Édition du 7 février 2005 / volume 39, numéro 20
 
  Quand des chercheurs donnent leur 110 %...
Les actes du colloque «Des mots et des muscles» viennent de paraitre

Benoît Melançon

«Qu’est-ce que le sport? Le sport répond par une autre question: qui est le meilleur?»

Ce commentaire du sémiologue français Roland Barthes (1915-1980) a été souligné par le chercheur Gilles Dupuis, professeur au Département d’études françaises, au cours du colloque «Des mots et des muscles», tenu à l’Université de Montréal en octobre 2003. Jusque-là inédit, le texte de Roland Barthes d’où est tirée la citation provient de la trame d’un film tourné en 1961 par l’écrivain québécois Hubert Aquin alors qu’il travaillait à l’Office national du film. Dans le documentaire d’une heure réalisé par les deux hommes, cinq sports dits nationaux sont analysés et mis en parallèle avec un pays: le Tour de France (France), la course automobile (Italie), le hockey (Canada), le soccer (Angleterre) et la corrida (Espagne). Dans chaque cas, la notion de sport national pose problème, mais en même temps cet angle du meilleur qui l’emporte toujours rapproche d’une conception sartrienne de l’homme. «C’est donc une conception humaniste du sport, humaniste et universaliste, que Barthes met en scène avec la complicité d’Aquin», mentionne Gilles Dupuis dans son texte relatant sa trouvaille. Cet écrit de Barthes révélé a eu l’effet d’un véritable scoop dans le monde des lettres.

«Il a certainement donné une visibilité supplémentaire à notre évènement, car peu de gens savaient que Hubert Aquin et Roland Barthes se connaissaient», signale Benoît Melançon, professeur en études françaises et l’un des organisateurs du colloque.

Dans le livre qui vient de paraitre aux Éditions Nota Bene, on trouve l’essentiel des conférences présentées au colloque de l’automne 2003. Dans un texte savoureux, M. Melançon lui-même tente d’expliquer le mythe de Maurice Richard. Mort depuis plus de cinq ans, ce joueur de hockey continue d’être considéré comme l’un des meilleurs arguments de vente pour une tonne de produits de consommation: vin, cannes à pêche, jouets. Mais aussi, il personnifie le Canadien modèle par sa ténacité, sa détermination, sa combattivité. Au point où sa figure a pris des proportions mythiques qui n’ont rien à voir avec le hockeyeur fougueux qu’il a été. «Celui dont la dureté envers les autres et envers lui-même ne s’est jamais démentie devient un grand-papa gâteau [...] Celui qui n’hésitait pas à jeter les gants est dorénavant “le gentilhomme du hockey”», fait remarquer l’auteur.

Les spécialistes qui ont participait au colloque se sont intéressés à des sports de masse comme le hockey, le baseball et le soccer, mais aussi aux courses hippiques, au rugby, au marathon et au tennis. On peut lire des textes de plusieurs professeurs et étudiants de l’Université de Montréal: Évangéline Faucher, Yan Hamel, Geneviève Lafrance et Pierre Popovic, en plus bien sûr de MM. Dupuis et Melançon.

Le professeur de lettres affirme que le travail des participants a été très fructueux. «Je crois que nous avons réussi à éviter les deux écueils qui se présentent avec ce genre de sujet: être trop sérieux ou être trop légers», dit-il.

Mathieu-Robert Sauvé

Collectif sous la direction de Yan Hamel, Geneviève Lafrance et Benoît Melançon, Des mots et des muscles! Représentations des pratiques sportives, Montréal, Éditions Nota Bene, 275 p., 24,95 $.



 
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