Édition du 31 janvier 2005 / volume 39, numéro 19
 
  Quand la mémoire s’en va
L’Hôpital du Sacré-Cœur inaugure une clinique de la mémoire

Les gens âgés ont parfois de la difficulté à se souvenir de la posologie de leurs médicaments.

«Ce qui touche le cœur se grave dans la mémoire.» Cette citation de Voltaire est tirée du dépliant d’une nouvelle clinique inaugurée récemment à l’Hôpital du Sacré-Cœur de Montréal: la Clinique de la mémoire. «Elle vise à  aider les personnes âgées de 65 ans et plus qui présentent des troubles de la mémoire à mieux s’adapter et à faire face à leur condition», signale la responsable de la Clinique, la Dre Nathalie Shamlian.

Qu’il s’agisse de la mémoire implicite, qui permet de se rappeler comment marcher sans même avoir à se remémorer cet acte, ou de la mémoire explicite, qui permet d’exprimer verbalement les souvenirs, la mémoire est nécessaire à toutes les opérations de l’esprit. «Elle régit l’essentiel de nos activités quotidiennes, qu’elles soient scolaires, professionnelles ou de loisir, affirme la psychogériatre. Grâce à notre mémoire, on construit aussi bien notre identité que nos connaissances et notre affectivité.»

Selon une étude canadienne sur la santé et le vieillissement, 1 Canadien sur 20 âgé de plus de 65 ans est atteint de la maladie d’Alzheimer, la forme la plus courante de démence. Au Québec, cette maladie qui affecte deux fois plus de femmes que d’hommes touche environ 60 000 personnes. «Ce que les chiffres ne disent pas, c’est que les conséquences de l’Alzheimer ou d’autres affections connexes sur la famille et les gens atteints sont immenses, indique la Dre Shamlian. Avec le vieillissement de la population, il y a lieu de s’inquiéter, car l’incidence des amnésies augmente avec l’âge. D’ici 2011, on estime qu’il y aura 111 560 nouveaux cas de démence chaque année au Canada.»

Favoriser le diagnostic précoce

La Dre Nathalie Shamlian

Faut-il s’inquiéter des occasionnels «trous de mémoire»? De nombreuses personnes se plaignent de leur mémoire en vieillissant, déclare la Dre Shamlian. «Il s’agit le plus souvent d’altérations cognitives normales qui n’ont pas d’impact sur le fonctionnement quotidien, par exemple la difficulté à se souvenir d’un numéro de téléphone ou encore à se concentrer sur une tâche dans un environnement bruyant.»

Ces dernières années, un nouveau concept a émergé, le trouble cognitif léger. «Les gens éprouvent des difficultés à se rappeler une information apprise récemment; ils cherchent des objets perdus, oublient des rendez-vous ou encore posent plusieurs fois la même question. Chaque année, environ 15 % de ces personnes verront leur état évoluer vers un diagnostic d’Alzheimer. D’où l’importance de les évaluer dans une clinique spécialisée comme la nôtre pour commencer au besoin un traitement le plus rapidement possible.»

Rappelons que la maladie d’Alzheimer implique une détérioration graduelle de la mémoire mais aussi d’autres fonctions cognitives qui rend le patient de moins en moins fonctionnel dans la vie courante.
Il peut de plus apparaitre des changements de comportement et des symptômes psychiatriques.
C’est dans le but de venir en aide à ces hommes et à ces femmes que la Clinique de la mémoire a été fondée par le Service de psychogériatrie de l’Hôpital du Sacré-Cœur à l’initiative du Dr Georges Aird. La Clinique regroupe une équipe multidisciplinaire composée d’un gérontopsychiatre, d’un médecin généraliste, d’un neurologue, d’un neuropsychologue, d’un ergothérapeute et d’une infirmière.

Associée à la Société Alzheimer de Montréal, elle offre un service de troisième ligne, c’est-à-dire que «la prise en charge et le suivi du patient évalué par les spécialistes de la Clinique sont assurés par le médecin traitant», explique la Dre Shamlian. Les membres de la Clinique agissent ainsi à titre de consultants, en
matière de diagnostic et de traitement des démences et des troubles associés, auprès des médecins de l’Hôpital ou des territoires desservis par les CLSC Ahuntsic, Montréal-Nord, Nord-de-l’Île, Saint-Laurent et Saint-Michel.

«Nos interventions sont orientées de manière à favoriser le diagnostic précoce de la maladie, la réadaptation des patients qui en sont atteints et la mise en réseau des ressources qui offrent des soins et des services à cette clientèle», mentionne la Dre Shamlian.

Défis d’envergure

Les locaux de la Clinique de la mémoire, situés dans l’immeuble de la maison mère des Sœurs de la providence, «feront l’envie de plusieurs», car les laboratoires d’enseignement et de recherche sont parmi les plus perfectionnés. Forum a pu le constater lors de sa rencontre avec la Dre Shamlian.

Avec ses 10 employés, la Clinique veut mettre un accent particulier sur la recherche. Elle ne compte présentement aucun étudiant-chercheur, mais des locaux sont disponibles pour les y accueillir, précise la responsable de la Clinique. Celle-ci espère voir prochainement des stagiaires de différents champs de pratique se joindre à l’équipe. Pour elle, la participation à la formation médicale et à la recherche dans le domaine des maladies mnésiques et cognitives revêt une grande importance. 

Elle déplore cependant qu’à ce jour la Clinique n’ait obtenu ni fonds de recherche ni subvention gouvernementale. «Il s’agit d’un problème de société. Il faudra bien remédier à cette situation», dit celle dont les défis actuels et prochains ne manquent pas d’envergure. La Dre Nathalie Shamlian et son équipe visent l’excellence dans les soins au patient et l’enseignement aux futurs professionnels. «On veut hisser la Clinique au rang des meilleures cliniques de la mémoire du Canada», conclut-elle.

Dominique Nancy



 
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