Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 2 - 6 septembre 2005
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 Archives de Forum

Un écran de télé sur votre chemise!

William Skene travaille sur des polymères aux propriétés étonnantes

William Skene et son étudiant ont appris à jouer avec les couleurs.

Imaginez un écran autonome ultrafin et flexible comme du papier, qu’on peut transporter partout avec soi, pouvant devenir à la fois journal du jour et écran de télé. William Skene, professeur adjoint au Département de chimie, est à la tête d’un groupe de chercheurs travaillant à la mise au point des structures de polymères qui sont indispensables à cette nouvelle génération d’écrans nommés Organic Light Emetting Diodes (OLED).

«L’imagination sera la seule limite aux applications», lance le chimiste avec enthousiasme. Écrans d’ordinateurs et de téléphones portables, panneaux publicitaires, textiles d’un tout autre genre. Grâce à son grand potentiel de résolution, son ultraminceur, sa très faible consommation d’énergie, son format flexible et facile à transporter, on pourra donner n’importe quelle forme à l’écran, qui ne sera nullement influencé par la température. À partir de là, on peut penser à des écrans sur une surface courbe desquels on ne perdrait pas l’image par angulation, des vêtements électroniques, une nouvelle conception du livre, des voies différentes pour le cinéma.

«Vous n’aurez pas d’écran de télé sur votre chemise la semaine prochaine, mais on peut s’attendre à voir cette technologie apparaitre d’ici 10 ans», mentionne le spécialiste en matériaux.

L’OLED se compose d’une couche émettrice disposée entre deux électrodes transparentes; un courant passe entre les électrodes et la recombinaison des charges induit une émission de couleur par réaction électrochimique. Ainsi, la couleur est produite par les composantes de l’écran. Des entreprises comme Kodak, Philips, Pioneer et Dupont suivent de très près ce type de recherches en plus de le financer.

Les écrans de première génération, à tube (cathode ray tube), qu’on trouvait dans les télévisions et ordinateurs domestiques classiques, étaient gros, encombrants et lourds. La deuxième génération est celle des écrans à cristaux liquides, soit celle des écrans plats, des ordinateurs portables, des écrans de calculatrices et des agendas électroniques (Palm Pilots): des cristaux liquides sont déposés sur une surface dure et l’éclairage vient du fond. Toute la technologie actuelle repose sur ce
principe. Il s’agissait déjà d’une avancée majeure, mais les limitations de ce type d’écrans sont assez considérables: outre sa rigidité, l’émission lumineuse se fait dans une seule direction. Si l’utilisateur n’est pas en face de son écran, il ne peut voir l’image nettement.

L’élaboration d’une troisième génération suscite beaucoup d’espoir dans le monde des technologies. L’OLED fontionne à base de matériaux organiques tels que le carbone, l’hydrogène, l’oxygène et le soufre. Son aspect révolutionnaire, explique William Skene, vient du fait que son fonctionnement repose sur une réaction chimique comme dans une pile. C’est cette réaction qui engendre l’émission d’énergie sous forme lumineuse. «Selon la longueur d’onde sur le spectre lumineux et selon la composition chimique, on peut déduire la couleur qui sera émise», indique le chercheur.

Problèmes et applications

Un des problèmes actuellement est la perte d’énergie qui se produit au passage entre la surface de l’écran et la couche électrique. Pour augmenter l’efficacité du dispositif, il s’agirait d’ajouter une couche dite d’«injection de trous». C’est sur ce point précis que travaille William Skene: l’idée est de faire «davantage de petits pas au lieu d’un grand saut», commente-t-il. Cette couche supplémentaire est faite de ces nouveaux polymères qui deviennent conducteurs, contrairement aux plastiques en général.

Il faudra malheureusement encore une décennie avant que la recette magique soit au point. Il y a encore trop de problèmes liés à la synthèse de ces polymères: «C’est trop instable; si l’on ne contrôle pas bien les paramètres de sa conception, ça peut se transformer en pierre», craint le professeur Skene.

Jusqu’ici, la découverte la plus importante du groupe de chercheurs est une méthode qui permet de contrôler facilement la masse moléculaire de façon à éviter des conditions de synthèse compliquées ou difficiles à obtenir (par exemple un environnement sans oxygène). Cette méthode, baptisée Dial-in, occupera une dizaine de chercheurs de son laboratoire l’été prochain.

Nathalie Guimond
Collaboration spéciale

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