Psychiatrie

Tuer ses parents : un geste imprévisible

Le 22 mars 2000, un adolescent d’Arundel, dans les Laurentides, tue sa mère dans le sous-sol de la demeure familiale, puis se rend à l’atelier de travail où se trouve son père, qu’il assassine par la suite. Au procès, ses anciens amis sont médusés. Le jeune homme (que la loi interdit de nommer), était «pacifique et doux» et n'avait apparemment jamais parlé contre ses parents. Un témoin a même dit que son copain «détestait la violence».

Selon Jacques Marleau, chercheur à l’institut Philippe-Pinel de Montréal, affilié à l’Université de Montréal, l’adolescent qui tue l’un ou l’autre de ses parents a en général moins d’antécédents psychiatriques et violents que l’adulte qui commet un tel acte. Le jeune habite généralement au domicile familial et agresse plus souvent que le meurtrier adulte les deux parents à la fois. De plus, selon les résultats d’une étude sur les parricides récemment présentée à Amsterdam, les victimes des jeunes parricides sont beaucoup moins nombreuses à établir des limites à l’égard de leur enfant. «Ces adolescents tentent de manière radicale d’échapper à l’emprise parentale et, parfois, à des violences sexuelles ou physiques de longue date», souligne M. Marleau.

Mais ce n’est pas toujours le cas. Selon ce spécialiste des homicides intrafamiliaux, auteur d’une thèse de doctorat déposée récemment à l’Université de Montréal, certains jeunes souffrent, à l’instar des adultes parricides, d’une pathologie psychiatrique sévère. «La schizophrénie paranoïde chez les adultes n’étant pas toujours diagnostiquée et médicamentée, ils passent à l’acte pendant un épisode psychotique. Ce type de meurtre est souvent caractérisé par le phénomène d’over killing. La victime recevra, par exemple, 47 coups de couteau.»

Le chercheur a remarqué que les parricides de moins de 18 ans sont moins troublés sur le plan psychologique que les meurtriers plus âgés. Leur passage à l’acte est plus imprévisible, compte tenu que les troubles de la personnalité dont ils sont atteints sont rarement reconnus par les parents. Contrairement aux adultes, leur crime est par ailleurs généralement commis sans avoir été précédé de menaces de mort. Les motifs qui conduisent à tuer l’un ou les deux parents sont variés : troubles de la personnalité, psychose, inceste, jalousie, altruisme, acte réactionnel, perte financière, etc. Dans la plupart des cas, «9 fois sur 10», affirme M. Marleau, l’assassinat est perpétré par un jeune adulte de sexe masculin. «La littérature scientifique rapporte seulement 38 cas de femmes parricides dans le monde.»

Pour parvenir à ces résultats, Jacques Marleau a extrait, avec l’aide de deux cliniciens de l’institut Philippe-Pinel de Montréal, la criminologue Nathalie Auclair et le psychiatre Frédéric Millaud, de l’information pertinente des dossiers de 53 patients hospitalisés au centre psychiatrique entre 1973 et 1999 et qui ont commis un parricide. Les analyses comparatives entre les sujets démontrent l’existence de profils distincts non seulement chez les adultes et les adolescents de l’échantillon, mais aussi entre ceux qui ont tué ou tenté de tuer un de leurs parents.

Chercheur : Jacques Marleau
Téléphone : (514) 648-8461, poste 627
Courriel : marleauj@videotron.ca

 


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