Bulletin sur les recherches à l'Université de Montréal
 
Volume 6 - numÉro 2 - FÉVRIER 2007
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Génétique

Une généticienne s’attaque à un médicament potentiellement mortel

Les statines sont une classe de médicaments utilisés depuis les années 80 pour diminuer le taux de cholestérol chez les personnes atteintes d’hypercholestérolémie et qui risquent de subir un accident cardiovasculaire. Même si son action bénéfique a été démontrée par plusieurs études cliniques, la statine provoque des effets secondaires désagréables chez 10 % des patients, principalement des douleurs musculaires très aigües aux jambes. Et, dans certains cas rares (moins de 1 % des utilisateurs de statine), une réaction potentiellement mortelle appelée rhabdomyolyse peut se produire. « Cette réaction est due à une intolérance à la molécule active, explique la généticienne Marie-Pierre Dubé, de l’Institut de cardiologie de Montréal et de l’Université de Montréal. La compagnie Bayer a d’ailleurs dû retirer le Cerivastatin du marché à cause de cet effet secondaire. »

Comment faire en sorte que la statine puisse rendre service sans entrainer d’effets secondaires et sans mettre la vie des patients en danger ? C’est ce qu’une recherche actuellement en cours veut explorer. Mais la particularité de cette recherche clinique est qu’elle se fait à partir des gènes. « On veut découvrir le phénotype des patients les plus à risque. Cette information nous permettra de mieux intervenir sur le plan pharmacologique. C’est ce qu’on appelle de la pharmacogénomique », précise Mme Dubé, rattachée au Département de pharmacologie de la Faculté de médecine.

Pour les besoins de cette recherche, un millier de patients ont déjà été recrutés. On en réunira 4000 (en plus des 1000 sujets qui ne souffrent pas de l’effet secondaire et constituant le groupe témoin) avant de procéder à l’analyse définitive des résultats. « Nous n’avons pas attendu le dernier patient pour nous mettre au travail, signale Mme Dubé. Nous savons déjà vers quels gènes nous diriger. » Les patients sont originaires principalement de la région montréalaise et du Saguenay-Lac-Saint-Jean, où les causes génétiques des effets secondaires seront plus faciles à cerner en raison de l’effet fondateur.

Pour ce projet de recherche supervisé par deux professeurs de l’Université de Montréal (Jean-Claude Tardif et Michael Phillips) et mené au Centre de pharmacogénomique de l’UdeM situé à l’Institut de cardiologie, la contribution essentielle de la statisticienne en génétique Marie-Pierre Dubé consiste à trouver la façon d’aller le plus directement possible vers le ou les gènes concernés. « Dans le génome, il y a des millions de fausses pistes. Mon travail se résume à faire le tri entre le bruit et le vrai signal », mentionne-t-elle. Deux objectifs sont poursuivis : désigner des biomarqueurs qui indiqueront la toxicité du traitement, puis élaborer un test génétique pour évaluer le risque chez les patients prédisposés aux effets délétères de la médication.

Après avoir fait un postdoctorat en épidémiologie génétique à l’Université de Toronto, Mme Dubé a travaillé dans l’industrie pharmaceutique pendant quatre ans avant d’accepter un emploi à l’Université de Montréal. « Je suis passée du côté obscur de la force », ironise-t-elle en faisant référence au monde manichéen de La guerre des étoiles. Mais elle est revenue grandie de son expérience dans le milieu pharmaceutique, affirme-t-elle. « Dans le privé, on apprend à penser en fonction de brevets, d’applications et d’efficacité. » Chez Xenon Pharmaceuticals, où elle était chef du secteur de la statistique génétique, elle a contribué à des percées majeures dans les domaines du traitement de la dyslipidémie et du contrôle de la douleur. L’équipe de recherche qu’elle a mise sur pied à l’Institut de cardiologie (affilié à l’Université de Montréal) compte quatre personnes en plus des étudiants aux cycles supérieurs. Ses travaux portent sur l’épidémiogénétique, les statistiques pharmacogénétiques, les réponses adverses aux médicaments chez les enfants, l’étude de la comorbidité de la dépression et des maladies cardiovasculaires et la pharmacogénomique des médicaments hypolipidémiants.

 

Chercheuse :

Marie-Pierre Dubé

Courriel :

marie-pierre.dube@statgen.com

Téléphone :

514 376-3330, poste 1-2298

Financement :

Fonds de la recherche en santé du Québec, Génome Québec, Génome Canada




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