Édition du 9 juin 2003 / volume 37, numéro 24
 
  L’architecture de l’espace
L’expertise en conception assistée par ordinateur de l’École d’architecture mise à profit pour la Station spatiale internationale.

Giovanni De Paoli (à gauche) et Temy Tidafi considèrent que la pause actuelle dans le programme de recherche spatiale permet de pousser la réflexion sur les projets de recherche sans être pressé par le temps.

Après le temple égyptien de Karnak, c’est à la station orbitale que s’attaquent les chercheurs du Groupe de recherche en conception assistée par ordinateur (GRCAO) de l’École d’architecture. L’Agence spatiale canadienne a en effet invité le GRCAO à collaborer aux projets de recherche du Canada dans l’espace en mettant au service de ces projets le puissant logiciel de conception, le système SGDL, élaboré par le Groupe.

Le système SGDL a déjà fait ses preuves sur la scène internationale, notamment en permettant la modélisation des méthodes de construction utilisées dans l’édification du temple de Karnak, en Égypte (voir Forum du 29 janvier 2001 sur iForum). Ce système avait également fait la renommée du GRCAO grâce à la réalisation d’une maquette virtuelle du centre-ville de Montréal et de la colline parlementaire à Québec.

«Les connaissances acquises au moyen d’un outil conçu pour l’architecture et l’aménagement urbain pourront être appliquées au contexte de la recherche spatiale», souligne Giovanni De Paoli, professeur à l’École d’architecture et directeur du projet.

La mise en veilleuse du programme de recherche spatiale depuis la destruction de la navette Columbia ne démotive pas le chercheur. «Le temps d’arrêt actuel crée au contraire un moment propice pour poursuivre la réflexion sur les travaux sans que nous soyons pressés par le temps», fait-il valoir.

Collaboration scientifique et médiatique

La collaboration entre le GRCAO et l’Agence spatiale canadienne vise des objectifs à la fois scientifiques et médiatiques. Sur le plan scientifique, les chercheurs doivent mettre au point des assistants informatiques capables notamment de reproduire en trois dimensions les conditions de vie et de travail à l’intérieur de la station spatiale ainsi que les opérations extérieures effectuées par le «bras canadien».

Le bras canadien manipulant un module de la Station spatiale internationale, tel que Frédéric Armenjon, ancien stagiaire au GRCAO, l’a modélisé. Le logiciel SGDL permet de visualiser les zones d’interface et les mouvements du bras en plus de prévoir les risques de collision.

Ce travail nécessite la modélisation complète de la station de même que celle des bras robotisés qui auront à manipuler, assembler et entretenir les différents modules de la station. Le système pourra également servir dans des simulateurs destinés à l’entraînement des astronautes.

La demande inclut en outre une adaptation de l’animation des bras télémanipulateurs afin de constituer, sur le Web, une vitrine technologique pour l’Agence spatiale canadienne.

Le système doit être en mesure de fournir des formes parfaites en trois dimensions, de prévoir les risques et les conséquences de collisions entre les pièces en mouvement et faire en sorte que la station et la Terre puissent échanger des données très complexes de façon très rapide.

«Notre système est capable de répondre à ces attentes parce qu’il modélise non seulement le résultat définitif et apparent d’une construction, mais aussi la façon dont l’objet est construit», explique Temy Tidafi, directeur du GRCAO.

Le système SGDL comprend toutes les données sur la fabrication des différents éléments de la station, leurs structures, leur volume et les propriétés des matériaux utilisés. Contrairement aux logiciels traditionnels, le SGDL n’affiche pas une image selon une animation déjà programmée, mais recalcule en temps réel et gère lui-même l’action selon la commande demandée (rotation, perçage, retranchement, plan rapproché, etc.).

Le moteur peut donc modifier un objet à volonté selon les diverses situations qui se présentent. L’objet étant décrit mathématiquement plutôt que dessiné, une image à très haute résolution peut n’occuper que 5 K de mémoire. «Même en grossissant indéfiniment l’objet, l’image est toujours parfaite et l’on n’atteint jamais le pixel», souligne Temy Tidafi.

Avec un tel outil, les astronautes ou les techniciens pourront savoir, par exemple, quelle partie du bras est visible par un hublot, où et quand le bras projette une ombre, quelles sont les pièces où il y a contact entre le bras et un module, entre le mécanisme d’arrimage et la navette, prévoir les conséquences d’une modification de l’habitacle ou d’une collision possible entre le bras, la navette et la station, ou encore suivre le déplacement d’un objet laissé libre à l’intérieur de la station.

Le projet de recherche devrait se poursuivre jusqu’en juin 2006.

Daniel Baril



 
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