Édition du 7 mars 2005 / volume 39, numéro 23
 
  Les herbiers, des trésors cachés
L’Université de Sherbrooke donne 75 000 spécimens de plantes vasculaires à l’UdeM

Les plantes sont toutes bien placées dans des chemises. Chaque couleur renvoie à une région ou à un pays. M. Hay s’est dit impressionné et réjoui par la qualité du classement des plantes, car il lui est déjà arrivé de recevoir de beaux spécimens dans un état plutôt lamentable.

L’herbier Marie-Victorin de l’Université de Montréal, logé au Jardin botanique, a reçu de l’Université de Sherbrooke environ 75 000 spécimens de plantes vasculaires provenant entre autres du Canada et des États-Unis. Ce don majeur fait suite à la décision de l’établissement sherbrookois de se départir de l’herbier constitué par Rolland-Germain, qui fut le plus proche collaborateur du frère Marie-Victorin, afin de le rendre plus accessible aux chercheurs.

Les 202 000 spécimens de cet herbier ont donc été répartis entre l’herbier Louis-Marie de l’Université Laval (qui a reçu la collection de plantes du Québec) et l’herbier Marie-Victorin. À l’heure actuelle, le don est entreposé au Centre des collections muséales de Montréal, où le traitement des spécimens se fera avant leur intégration à l’herbier de l’UdeM. L’ensemble du don sera à la disposition de la communauté scientifique d’ici six mois. Avec cet ajout, l’herbier Marie-Victorin contiendra plus de 900 000 spécimens pour la recherche et l’enseignement. Il sera le plus grand herbier universitaire du Canada.

Le transfert de la collection a pu se faire grâce à l’appui de la Faculté des arts et des sciences, du Jardin botanique et de l’Insectarium de Montréal.

Potentilles de l’ouest du Canada

L’herbier Marie-Victorin

Petite devinette: quel étudiant a obtenu le tout premier doctorat décerné par l’UdeM en sciences biologiques en 1923? Si vous avez répondu le frère Marie-Victorin, vous gagnez. Sinon, vous gagnez... à mieux le connaitre.

C’est à ce biologiste renommé qu’on doit l’herbier qui porte son nom et qui constitue la plus grande collection du genre au pays logée à l’Institut de recherche en biologie végétale (IRBV).

L’endroit est un sanctuaire de plantes, mais n’a rien de bucolique: les armoires sur rails serrées en rang d’ognons, dans ce qu’on appelle un compacteur, sont logées au sous-sol de l’IRBV, le bâtiment principal du Jardin botanique. Mais quand Stuart Hay extrait d’un cabinet un chardon de Mingan découvert par le fondateur de l’herbier, il sait qu’il manipule un spécimen d’une grande valeur patrimoniale. Sur l’étiquette qui accompagne le spécimen, le frère Marie-Victorin a inscrit les données concernant le lieu de découverte à l’archipel de Mingan de cette espèce aujourd’hui rare et menacée.

«Trop peu consultés, les herbiers sont néanmoins des bibliothèques de références indispensables. Ils recèlent une foule de trésors. Même à l’heure de la biologie moléculaire, ils n’ont pas perdu de leur utilité. Régulièrement, les chercheurs prélèvent des fragments de plantes séchées dont l’ADN permet de confirmer ou de corriger la classification au sein de différents groupes de plantes», confie à Forum le botaniste et conservateur adjoint.

Le conservateur adjoint Stuart Hay observe quelques-uns des spécimens qui se sont ajoutés à l’impressionnante collection qu’il gère. Derrière, on aperçoit une des 28 armoires constituant le nouvel arrivage en provenance de Sherbrooke; ces armoires seront installées dans une des salles du Centre des collections muséales de Montréal jusqu’à leur déménagement au Jardin botanique.

M. Hay, qui veille sur la collection depuis plus de 25 ans, consacre une grande partie de son temps à gérer les prêts faits aux chercheurs de partout dans le monde. S’il envoie souvent des spécimens précieux de la collection à des botanistes et écologistes des États-Unis, il emprunte également du matériel à d’autres universités pour les chercheurs de l’UdeM. «Un spécimen, c’est comme un livre. On peut le consulter sur place ou l’emprunter. D’où l’intérêt de regrouper les collections», estime M. Hay, qui rappelle que la richesse d’un herbier s’évalue notamment au nombre d’espèces appartenant à des groupes de plantes spécifiques ou issus de zones géographiques précises.

L’herbier du Département de sciences biologiques a une réputation internationale. Il compte de nombreux spécimens rares, dont les 8000 plantes que le frère Marie-Victorin a ramenées de Cuba. Il comprend aussi celles qu’Ernest Rouleau, son successeur à la tête de l’herbier, a rapportées de Terre-Neuve, les cypéracées de Marcel Raymond et les bryophytes de James Kucyniak, tous deux botanistes réputés du Jardin botanique de Montréal, et la collection personnelle de l’écologiste Pierre Dansereau.

Constituée au fil des ans par les botanistes de l’Université ou par des dons faits à l’établissement, la collection est rarement montrée au grand public. Mais les étudiants et les chercheurs de l’UdeM et d’ailleurs y ont accès et peuvent s’en servir comme objet d’enseignement, de recherche et de référence. «L’herbier sert à la recherche et à l’enseignement, résume Luc Brouillet. À chaque trimestre, au moins une dizaine d’étudiants en biologie des cycles supérieurs viennent consulter la collection.»

Des dons très appréciés

Le professeur et conservateur de l’herbier Marie-Victorin se réjouit du don récent effectué par l’Université de Sherbrooke à l’UdeM. «Des dons de cette ampleur d’un établissement qui décide de ne plus s’en occuper, ça n’arrive pas souvent», dit-il. N’empêche que des collections orphelines, l’IRBV en a beaucoup reçu de collèges et d’écoles qui ont fermé leurs portes ou qui n’entretiennent plus ces collections des sciences naturelles. D’autres fois, les collections universitaires sont léguées faute d’espace ou de chercheurs dans le domaine. C’est ainsi qu’en 1985 l’Université du Québec à Montréal a fait un don à l’UdeM d’environ 10 000 spécimens de plantes. Le Service de la faune et des parcs du Québec a fait de même en 1996. Plus récemment, le don de l’Université de Sherbrooke a permis d’enrichir la collection d’environ 75 000 plantes vasculaires.

Pour le plus grand plaisir des chercheurs et de la communauté scientifique, qui ont ainsi un meilleur accès aux spécimens.

Dominique Nancy



 
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