avant d’entendre celles du public. Dans la salle, une soixantaine de personnes étaient présentes. L’écrasante majorité connaissait bien l’œuvre de l’auteur et scénariste.

C’est à titre de scénariste pour la télévision que Stéphane Bourguignon est devenu une vedette. Au point où les libraires ajoutent un bandeau sur les exemplaires de ses romans sur lequel on peut lire: «Par l’auteur de La vie, la vie.» Une série-culte chez les jeunes, selon Mme Trottier.

Écrivain depuis toujours

C’est vers 22 ans que Stéphane Bourguignon a su qu’il consacrerait sa vie à l’écriture. «J’écrivais presque quotidiennement depuis l’âge de 14 ans, relate-t-il. Passer deux semaines sans écrire me paraissait interminable. J’écrivais des poèmes assez cuculs, mais sur lesquels je pouvais plancher des heures. J’écrivais aussi des débuts de romans qui ne menaient nulle part.»

À l’UQAM, il s’inscrit en scénarisation cinématographique. Pourquoi ce choix? Parce que c’est un des seuls programmes d’études où l’on accepte des étudiants sans diplôme d’études collégiales.

– Et les profs, ils t’ont marqué? demande l’intervieweuse.

– Tous!

– Positivement?

– Non!

Comme plusieurs écrivains de sa génération, Stéphane Bourguignon n’est donc pas issu du monde universitaire. Pendant une dizaine d’années, il travaille dans le milieu de l’humour. Les humoristes Pierre Légaré, Patrick Huart et Marie-Lise Pilote lui commandent des textes. «Cela m’a certainement influencé. J’écrivais des jokes toute la journée et je reprenais mon roman le soir. Forcément, cela a donné un livre drôle. Le plus drôle de mes livres en tout cas.»

Avec La vie, la vie, Stéphane Bourguignon est entré dans 1,2 million de foyers à chacun des épisodes. Dès le lendemain de leur diffusion, il recevait de nombreux courriels, ce qui le mettait en communication constante avec son auditoire. «Ça ne se passe pas comme ça avec un roman», affirme-t-il.

Mais il n’a pas aimé le succès que lui a apporté La vie, la vie. Dès la deuxième saison, il était «passé à autre chose». La promotion de la série, les entrevues, tout cela lui a semblé fastidieux.

Aventure intérieure

Toute écriture de fiction demeure une aventure intérieure. L’auteur se dit d’ailleurs peu sociable lorsqu’il est plongé dans la rédaction d’un roman (soit presque tout le temps…). «Je vis beaucoup avec mes personnages», confie-t-il, conscient de reprendre un vieux cliché.

Tout au long de la rencontre, l’écrivain a fait référence à l’eau: la mer, la piscine de banlieue, les poissons. «Dans vos livres, il est souvent question de l’eau: qu’est-ce que cela signifie?» a demandé une auditrice.

Il n’a pas su quoi répondre. «Mon homéopathe m’a aussi posé la question et il m’a donné une granule pour ça», dit-il.

Sur un ton plus sérieux, il a été invité à décrire l’image de l’homme qu’il voyait dans la fiction québécoise. On sait que les personnages masculins de notre littérature (et les téléromans n’y échappent pas) présentent le plus souvent un profil misérable de l’homme adulte. Quand ce sont des pères, ils sont le plus souvent absents, alcooliques ou carrément violents.

Sans nier ce phénomène, l’écrivain de 40 ans affirme qu’il n’est pas limité au Québec. «C’est vrai que les hommes ont du mal à fonctionner dans la société. Les hommes rêvent. C’est pour ça qu’ils construisent des fusées, des satellites, des gratte-ciel. Ils ne voient pas qu’autour d’eux on manque d’eau, de nourriture, d’amour. Les femmes sont plus terre à terre. Elles sont plus branchées sur la vraie vie.»

Ses trois romans avaient pour personnage principal des hommes de son âge. Mais l’écrivain affirme que le narrateur pourrait être très différent de lui dans ses prochaines œuvres. Il a laissé entendre que ce pourrait être une femme d’un âge avancé…

Quand verrons-nous ces nouveaux opus? Stéphane Bourguignon ne l’a pas précisé. Il a terminé un scénario de film, mais celui-ci ne le satisfait pas. Donc, personne ne l’a lu à ce jour. Par ailleurs, un projet pour la télévision est en cours.

Mathieu-Robert Sauvé



 
Archives | Communiqués | Pour nous joindre | Calendrier des événements
Université de Montréal, Direction des communications et du recrutement