Bulletin sur les recherches à l'Université de Montréal
 
Volume 5 - numÉro 2 - FÉvrier 2006
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Droit

Les connaissances autochtones doivent être mieux protégées

Le droit international est incapable de protéger convenablement les connaissances traditionnelles des autochtones. Les organismes internationaux devraient sans tarder rédiger un traité pour les préserver avant qu’elles soient détournées à des fins commerciales.

Voilà l’opinion de Konstantia Koutouki, professeure à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, qui a déposé récemment sa thèse sur le droit des autochtones en matière de propriété intellectuelle. Elle fait valoir qu’il existe déjà des accords internationaux destinés à protéger les brevets et inventions des grandes entreprises. Pourquoi ne pas en faire autant pour le savoir ancestral des 300 millions d’autochtones et des populations isolées qui ont élaboré des remèdes traditionnels à partir de plantes aux propriétés curatives?

Mme Koutouki dit que les accords comme celui de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) sur la propriété intellectuelle, baptisé «Aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, ont un pouvoir démesuré en comparaison de l’entente multilatérale supposée sauvegarder les droits des autochtones, qu’elle qualifie de « sans dents ». Là où l’on s’approche le plus d’un mécanisme de protection des connaissances indigènes, c’est dans la Convention sur la biodiversité, mais le document légal est difficile à modifier, ce qui vulnérabilise les autochtones. Leurs connaissances ancestrales risquent ainsi d’être exploitées commercialement sans qu’ils puissent en tirer des bénéfices. « Même si cette convention reconnait les droits des autochtones, elle ne leur accorde pas une grande place à côté des autres enjeux comme les semences ou les lignées d’ADN. »

Un triste exemple de ce qui attend les autochtones en cette matière est l’histoire de la semence du margousier, un astringent naturel découvert par les fermiers indiens et qui est utilisé par les médecins traditionalistes de l’Inde depuis 200 ans. Des firmes américaines et japonaises se sont emparées de cette plante et ont déposé une douzaine de brevets. Aujourd’hui, des dérivés de margousier sont ajoutés à des dentifrices et à des insecticides. Des militants indiens dénoncent le fait que les brevets ne reconnaissent pas les efforts de leur pays pour avoir mis au jour les propriétés thérapeutiques et agricoles de la plante. Ils ont déposé une plainte à l’OMC contre « l’harmonisation des lois sur la propriété intellectuelle ». De plus, la commercialisation du margousier a eu pour résultat que les fermiers indiens doivent à présent payer plus cher leurs semences de la plante.

Mme Koutouki estime que les peuples indigènes ont bien peu de pouvoir pour s’opposer aux grandes compagnies pharmaceutiques qui décident d’exploiter leurs connaissances ancestrales. Plusieurs des communautés concernées sont reculées et parlent des langues vernaculaires, lorsqu’elles ne sont pas analphabètes. Difficile alors de négocier avec les porte-paroles des multinationales qui frappent à leur porte. « C’est pourquoi la responsabilité de protéger leurs droits revient à l’État », mentionne la doctorante. Elle-même d’origine grecque, Konstantia Koutouki est très sensible au sort réservé à ces petites communautés. Elle a eu l’occasion d’en visiter quelques-unes, notamment au Costa Rica et en Bolivie, où elle a été témoin de certaines aberrations.

 

 

Chercheuse :

Konstantia Koutouki

Courriel :

konstantia.koutouki@umontreal.ca

Téléphone :

(514) 343-6111, poste 1-0749

Financement :

Centre de recherche en éthique de l’Université de Montréal



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