Hebdomadaire d'information
 
Volume 40 - numÉro 19 - 6 fÉvrier 2006
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 Archives de Forum

La réussite scolaire, gage d’intégration raciale

Marie McAndrew se penche sur les expériences d’amélioration du rendement scolaire des Noirs en Angleterre

À gauche et à droite sur la photo, Louise Fortin, de la Direction des services aux communautés culturelles du ministère de l'Éducation, du Loisir et du Sport, et Franz Benjamin, de la Commission scolaire de la Pointe-de-l'Île, qui ont été invités à commenter les données livrées par Marie McAndrew.

Les meilleurs projets éducatifs rehaussant la réussite scolaire des minorités visibles défavorisées sont ceux qui misent sur l’harmonie des rapports interethniques.

C’est la conclusion qui se dégage de rapports gouvernementaux sur la réussite scolaire chez les jeunes Noirs caribéens en Angleterre. Ces rapports font partie de la liasse de documents rapportée par Marie McAndrew d’un séjour outre-Atlantique et qu’elle a déballée au cours d’une conférence midi du Centre d’études ethniques des universités montréalaises (CEETUM) le 27 janvier.

«J’ai préféré vous livrer à chaud le matériel plutôt que d’attendre un an pour publier un texte», a déclaré à son auditoire Mme McAndrew, titulaire de la chaire en relations ethniques du CEETUM.

Pas de recette miracle

En Angleterre, chaque école doit avoir une politique d’intégration raciale, en évaluer l’efficacité et prendre les moyens nécessaires si ses objectifs ne sont pas atteints. Les écoles ont à rendre des comptes entre autres sur l’état des relations interethniques, le cheminement scolaire des minorités, la discrimination raciale et la présence des minorités au sein des différents comités. Si des différences sont observées entre les groupes, l’école doit chercher des explications et le rapport d’évaluation doit être public. «C’est une loi qui a des dents», affirme Marie McAndrew.

Un budget de près de 450 M$ est en outre alloué au soutien pédagogique auprès de minorités dont la réussite scolaire est inférieure à la moyenne nationale (voir l’encadré). Des inspecteurs gouvernementaux font la tournée des écoles afin d’évaluer la situation, notamment en ce qui concerne les Noirs caribéens, qui éprouvent plus de difficultés que les Africains.

On s’attendrait à ce que les meilleurs exemples de rehaussement scolaire de cette clientèle soient observés dans des écoles ayant élaboré des approches pédagogiques sophistiquées destinées à cette clientèle ou ayant mis sur pied des activités particulières de lutte au racisme. Les rapports indiquent que ce sont plutôt dans les écoles misant sur un climat global d’harmonie entre les groupes ethniques que l’amélioration du rendement scolaire a été la plus manifeste.

«Ces écoles n’appliquent pas de recettes spéciales pour les Noirs caribéens qui seraient différentes des méthodes destinées aux autres élèves», peut-on lire dans l’un des rapports. «Elles n’ont rien inventé de nouveau», dit-on plus loin.

Les projets pédagogiques de ces écoles véhiculent des positions antiracistes fermes qui ne demeurent pas que sur papier; les élèves sont conscients que tout geste répréhensible sera sanctionné par une équipe d’éducateurs fortement conscientisés à ce problème.

L’unité de l’équipe-école derrière les objectifs est d’ailleurs une caractéristique des succès britanniques; le personnel se connait, travaille ensemble depuis longtemps et «accorde toute l’attention nécessaire aux cas spéciaux». Les parents coopèrent avec l’école et leurs rapports avec les enseignants sont harmonieux.

Sur le plan des valeurs, ces écoles tablent sur le respect des élèves entre eux et à l’endroit des enseignants, sur l’importance du travail bien fait et sur la discipline même à l’extérieur de l’établissement. Elles obligent le port du costume et récompensent régulièrement les réussites pour stimuler les élèves.

Parallèlement à ces valeurs jugées «traditionnelles», l’innovation est encouragée si elle est jugée «bonne pour l’école».

Effet Pygmalion?

Les rapports vont donc de ce qui relève parfois du lieu commun jusqu’au témoignage anecdotique d’un enseignant emballé. Les écoles de la réussite sont celles qui misent... sur la réussite!

«Il y a peut-être un effet Pygmalion dans ces rapports, reconnait Marie McAndrew. L’amélioration des résultats des Noirs s’est fait sentir dans l’ensemble du pays et pas uniquement dans les écoles qui ont bénéficié de subventions.»

Peut-on en tirer quelque chose? La professeure dégage quatre conditions gagnantes de la situation observée en Angleterre: la reconnaissance explicite d’un problème de rendement scolaire chez certains groupes ethniques et la collecte de données permettant de suivre l’évolution de la situation; un encadrement contraignant quant aux résultats à atteindre, un budget important pour y arriver et une liberté dans les moyens à prendre; l’abandon de la perspective idéologique se basant sur l’analyse des causes du racisme au profit d’une approche pragmatique visant à modifier les pratiques scolaires; et le partage des expériences de succès comme moyen d’émulation.

«Mais parmi toutes ces conditions, le facteur essentiel de la réussite du projet est la volonté politique de la direction de prendre les choses en main», conclut la professeure.

Daniel Baril

D’autres facteurs que la pauvreté sont en cause

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