Édition du 8 novembre 2004 / volume 39, numéro 10
 
  Guy Rouleau suit la piste génétique de l'angio-oedème
Le chercheur collaborera avec le professeur Albert Adam

Le Dr Guy Rouleau

Les National Institutes of Health (États-Unis) viennent d'annoncer le financement d'une recherche du généticien et neurologue montréalais Guy Rouleau, consistant à identifier les marqueurs génétiques de l'angio-oedème. Associée à la prise d'un médicament contre l'hypertension et à d'autres maladies du coeur, l'angio-oedème provoque une maladie grave qui touche 1 ou 2 personnes sur 1000 dans la population mais jusqu'à 2 % des Noirs.

«L'intérêt principal de notre recherche est de mieux comprendre les effets secondaires de ce médicament appelé inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine, qui est le plus prescrit dans le monde», explique le Dr Rouleau. Commercialisé sous les noms de Capoten, Vasotec, Altace et autres, le médicament serait prescrit à 40 millions de personnes actuellement.

Des expériences préliminaires ont porté sur 48 patients caucasiens souffrant d'angio-oedème et quelque 250 membres de leurs familles. Prochainement, elles seront menées auprès de plusieurs centaines de patients nord-américains d'origine africaine. La recherche du Dr Rouleau pourrait conduire à une percée dans le domaine de la pharmacogénomique qui pourrait complètement changer la façon dont les médicaments sont prescrits.

Le chercheur de l'Université de Montréal, reconnu pour ses découvertes de plusieurs gènes responsables de maladies autosomiques, a désigné récemment différents facteurs génétiques prédisposant au développement de l'angio-oedème chez des patients traités au moyen d'un inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine.

«Plus on connaîtra l'angio-oedème, mieux on sera en mesure de comprendre les mécanismes de la susceptibilité à cette maladie», fait remarquer le médecin-chercheur qui travaillera avec la Dre Nancy Brown, de l'Université de Vanderbilt, au Tennessee. De son côté, Albert Adam, professeur à la Faculté de pharmacie de l'UdeM, poursuivra ses travaux visant à identifier certains marqueurs métaboliques de ce type d'effets secondaires. «Nous joignons en quelque sorte nos expertises», résume M. Adam.

Les personnes qui souffrent d'angio-oedème ont un problème de perméabilité des vaisseaux capillaires qui peut se traduire par un gonflement des tissus. Tous les organes, y compris le cerveau, les poumons et les reins, peuvent subir ce gonflement. La conséquence peut alors être dramatique, car le patient peut tomber dans le coma ou mourir. Mais le symptôme le plus courant est le gonflement du larynx. La personne atteinte a alors du mal à avaler, voire à respirer.

Albert Adam

L'angio-oedème peut se déclencher à la suite d'un stress physique ou émotif par exemple. Chez la femme, les poussées d'oedèmes peuvent être liées aux menstruations ou à la prise de contraceptifs oraux. Et les enfants peuvent en souffrir lorsqu'ils «percent leurs dents».

Les chercheurs sont intrigués par le fait que la forme de la maladie entraînée par la prise d'un inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine est beaucoup plus courante chez les personnes de race noire. «L'incidence de la maladie est d'environ 0,1 à 0,2 % dans la population, rappelle Guy Rouleau. Mais ce taux passe de 0,7 à 2 % chez les Noirs. Il y a là un facteur génétique très important.»

Connu pour ses travaux au laboratoire de neurogénétique de l'Université McGill, le Dr Rouleau a permis la découverte de gènes responsables de plusieurs maladies particulières au Québec. Le gène de la dystrophie musculaire oculopharyngée, dont la moitié des cas connus dans le monde sont répertoriés au Québec, a été mis au jour par ce laboratoire en 1998. Les gènes responsables de l'épilepsie myoclonique juvénile et de la maladie de Lou Gehrig ont aussi été découverts par le laboratoire.

Originaire de Vanier, près d'Ottawa, le Dr Rouleau est neurologue de formation. Il pratique toujours la médecine à l'Hôpital de Buckingham, dans l'Outaouais, où il fait de la neurologie générale un jour par mois. «Je ne le fais pas pour plaire au ministre de la Santé, blague-t-il, mais pour rendre service à la communauté et ne pas perdre la main.»

Le Dr Rouleau est actuellement en train de déménager son laboratoire de l'Université McGill vers l'Université de Montréal où son frère, Jean Rouleau, dirige la Faculté de médecine.

Mathieu-Robert Sauvé



 
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