Édition du 28 mars 2005 / volume 39, numéro 26
 
  Les tomates pour prévenir le cancer du pancréas
Licopène et bêtacarotène réduisent le risque de cancer du pancréas. Tomates, carottes, pommes de terre et épinards sont donc au menu

De belles tomates appétissantes, qui sont aussi bonnes pour la santé.

Le cancer du pancréas ne représente que deux pour cent de tous les cancers diagnostiqués, mais il arrive au quatrième rang mondial dans les décès par cancer. Il s’agit donc du cancer le plus mortel qui soit et pour lequel il n’existe aucun traitement. Au Canada, il est responsable de la mort de 16 000 hommes et de 17 000 femmes chaque année. Et le décès survient rapidement; le taux de survie n’est que de trois à six mois.

Si aucun traitement ne peut être prescrit, on peut toutefois assurer une certaine prévention. Selon une étude épidémiologique d’André Nkondjock et de Parviz Ghadirian, chercheurs à l’Unité de recherche épidémiologique du centre de recherche de l’Hôtel-Dieu (CHUM), un antioxydant présent dans la tomate, le licopène, aurait un effet préventif contre ce cancer. L’étude montre effectivement une corrélation entre consommation régulière de légumes riches en licopène et une diminution du risque de cancer du pancréas de l’ordre de 31 % chez les hommes.

Parviz Ghadirian

«Une baisse de 31 %, c’est très important vu le haut taux de morbidité de cette maladie. Même à 10 %, cela vaudrait la peine d’en ternir compte», souligne André Nkondjock.

La diminution s’est par contre avérée non significative chez les femmes, ce que les chercheurs expliquent par différentes causes possibles, comme les habitudes alimentaires, le mode de vie ou les hormones. «Il faut continuer les recherches pour en apprendre davantage puisque c’est la première fois qu’on établit un lien entre licopène et prévention du cancer du pancréas», précise Parviz Ghadirian, professeur au Département de nutrition de la Faculté de médecine.

Cette étude épidémiologique, effectuée auprès de 462 patients atteints du cancer du pancréas et de plus de 4700 cas témoins, est la plus vaste du genre jamais effectuée sur ce cancer puisqu’il est très difficile de trouver des survivants. Il a fallu mettre à contribution quatre centres de recherche et recueillir des données dans huit provinces canadiennes.

Licopène et bêtacarotène

Le licopène est un pigment rouge de la famille des caroténoïdes (dont on connait au moins 200 variétés) présent dans les légumes et fruits rouges ou orangés, comme les carottes, le pamplemousse rose et le melon d’eau. La tomate en est riche, ce qui fait qu’on le retrouve dans tous ses composés, sauce, pâte
et jus.

André Nkondjock

Mais pour maximiser l’absorption du licopène, il faut faire cuire le légume. «Le licopène est emprisonné dans une matrice moléculaire dont il est libéré par la cuisson, ce qui facilite son absorption», explique André Nkondjock.

Nous absorberions seulement 25 % du licopène d’un fruit ou d’un légume cru, mais de 80 à 90 % lorsque le végétal est cuit. Le professeur Ghadirian suggère d’associer tomates cuites et huile d’olive. L’effet antioxydant de ce caroténoïde a également été mis en évidence dans la prévention du cancer de la prostate.

La même étude a montré un autre effet préventif lié à un second caroténoïde, le bêtacarotène, contenu surtout dans les pommes de terre, les carottes et les épinards. Dans ce cas, la diminution du risque est de l’ordre de 43 % tant chez les hommes que chez les femmes, mais seulement chez les non-fumeurs. Il s’agit encore une fois de la première étude révélant cet effet préventif sur le cancer du pancréas.

Dans l’ensemble de l’échantillon, l’incidence du bêtacarotène n’est pas significative, ce qui veut dire que la présence de fumeurs et d’ex-fumeurs annule la corrélation. Autrement dit, le tabagisme neutralise l’effet préventif.

Il est toujours préférable de consommer vitamines et antioxydants à partir de légumes et de fruits entiers que de recourir aux suppléments vitaminiques et ceci vaut encore plus particulièrement pour le bêtacarotène. Plusieurs études on en effet démontré que cet antioxydant pris sous forme de suppléments était à proscrire dans certains cas, notamment chez les fumeurs.

Pour André Nkondjock, tout est affaire d’équilibre. Malgré les nombreux travaux que MM. Nkondjock et Ghadirian ont menés sur l’effet préventif de la consommation de légumes sur les cancers, aucun des deux n’est devenu végétarien pour autant. «Il faut consommer modérément plutôt que proscrire, déclare M. Nkondjock. Les protéines et minéraux de la viande sont nécessaires et, si l’on a une alimentation équilibrée et complète, l’organisme devrait avoir tout ce dont il a besoin.»

Daniel Baril



 
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