Édition du 4 avril 2005 / volume 39, numéro 27
 
  Développer la conscience phonologique chez l’enfant
Un nouveau logiciel éducatif s’adresse aux enfants de 4 à 8 ans

De 10 à 15 % des élèves du primaire auraient des difficultés d’apprentissage de la lecture. Selon Renée Béland, professeure à l’École d’orthophonie et d’audiologie, la principale cause de ces difficultés réside dans le manque de maitrise de la conscience phonologique.

«La conscience phonologique désigne l’habileté à découper les mots en sons, ce qui permet de manipuler les syllabes, d’en ajouter, d’en retrancher ou encore de comprendre les rimes», explique la professeure. Cette habileté va plus loin que la seule découverte des syllabes et comprend la notion de phonème, soit la plus petite unité du langage parlé incluant l’articulation des consonnes et qui est à la base du décodage de l’écriture (le mot maison, par exemple, comporte deux syllabes et quatre phonèmes).

«Cette conscience se développe normalement vers quatre ans et est essentielle à la lecture puisqu’elle est à l’origine de la transcription des sons, poursuit Renée Béland. Plus cette conscience est avancée et constitue un automatisme, plus les autres tâches de lecture seront facilitées. Mais certains enfants n’y sont pas parvenus à six ans, ce qui entraine pour eux non seulement des difficultés de lecture mais également des retards dans tous les autres apprentissages.»

Métafo

Pour favoriser le développement de la conscience phonologique, Renée Béland et deux orthophonistes, André Courcy et Marie-Catherine St-Pierre, ont conçu un logiciel éducatif destiné aux enfants de quatre à huit ans. Baptisé Métafo, l’outil pédagogique composé d’une vingtaine d’activités ludiques de niveaux de difficulté croissants permet de stimuler le développement de la conscience phonologique et s’adresse à tous les enfants, que ceux-ci éprouvent des difficultés dans l’apprentissage de la lecture ou pas.

Dans un exercice de premier niveau, l’enfant doit par exemple saisir si les mots entendus se terminent ou non par le même son. Dans un niveau plus avancé, l’enfant doit associer des lettres aux sons. Ces exercices mettent en scène quatre sympathiques humanoïdes sortis de quatre planètes imaginaires et qu’il faut aider dans l’accomplissement de tâches, comme remplir un bain de bulles ou bloquer la lave d’un volcan.

«Il existe peu de matériel didactique de ce genre sur le marché et le nôtre respecte toutes les caractéristiques des difficultés phonologiques du français, tels les sons qui lui sont propres, les syllabes et le nombre de phonèmes», précise Marie-Catherine St-Pierre.

«L’une des innovations de Métafo est que les mots utilisés sont des mots inventés; l’enfant peut donc se concentrer sur le son plutôt que sur le signifié, ajoute Renée Béland. Les mots sont tirés au hasard d’une banque de syllabes, ce qui permet à l’enfant de refaire les exercices avec des mots différents chaque fois.»

Thèse de doctorat

Métafo tire son origine de la thèse de doctorat d’André Courcy, réalisée en 2000. «Il voulait vérifier si certaines activités pouvaient susciter mieux que d’autres le développement de la conscience phonologique», indique Mme Béland.

Les chercheurs ont formé deux groupes d’enfants qui devaient effectuer des tâches mentales d’association, l’un à partir de signifiés représentés par des objets ayant des similitudes (par exemple un soleil et une banane de couleur jaune), l’autre à partir de sons sans signifiés comme dans le programme Métafo. Les enfants du second groupe ont développé une meilleure conscience phonologique et ceux d’entre eux qui, au départ, présentaient des difficultés ont atteint le niveau de performance des enfants sans difficulté en première année.

La mise au point d’un didacticiel à partir de ces résultats a nécessité trois ans de travail. Le programme qui en découle peut être employé dans les centres de la petite enfance, au préscolaire ou au primaire comme outil d’apprentissage ou de dépistage de difficultés de lecture. Il peut aussi servir à l’enseignement auprès d’élèves allophones peu familiarisés avec les sons français.

«Les parents, les orthophonistes ou les enseignants peuvent l’utiliser en fonction des troubles particuliers de l’enfant et celui-ci peut y naviguer par lui-même et à son propre rythme», souligne Marie-Catherine St-Pierre.

Conçu dans le laboratoire de Renée Béland, Métafo est commercialisé par Édu-Performance et en démonstration sur le site de l’entreprise (www.eduperformance.com).

Daniel Baril



 
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