Édition du 28 mars 2005 / volume 39, numéro 26
 
  Quand le folklore rencontre le classique
Deux étudiants d’origine russe connaissent le succès avec leur musique traditionnelle juive

Airat Ichmouratov et Elvira Misbakhova

Lorsque Airat Ichmouratov et Elvira Misbakhova ont commencé à jouer de la musique traditionnelle juive dans le métro de Montréal, ils étaient bien loin de se douter qu’à peine trois ans plus tard ils se produiraient à la Place-des-Arts avec l’Orchestre symphonique de Montréal!

«Nous nous sommes vite rendu compte de l’attrait qu’exerçait cette musique sur le public québécois, surtout par une belle journée d’été, rue Sainte-Catherine, lorsque nous avons vendu 80 exemplaires de notre premier disque en deux heures», se rappelle Elvira.

Couple dans la vie et tous deux étudiants à la Faculté de musique, Airat Ichmouratov, clarinettiste, et Elvira Misbakhova, violoniste et altiste, font partie du groupe de musique klezmer Kleztory, qui compte également un contrebassiste, un guitariste et un accordéoniste.

Le premier disque du groupe – enregistré avec peu de moyens – fera son chemin jusque dans
la voiture de Yuli et Eleonora Turovsky. Elvira étudie avec Mme Turovsky, qui est membre d’I Musici de Montréal; Yuli Turovsky est le chef et le directeur artistique de l’orchestre de chambre.

«Un jour, Elvira est revenue de son cours en compagnie de Mme Turovsky. Elle m’a dit de m’asseoir, puis m’a annoncé que Yuli Turovsky souhaitait qu’I Musici enregistre un disque avec Kleztory, raconte Airat. C’était véritablement un projet unique, car jamais un ensemble de musique klezmer n’avait fait de disque avec un orchestre de musique classique.»

L’album, intitulé Klezmer, a été favorablement jugé à l’échelle internationale et, depuis, Kleztory s’est produit en concert avec I Musici à plusieurs reprises. Un critique a même écrit, après l’un de ces concerts, que Kleztory avait «éclipsé» le réputé orchestre de chambre! Le 20 mars, le groupe était l’invité de l’OSM dans le cadre de sa série pour jeune public «Jeux d’enfants».

De Kazan à Montréal

Originaire de Kazan, en Russie, Airat Ichmouratov a eu l’idée de venir étudier à l’Université de Montréal lorsqu’il a rencontré le clarinettiste André Moisan, professeur à la Faculté de musique, au cours d’un stage d’été au Centre d’arts Orford. Il est arrivé à l’UdeM en 1998 et Elvira est venue l’y rejoindre un an plus tard.
«Quand je suis descendu de l’avion à Montréal, je me suis dit que c’était exactement le genre d’endroit que je recherchais, se souvient Airat. Après tout, ce n’est pas très dépaysant. Nous retrouvons ici le même paysage et sensiblement le même climat que chez nous.»

Après avoir obtenu sa maitrise en interprétation (clarinette) auprès d’André Moisan, il entreprend un doctorat en direction d’orchestre avec les chefs Jean-François Rivest et Paolo Bellomia, tout en fondant un autre groupe, le trio Muczynski. Le trio enregistre un disque et remporte, en septembre dernier, le premier prix d’un concours international à Cracovie. 

Même si Airat et Elvira jouaient dans plus d’un orchestre à Kazan, ils considèrent que la nouvelle vie qu’ils se sont bâtie au Canada leur offre beaucoup plus de possibilités en tant que musiciens. Ils mentionnent, entre autres, les subventions qu’offrent les gouvernements pour enregistrer des disques ou participer à des concours internationaux, plus nombreuses et plus accessibles qu’en Russie, disent-ils. «Au moins, ici, un musicien peut avoir un avenir», observe Elvira.

Et, sans le vouloir, le couple semble recruter certains de ses compatriotes. On retrouve actuellement à la Faculté de musique une vingtaine d’étudiants originaires de Russie, ce qui facilite les choses lorsque vient le temps de former des ensembles. Pour l’un des récitals prévus au programme de doctorat d’Elvira, le couple a réussi à constituer un orchestre de 60 musiciens l’hiver dernier. Airat a dirigé les musiciens et Elvira a interprété avec l’orchestre un concerto pour alto... composé par son mari! En février, le couple est retourné à Kazan en tant que soliste et chef invités. Il a présenté la même œuvre avec l’Orchestre symphonique de l’État du Tatarstan.

«Je n’aurais jamais pu aspirer à diriger un orchestre de cette envergure si je n’étais pas parti étudier à l’étranger, estime Airat. On ne m’aurait jamais donné la chance de faire mes premières armes.»
Le prochain objectif d’Airat? Rien de moins que diriger Le sacre du printemps, de Stravinski, œuvre majeure du répertoire symphonique. Puis, à l’automne, il entend entreprendre une maitrise en composition...

Julie Fortier
Collaboration spéciale

Pour en savoir plus sur l’ensemble Kleztory: <www.kleztory.com>.



 
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