Environnement

Les pesticides influent sur la fertilité masculine

Les hommes exposés à la dioxine engendrent plus de filles. C’est ce que révèle une étude menée en Russie auprès de travailleurs exposés à des pesticides contenant de la dioxine : l’herbicide 2, 4, 5-T et un biocide, le chlorophénol. L’exposition à ces produits de la famille des organochlorés a eu lieu dans une usine agrochimique active de 1961 à 1988, dans la ville de Ufa. Tandis que naissent 106 garçons pour 100 filles dans la population de cette région, le ratio tombe à 54 garçons pour 100 filles chez les descendants des travailleurs de l’usine. « Ces données sont semblables à celles de Seveso, en Italie, où une diminution du nombre de naissances de garçons par rapport à celui des filles a été observée chez les individus fortement contaminés aux dioxines et aux furannes lors de l’exposition accidentelle de juillet 1976 », signale le professeur Gaétan Carrier, dont les travaux ont fait l’objet d’une publication récente dans la revue Environmental Health.

De l’incendie de BPC de Saint-Basile-le-Grand à l’étude des émanations de l’incinérateur Des Carrières, en passant par la contamination au plomb et les effets des champs électromagnétiques, M. Carrier a été de tous les dossiers chauds en matière d’environnement au cours des 20 dernières années au Québec. En proposant un modèle mathématique d’analyse de risques dans sa thèse de doctorat, il a tracé la voie à une révision des normes gouvernementales relatives à la protection de la santé environnementale. C’est d’ailleurs grâce à ce modèle mathématique qu’il a pu évaluer, même plusieurs années plus tard, le rapport entre l’exposition aux dioxines et furannes et le ratio du sexe des enfants engendrés par les ouvriers d’Ufa. En collaboration avec les chercheurs Zarema Amirova du Centre de protection de l’environnement à Ufa, et John Jake Ryan, de Santé Canada, le titulaire de la Chaire en analyse des risques toxicologiques pour la santé humaine de l’Université de Montréal a étudié l’effet sur la santé de divers types de dioxines en analysant 84 échantillons de sang de deux cohortes de travailleurs exposés, comprenant 150 hommes et 48 femmes. Les résultats révèlent une concentration chimique moyenne 30 fois plus élevée chez ces travailleurs que dans la population de la région. La proportion de naissances de sexe mâle (40 % de garçons et 60 % de filles) était bien inférieure à celle de la ville d'Ufa et d’autres agglomérations ailleurs dans le monde. « Normalement, on s’attend à ce que ces taux soient respectivement de 51 % et de 49 % », souligne le chercheur.

Mais plus curieux encore est le résultat obtenu selon le sexe du parent exposé au contaminant. « Nous avons observé une diminution du nombre de garçons chez les pères exposés alors qu’il est stable pour les mères exposées. » Comme dans le cas de Seveso, l'exposition à des niveaux élevés de dioxines est associée à la naissance de plus de filles, mais seulement pour les enfants dont le père a été exposé. Ce phénomène d’« œstrogénisation » de la progéniture associée à l’exposition aux organochlorés n’est pas propre à l’être humain. Dans un écosystème comme la rivière des Prairies, au nord de Montréal, des biologistes ont noté jusqu’à 70 % plus de femelles parmi les mollusques et les poissons.

Chercheur : Gaétan Carrier
Téléphone : (514) 343-6111, poste 3108
Courriel : gaetan.carrier@umontreal.ca

 

Autres articles de ce numéro :

Psychologie
Heavy metal et dépression

Affaires
Liquidez votre entreprise et encaissez des millions

Santé
Les tatouages temporaires présentent des risques

 


Archives | Communiqués | Pour nous joindre | Calendrier des événements
Université de Montréal, Direction des communications et du recrutement