Édition du 30 mai 2005 / volume 39, numéro 31
 
  Quand un fondamentaliste rencontre un radiologiste
De nouvelles technologies d’imagerie ultrasonore sont conçues au CHUM

La radiologiste Marie-France Giroux effectue des tests sur un patient bénévole avec une nouvelle technologie d’imagerie: l’élastographie vasculaire non intrusive. Cette technique d’imagerie utilise le phénomène de réflexion des ondes ultrasonores. Un faisceau ultrasonore, émis par une sonde, pénètre dans l’organisme où il subit de nombreuses réflexions. Ces ondes réfléchies sont recueillies par la sonde, puis numérisées, traitées et présentées sur un moniteur. 

En sept ans, les fonds obtenus par le Laboratoire de biorhéologie et d’ultrasonographie médicale au Centre de recherche du CHUM ont plus que quintuplé, passant de 150 000 $ à près de un million par année. Le nombre de publications a connu une évolution similaire, passant de huit en 1998-1999 à une vingtaine en 2004-2005. Le directeur, Guy Cloutier, attribue ce succès à la relation étroite qu’il entretient avec la pratique clinique.

Au cours des dernières années, M. Cloutier, aussi professeur-chercheur au Département de radiologie, radio-oncologie et médecine nucléaire de l’UdeM, a établi une collaboration fructueuse avec divers spécialistes du domaine médical, dont le Dr Gilles Soulez, radiologiste d’intervention et professeur-chercheur au CHUM. «C’est important d’être actif en recherche fondamentale, mais j’aime aussi allier
la recherche à la résolution de problèmes cliniques, déclare M. Cloutier. En y intégrant les préoccupations cliniques et leurs impératifs bien concrets, nous nous sommes orientés tout naturellement vers la valorisation de nos découvertes.»

Le Dr Gilles Soulez

Plusieurs nouvelles technologies d’imagerie ultrasonore et des outils de calibrage sont en cours d’élaboration au CHUM grâce à cette approche. Parmi les découvertes dont parle Guy Cloutier, celle relative à l’élastographie vasculaire non intrusive est l’une des plus avancées et la commercialisation des produits qui en découlent est envisagée à court terme. «Cette technologie, pour laquelle un brevet international a été déposé avec Univalor, a la propriété de caractériser les vaisseaux et la plaque d’athérosclérose, une maladie des artères dont les complications sont la plus grande cause de décès dans
le monde occidental, explique M. Cloutier. Appliquée aux vaisseaux carotidiens, elle permettrait de mieux évaluer les risques de rupture de plaques et ainsi de prévenir les accidents vasculaires cérébraux.»

Une image prévient mille maux

Pour éviter ce type d’accident ainsi que les thromboses et les infarctus, les médecins ont actuellement à leur disposition l’imagerie par résonance magnétique (IRM), les appareils à ultrasons de type Doppler et la tomodensitométrie axiale. «Grâce à l’IRM, il est possible d’évaluer le degré d’occlusion vasculaire et aussi de caractériser la plaque athéromateuse, indique le Dr Soulez. Toutefois, cet examen est très couteux. Les autres technologies, telles que l’angiographie et l’échographie endovasculaire, ne permettent de connaitre que le degré d’occlusion des artères et elles sont invasives. Elles comportent donc des risques pour le patient.» «L’élastographie vasculaire, basée sur l’imagerie ultrasonore, fournit des renseignements cruciaux pour le diagnostic et le suivi des patients, renchérit Guy Cloutier. Par exemple, on peut déterminer les caractéristiques biomécaniques de la plaque d’athérosclérose ainsi que sa stabilité, ce que l’IRM ne révèle pas.»

Des éléments d’information d’autant plus importants qu’ils permettent aux médecins de mesurer plus efficacement les risques de rupture de la paroi qui pourraient entrainer l’obturation complète, et souvent fatale, des vaisseaux sanguins. C’est ce qui fait dire aux chercheurs que l’élastographie vasculaire pourrait bientôt devenir plus performante que l’IRM pour certaines pathologies.

Outre ces avantages, le Dr Gilles Soulez fait valoir la rentabilité de cette technologie. «Un appareil d’IRM coute environ trois millions et permet le diagnostic de 15 à 20 patients par jour, à 650 $ l’examen. À cela, il faut ajouter au minimum 300 000 $ par année en frais d’exploitation. Le prix d’un appareil à ultrasons varie de 250 000 à 300 000 $ et permet le diagnostic de 40 patients quotidiennement avec le soutien d’un seul opérateur comparativement à l’IRM, qui nécessite deux techniciens et un radiologiste. Faites le calcul!»

Un fondamentaliste avec le sens des affaires

Guy Cloutier

Ingénieur électrique de formation, M. Cloutier, qui a fait sa maitrise et son doctorat à l’École polytechnique, a été engagé en 2001 à titre de professeur par le Département de radiologie, radio-oncologie et médecine nucléaire de l’Université, où l’on cherchait à établir une collaboration plus étroite entre chercheurs et cliniciens. «J’ai été le premier fondamentaliste recruté comme professeur par ce département clinique», signale le chercheur âgé de 43 ans qui ne s’intéresse à la valorisation que depuis peu. Mais à en croire un reportage publié dans le bulletin d’Univalor, «M. Cloutier est d’une redoutable efficacité», affirme Anne-Marie Larose, conseillère en valorisation, secteur des sciences de la vie, au sein de cette société de gestion spécialisée dans le transfert technologique. 

Aujourd’hui, cinq des nouvelles technologies ultrasonores mises au point par Guy Cloutier, le Dr Soulez et plusieurs autres membres du Laboratoire de biorhéologie et d’ultrasonographie médicale sont à l’étape de la valorisation. L’amorce des multiples projets de recherche de M. Cloutier et son équipe a pu se faire grâce au programme d’imagerie vasculaire de Valorisation-Recherche Québec.

Le directeur du Laboratoire, qui se félicite de la bonne entente entre chercheurs et cliniciens, tient à souligner l’efficacité d’Univalor et le travail de son équipe: outre le Dr Soulez, on note la participation des chercheurs Rock L. Maurice, Marie-Hélène Roy Cardinal et Jean-Luc Gennisson, du CHUM, ainsi que des co-inventeurs de certaines technologies, dont Jacques Ohayon, de l’Université de Grenoble, et Jean Meunier, professeur au Département d’informatique et de recherche opérationnelle de l’UdeM, et les radiologistes d’intervention du CHUM Marie-France Giroux et Éric Therasse.

Dominique Nancy



 
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