Édition du 21 février 2005 / volume 39, numéro 22
 
  L’Atelier de jeux sonores enthousiasme les étudiants
Pour Robert Léonard, la musique est indissociable du plaisir de jouer avec d’autres

Angélique Duruisseau suit le cours Atelier de jeux sonores de Robert Léonard.

Le terme «jeux sonores» exprime bien, par sa simplicité, le but recherché par Robert Léonard, grand défenseur de cette approche tout à fait spéciale qu’il enseigne à la Faculté de musique. Bien qu’il se défende d’avoir inventé la démarche même du jeu sonore, le musicien a cependant le mérite de l’avoir nommée, élaborée et implantée au Québec. 

«Le jeu sonore est une pièce musicale conçue et notée de façon à pouvoir être interprétée autant par des gens sans aucune notion de théorie musicale que par des musiciens.»

Tout a commencé lorsque le jeune professeur de musique, alors enseignant au cours classique, s’est interrogé sur le côté passif de son travail. «J’avais l’impression d’enseigner la musique comme j’aurais enseigné les mathématiques. Un jour, un élève est venu me voir et m’a dit: “C’est bien beau tout ça, mais quand va-t-on faire de la musique?”» C’est alors que Robert Léonard fait ses premiers pas dans les jeux sonores en concevant quelques «partitions» faciles d’accès à l’usage de ses élèves.

Attiré par l’animation musicale, le musicien devient professeur à la Faculté de musique. Influencé par les remises en question typiques du langage musical des années 70, Robert Léonard se dit grandement redevable à l’Américain John Cage, un compositeur qui a ébranlé bien des conceptions basées sur la tradition et l’héritage culturel. Du côté européen, le pédagogue rencontre des personnalités qui pratiquent ce qu’on appelle l’animation sauvage.

«On rassemblait des gens qui ne possédaient pas de notions musicales et on les faisait jouer. Les animateurs pouvaient par exemple aller chercher les parents qui attendaient les enfants en train de suivre des cours de musique et leur faire créer une pièce musicale. À la Faculté de musique, j’ai formé des équipes de recherche sur le sujet. À un moment donné, j’ai constitué un premier groupe d’animation, qui était instrumental. L’idée était de prendre des partitions en notation non traditionnelle, de les expliquer au public, puis de faire jouer la pièce par des musiciens préparés, le tout en projetant la partition sur un écran. En dernier lieu, on invitait les auditeurs à prendre de petits instruments à percussion et à exécuter eux-mêmes des extraits de la pièce.» 

Mais la faiblesse du répertoire se fait vite sentir... C’est alors que Robert Léonard se lance dans l’élaboration systématique de «partitions»: le jeu sonore nait véritablement. «Il ne s’agit ni d’un exercice, ni d’une improvisation, ni même d’une œuvre. C’est un évènement sonore qui est structuré, explique le musicien. Cela donne des pièces très pulsives, basées sur le rythme.»

Le cours Atelier de jeux sonores, auquel participent des étudiants enthousiastes, devient une des particularités de la Faculté et reste, tout au long de sa carrière, le «dada» de son instigateur. Le phénomène connait son apogée avec la fondation du GAM 1987. «D’anciens étudiants, des musiciens et des professeurs de musique sont venus me voir et m’ont demandé si je n’avais pas envie de faire quelque chose avec eux, dans une perspective plus professionnelle. Après des débuts un peu difficiles – puisque les gens ne savaient pas ce que nous faisions –, on s’est mis à avoir beaucoup de demandes, on était invités un peu partout, on a même joué à la Place-des-Arts!»

Les ateliers dans les écoles et les prestations publiques se succèdent durant sept années, dont Robert Léonard se souvient avec beaucoup de joie. «C’est ce que j’ai vécu de plus fort comme plaisir de musicien», évoque-t-il. Il faut dire que le plaisir musical est au centre des préoccupations du pédagogue. Son but se résume en quelques mots: la communication musicale à travers le plaisir de jouer avec les sons. «Pas la communication qui se produit entre le public et les interprètes, précise-t-il, mais celle qui se produit quand on joue avec d’autres. En pratiquant cette activité, on peut modifier sa manière d’écouter, changer sa relation avec le fait musical.»

Les jeux sonores de Robert Léonard ont acquis leurs lettres de noblesse, même si le nom de leur auteur n’est pas toujours mis en avant. «Il y a des écoles qui utilisent mes partitions, il y a des Français qui sont venus me voir et qui ont rapporté du matériel là-bas, j’ai plusieurs anciens étudiants, éparpillés un peu partout, qui en font et, parfois, je rencontre quelqu’un qui me dit, tout surpris: “Ah bon, c’est vous qui avez fait ça?”»

Dominique Olivier
Collaboration spéciale



 
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