Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 2 - 6 septembre 2005
 Sommaire de ce numéro
 Archives de Forum

Capsule science

Quelle est la raison d’être des initiations?

Tant qu’il y aura des universités, il y aura des initiations. Mais quelle est la raison d’être profonde de ces activités qui semblent faire partie des mœurs universitaires au même titre que la remise des diplômes?

«L’initiation universitaire est un rituel et le rituel vise à signifier de façon publique son appartenance à un groupe, explique Robert Crépeau, professeur au Département d’anthropologie. Dans son aspect carnavalesque, l’initiation exagère et grossit des comportements ou des traits particuliers afin de bien marquer la signification de l’évènement.»

Cette définition vaut tout autant pour le rituel religieux que pour le rituel politique ou purement social. Accepter l’initiation, c’est donc accepter d’intégrer le groupe et de s’y identifier, ce qui explique pourquoi le refus de participer aux initiations est souvent mal perçu. Comme tout rituel d’appartenance, l’initiation universitaire a lieu en public parce que le groupe social (ici la société tout entière) est pris à témoin de la fidélisation envers le groupe.

«L’initiation donne également la prérogative aux anciens d’insérer les nouveaux dans la hiérarchie du groupe», poursuit le professeur. De cette façon, chacun est à sa place et l’ordre social est maintenu.

«Un des éléments qui caractérisent l’initiation universitaire est d’ailleurs la soumission des nouveaux, relève l’ethnologue. Cette soumission marque la reconnaissance de l’autorité de la collectivité à laquelle on veut appartenir.»

De plus, comme chacun le sait, initiations universitaires et alcool vont souvent de pair. Cet aspect a de tout temps fait partie des activités rituelles. «Dans les sociétés plus traditionnelles, on recourt au jeûne, au froid, aux substances hallucinogènes ou aux privations de toutes sortes pour altérer l’état de conscience. Cet état de conscience altéré est réputé mettre le néophyte en contact avec les esprits ancestraux et en relation avec la tradition de son groupe.»

Les arrosages de nos initiations modernes pourraient être considérés comme une dérive de cette recherche d’états altérés de conscience, qui conduisent plutôt aujourd’hui à des «états éthérés» de conscience!

En misant sur le sens de la loyauté à l’égard du groupe, l’explication de Robert Crépeau rejoint celle de l’anthropologie évolutive, qui explique le rituel religieux ou social comme étant l’acceptation du prix à payer pour bénéficier des avantages liés au fait d’appartenir à un groupe. Une disposition qui ferait partie des habiletés sociales de l’être humain et qui permet de vérifier la fidélité du nouveau membre.

«Le rituel comporte effectivement un cout, reconnait le professeur Crépeau, mais le bénéfice de l’appartenance est généralement supérieur au prix à payer.»
Un diplôme qui ouvre la porte à une profession vaut bien une petite parade costumée dans les rues du quartier!

Daniel Baril

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