Santé publique
Deux fois plus de diabète chez les autochtones de Kahnawake

Chaque jour de consultation, la Dre Ann Macaulay traite des personnes atteintes de diabète dans son cabinet de la communauté mohawk de Kahnawake, sur la rive sud de Montréal. «Ici, des gens meurent de crises cardiaques à l'âge de 50 ans à cause du diabète. Ce n'est pas acceptable à notre époque», dit le médecin qui fréquente les habitants de cette communauté depuis trois décennies. Lorsqu'elle se rend dans les classes des écoles primaires et qu'elle demande qui a des frères, sœurs ou parents diabétiques, tous les élèves lèvent la main. «Le diabète touche 12 % des autochtones de Kahnawake. Deux fois plus que dans la population en général. C'est un problème de santé publique grave», affirme Louise Potvin, titulaire de la Chaire sur les inégalités de santé de l'Université de Montréal et chercheuse au Groupe de recherche interdisciplinaire en santé. Avec la Dre Macauley et deux autres universitaires, ainsi que des partenaires autochtones, elle s'occupe du Kahnawake Schools Diabetes Prevention Program (KSDPP).

«Ma propre mère souffrait de diabète et l'on ne le savait même pas, lance Alex McComber, responsable de la formation pour le KSDPP et membre de la communauté mohawk de Kahnawake. Depuis longtemps, nous voyons des gens mourir à cause du diabète, mais nous ne faisons pas le lien avec nos habitudes de vie, typiquement nord-américaines.»

Heureusement, les choses changent. Depuis 1994, des intervenants formés par l'équipe du programme de prévention font la tournée des écoles pour expliquer que la maladie peut être évitée par une saine alimentation et la pratique d'activités physiques. «En sensibilisant les enfants, on touche indirectement toute la famille, car ils y transfèrent leur apprentissage», dit Louise Potvin.

Une prédisposition génétique pourrait expliquer en partie l'incidence élevée du diabète chez les descendants des Premières Nations. La sélection naturelle les aurait amenés à hériter d'une bonne capacité à accumuler les graisses dans leurs tissus. Cette particularité métabolique leur aurait permis de survivre aux périodes de disette quand la nature se montrait moins généreuse. Mais cette hypothèse - contestée - du «gène économique» (thrifty gene) n'explique pas tout. La sédentarité et une alimentation trop portée sur les lipides ont créé des conditions propices à la propagation du diabète. Rappelons que cette maladie attaque le pancréas et peut mener à des complications comme l'hypertension, la neuropathie et l'infection des reins. Les cas les plus graves entraînent la cécité ou l'amputation des membres lorsque la circulation sanguine est bloquée. Il ne faut pas confondre cette maladie avec le diabète infantile, qui n'est pas dû à de mauvaises habitudes de vie mais à des faiblesses congénitales au pancréas.

Membres de la grande famille des Iroquois, les ancêtres des Mohawks de Kahnawake étaient des agriculteurs qui complétaient leur alimentation avec les produits de la chasse, de la pêche et de la cueillette. Ils mangeaient donc des haricots, des courges, du maïs et d'autres légumes bien avant que le Guide alimentaire canadien les recommande.

Chercheur : Louise Potvin
Téléphone : (514) 343-6142
Financement : Conseil de recherches en sciences humaines, Santé Canada, dons privés

 


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