Édition du 21 mars 2005 / volume 39, numéro 25
 
  année internationale de la physique
L’électronique moléculaire: la révolution des plastiques

Moniteur vidéo couleur de 200 x 400 pixels fabriqué avec des plastiques semi-conducteurs

Les plastiques sont des matériaux normalement inertes qui sont très utilisés pour leurs propriétés mécaniques – force et souplesse. En général, ils sont aussi de bons isolants, c’est-à-dire qu’ils ne conduisent pas l’électricité. Mais cela est de moins en moins vrai. Le monde des hautes technologies est en train de vivre une petite révolution: il y a quelques années, on a découvert qu’il était possible de manipuler les plastiques de façon telle qu’ils se comportent comme des semi-conducteurs ou des métaux, les matériaux de base essentiels à la fabrication de tous ces gadgets électroniques qui agrémentent nos vies. Ce tout nouveau domaine de recherche, qui excite beaucoup les scientifiques, s’appelle «électronique moléculaire». Il n’est donc pas loin le moment où nous verrons des écrans de télévision et des panneaux solaires flexibles!

L’électronique moléculaire est la branche de l’électronique qui se consacre aux plastiques, également nommés «polymères» dans le jargon du métier. L’effervescence que l’on connait aujourd’hui résulte en grande partie d’une observation simple, mais lourde de conséquences, faite en 1990 par un groupe de chercheurs de l’Université de Cambridge, au Royaume-Uni: certains plastiques semi-conducteurs peuvent émettre de la lumière lorsqu’ils sont soumis à un courant électrique. Bien que l’efficacité de la conversion de l’électricité en lumière ait été faible, les chercheurs ont vite compris l’importance de leur découverte et ont fondé la compagnie Cambridge Display Technology Ltd. pour en exploiter tout le potentiel technologique. Depuis, chercheurs et industriels collaborent au développement de cette technologie, et les défis sont grands et nombreux.

Au cours des dernières années, les chercheurs ont accompli des progrès remarquables. Ils ont appris à mettre au point des dispositifs hautement efficaces en employant des polymères semi-conducteurs et métalliques en remplacement des traditionnels silicium, aluminium, cuivre, etc. Outre leur flexibilité, ces dispositifs ont le double avantage de couter moins cher et d’être plus faciles à fabriquer. Parmi les applications envisagées, à part les écrans flexibles (comme celui de la montre ci-dessus) et les panneaux solaires, mentionnons les fenêtres intelligentes et le papier électronique. Certains de ces produits sont déjà sur le marché!

Solutions de plastiques semi-conducteurs. Celles-ci ont été éclairées avec une lampe ultraviolette afin de stimuler l’émission de lumière visible.

Les plastiques semi-conducteurs, comme les autres plastiques, sont solubles dans une variété de solvants (et disponibles dans une variété de couleurs, comme le montre la photo), ce qui les rend intéressants à plusieurs égards. En particulier, les dispositifs peuvent être conçus en utilisant des méthodes d’impression à jets d’encre – une technologie bien établie dont les imprimantes de nos ordinateurs bénéficient –, où l’encre est remplacée par une solution du polymère qu’on souhaite déposer. La couleur de la lumière émise est déterminée par les propriétés moléculaires du plastique; il est donc aisé de séparer les couleurs et de fabriquer des pixels de toutes les couleurs voulues, particulièrement le rouge, le vert et le bleu.

Les chercheurs du Département de physique de l’UdeM étudient les phénomènes électroniques responsables de l’émission de lumière dans ces nouveaux matériaux grâce à des procédés aussi bien expérimentaux que théoriques. Ces phénomènes se produisent sur des échelles de temps extrêmement courtes – de l’ordre de la «picoseconde» ou un millionième de millionième de seconde – et il est donc nécessaire, pour les observer, d’avoir recours à des lasers puissants produisant des impulsions de très courte durée. Il devient ainsi possible de réaliser, à partir d’une série de «clichés», un film des évènements qui constituent l’excitation électronique, un peu à la manière d’une lampe stroboscopique qui permet de
décomposer le mouvement. Ce film ne gagnera peut-être pas d’Oscar, mais il captera certainement l’attention de la communauté scientifique!

Carlos Silva
Professeur adjoint
Chaire de recherche du Canada en optoélectronique supramoléculaire
Département de physique
Collaboration spéciale



 
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